24 sept. 2023

P(l)ages , poésie de la mer, du sable....

 

Tout est original, joliment présenté dans ce recueil de poésie.

D’abord son format agréable à manier, à lire car il y a des “respirations”, des blancs, quelques photos. Ensuite il a été réalisé par 4 poètes : Brigitte Bardou,Viviane Fournier, Marion Le Braz et Alcyon. mais on ne sait pas qui a écrit quoi: les poèmes ne sont pas signés quoique quelques pistes...

Voici la couverture de P(l)ages


Sur la page de garde on lit ceci:

"À celles et ceux qui nous ont fait découvrir nos premières plages.

À celles et ceux à qui nous avons eu la joie de les faire découvrir à notre tour".


Tous les poèmes, parfois très courts ou d’autres racontant une histoire, ont trait à la plage, la mer, l’eau. Aux couleurs, aux mouvements des vagues, au sable...Aux personnes, beaucoup d’enfants, mais aussi aux migrants, aux amours, aux souvenirs. 





Parfois, en bas du poème, en bas de page, un mot qui fait écho.

 



Pour que vous vous en fassiez une idée, j’ai préféré photographier quelques pages plutôt que de recopier les mots.

 


Publié par Lisières, un joli cadeau à vous faire, à offrir aussi.

19 sept. 2023

Expressions imagées / Expresiones evocadoras

Tout le monde sait que la partie la plus délicate à manier dans une langue étrangère est celle des expressions. Une fois bien comprises, les placer à bon escient dans la conversation sans en changer un seul mot est vraiment compliqué.

Combien de fois ai-je provoqué l’hilarité de ma famille espagnole ? Ça vous est peut-être arrivé dans une autre langue…..

Voici deux expressions que j’aime, si imagées.


« Hacer la vista gorda » 

Ici une courte histoire d’antan. Jeune et fraîchement arrivée en Espagne avec une vieille Dyane, voilà qu’un douanier m’attrape, me dit que j’aurais dû changer la plaque belge depuis 2 mois, enfin, qu’il me donne une semaine et qu’entre-temps il fera « la vista gorda ».

Je comprends les mots, vista = vue et gorda=grosse…il va faire la grosse vue ? Je suis perplexe mais ris sous cape car une image s’installe dans ma tête : le même douanier avec des lunettes aux verres si épais qu’il ne voit rien. Presque.

L’expression veut dire : faire comme si on ne voyait pas, détourner la vue.

aquí una corta historia de antaño. Joven y recién llegada a España en un viejo Dyane, un aduanero me atrapó y me leyó la cartilla: hubiera tenido que cambiar la matrícula belga desde hacía 2 meses, pero que bueno, me daba una semana y mientras haría la vista gorda.

Yo entendía las palabras “vista” y “gorda”…pero juntas, ¿qué diablos querían decir? Me quedé perpleja pero riéndome por lo bajo ya que una imagen se instaló en mi cabeza: la del mismo aduanero con unas gafas con cristales tan espesos que no podía ver nada. Casi.


                             Foto: Colo, Mallorca

 

No todo el monte es orégano.

Oh qu’elle sent bon celle-ci, un mont couvert d’origan...

D’après Wiki « Le mot « origan » est issu du grec ὀρίγανον / origanon, signifiant « qui se plaît sur la montagne », composé de ὄρος / oros « montagne » et γάνος / ganos « éclat, aspect riant » ; pour les anciens cette plante avait une grande valeur car elle était un remède, une solution à tous les maux.

Donc voilà que si le mont n’est pas entièrement couvert, on va y trouver des difficultés, des contrariétés. Avouez que « Tout le mont n’est pas origan » est franchement plus porteur d’images, de senteurs que….hum, je pensais à « Tout n’est pas rose ».

Oh, ¡qué bien huele esta, un monte recubierto de orégano, allá vamos!

Según Wiki la palabra « origan » proviene del griego ὀρίγανον / origanon, que significa « que disfruta en la montaña », compuesta de ὄρος / oros « montaña » y γάνος / ganos « destello, aspecto risueño? » . Para los antiguos esta planta tenía un gran valor ya que era un remedio, una solución a nuestros males.

En francés se diría…hum, por ejemplo, “no todo es de color rosa”, que es menos evocador, ¿no?



13 sept. 2023

Le calme délicieux du couchant / La divina calma del ocaso

 











 

 

 

A force de scruter le ciel, de palper l’air 

humide, d’écouter le vent des îles, tout comme

 le paysan ou le marin, je savais samedi dernier

 que ce serait le dernier jour de grosse chaleur.

Courte excursion à la côte à l’heure du coucher

 du soleil avec mon appareil photo.

Il y régnait une étrange lumière mais ce n’est

 qu’en regardant les photos sur mon écran, 

tard le soir, que j’ai pensé : pourquoi ne suis-

je pas peintre ?

 

 

A fuerza de escrutar el cielo, de palpar el aire húmedo, de escuchar el viento de las islas, tal como el campesino o el marinero, sabía el sábado pasado que sería el último día de calor.

Corta excursión a la costa a la hora de la puesta del sol con mi cámara de fotos.

Reinaba una luz extraña pero sólo fue al mirar las fotos en mi ordenador, tarde por la noche, que pensé: ¿por qué no seré pintora?



J’ai découvert un sonnet du Mexicain Manuel José Othon (1858-1906). J’en aime 

le rythme, les couleurs.

                                        

A un peintre

Voici, peintre, ton splendide paysage:
un lac obscur, des rafales marines
trempées de teintes cramoisies
et, dans le bleu profond des nuages,

un tronc qui balance son feuillage
au souffle des vents vespéraux,
et tachés de vert les coteaux
et de jaune le fond du bocage;

un rocher de lichens couvert;
une langue de terre illuminée
par le dernier rayon du soleil mort;

et dans la lueur de la soirée
une voile au loin, noyée
dans le calme délicieux du couchant.

 
(Trad. Colo)

He descubierto un soneto del Mejicano Manuel José Othon (1858-1906). Me gustan los colores y el ritmo.


A un pintor

He aquí, pintor, tu espléndido paisaje:
un lago oscuro, ráfagas marinas
empapadas en tintas cremesinas
y en el azul profundo del celaje,

un tronco que columpia su ramaje
al soplo de las auras vespertinas,
y manchadas de verde las colinas
y de amarillo el fondo del boscaje;

un peñasco de líquenes cubierto;
una faja de tierra iluminada
por el último rayo del sol muerto;

y de la tarde al resplandor escaso,

una vela a lo lejos, anegada
en la divina calma del ocaso.



5 sept. 2023

La musique de l'âme

 

Le poème d’aujourd’hui, très simple et basé sur le rythme, la répétition, m’a

été soufflé par la magnifique pleine lune, la lune bleue, de la fin août.




Musique secrète

Jaime Torres Bodet (Mexico 1902-1974)



Comme la forêt a

tant de fleurs secrètes

que semble odorante

la lumière de la lune.


Comme le ciel a

tant d’étoiles secrètes,

elle semble briller

la nuit de lune.


Comme l’âme a

sa musique secrète,

il semble que l’âme

pleure avec la lune!…



(Trad: Colo)

                                    Lune appelée bleue / Luna llamada azul



Música oculta



Jaime Torre Bodet (Mexico 1902-1974)



Como el bosque tiene
tanta flor oculta,
parece olorosa
la luz de la luna.


Como el cielo tiene
tanta estrella oculta
parece que brilla
la noche de luna.


Como el alma tiene
su música oculta,
parece que el alma
llora con la luna!…



30 août 2023

Et la balustrade cède / Y la baranda cede

 

J’aime les bougainvilliers, pour leurs couleurs, bien sûr, mais surtout pour leur sauvagerie.  Avec leurs longues tiges, leurs grandes épines acérées, ils poussent dans tous les sens, sont hirsutes ou grimpeurs, selon. Échevelés. 

 Des branches ont même eu soif…

 



 


Voici un subtil poème de Gioconda Belli.

 

 L’Amour des bougainvilliers

Gioconda Belli (Nicaragua 1948-)


Je suis tentée par l’amour et ses épines

ses égratignures têtues

sa façon de sauter les haies

et de grimper aux murs

sa vocation de fleur

de bougainvillier rose, blanc, mauve

qui s’enchevêtre dans les patios agrestes.



Je ne sais ce que je veux de lui

ce qu’il imagine de moi

quels rêves ou chimères nous esquissons

en laissant refroidir le café sur la table,

les regards accrochés tels des hameçons

sur le poisson rouge qui nage dans nos poitrines.


Tandis que nous parlons

chacun tire sur la ligne

en une lutte tenace pour la capture.

Nous discutons de si oui ou si non

tandis que le bougainvillier monte

nous emmêle

et les fleurs explosent

et la balustrade cède.

(Trad: Colo)





EL AMOR DE LAS BUGANVILIAS

Gioconda Belli (Nicaragua 1948-)


Me tienta el amor con sus espinas

sus arañazos tercos

su manera de brincarse los cercos

y subirse a las tapias

su vocación de flor

de buganvilia rosa, blanca, morada

enredándose en los agrestes patios.

 

No sé qué quiero de él

qué imagina de mí

qué sueños o quimeras hilvanamos

dejando enfriar el café sobre la mesa,

las miradas prendidas como anzuelos

sobre el pez rojo que nos nada en el pecho.

 

Mientras hablamos

cada cual da tirones a la caña

en la lucha tenaz por apresarlo.

Discutimos de si sí o si no

mientras la buganvilia sube

nos enreda

y las flores explotan

y la baranda cede.

23 août 2023

Les petites épines sont petites /Las pequeñas espinas son pequeñas

 Comme beaucoup de poèmes, celui-ci peut s'interpréter de la façon qu'il vous

 plaira. Moi j'y ai vu, à cause de la garde civile, de la faim, de la douleur, des mules,

 venez voir etc, une référence à un/des gitans. Libre cours à vos imaginations...


Compatriotes des forêts

Raquel Lanseros
(Jerez de la Frontera, España, 1973)

 

Comment seras-tu maintenant que personne ne te couvre?

Toi qui craignais tant l’hiver,

les tables sans viande

et la garde civile.

 

Mille fois j’ai pensé t’écrire.

Parfois je ne trouvais pas le mot nostalgie,

d’autres je me trompais en épelant l’adresse.


La douleur fait mal, disais-tu, mais si on est courageux

les petites épines sont petites.

Tu avais raison. La vie

avec ses défense d’entrer et ses venez voir

est belle comme une fiancée à l’aube.

Ce matin j’ai vu les nuages se hérisser

en traversant – allumés – le champ des mules.


Je pense à tes longs yeux, à tout ce qu’ils ont vu.

Des femmes déjà âgées il y a un siècle.

Un gramophone. Le vent

depuis le port de Ceuta.

La Havane avant le Che. Et les sous en argent.


Je pense à tes jours de feu. J’ai besoin que tu saches

que je n’oublie pas le lit de ton silence ouvert.

Sur lui je repose.

Sur lui je vis.

(Trad: Colo)

                              Recueil de poèmes


Compatriota de los bosques


Raquel Lanseros
(Jerez de la Frontera, España, 1973)

¿Cómo estarás ahora sin que nadie te abrigue?
Tú que tanto temías al invierno,
a las mesas sin carne
y a la guardia civil.

He pensado mil veces escribirte.
A veces no encontraba la palabra nostalgia,
otras, me equivocaba al deletrear las señas.

Duele el dolor, decías, pero si uno es valiente
las pequeñas espinas son pequeñas.
Tenías razón. La vida
con sus prohibido-el-paso y sus pasen-y-vean
es hermosa como una novia al alba.
Esta mañana he visto las nubes erizarse
al cruzar -encendidas- el prado de las mulas.

Pienso en tus ojos largos, en todo lo que vieron.
Mujeres que ya eran ancianas hace un siglo.
Un gramófono. El viento
desde el puerto de Ceuta.
La Habana previa al Che. Y los reales de plata.

Pienso en tus días de lumbre. Necesito que sepas
que no olvido la alcoba de tu silencio abierto.
En ella yo reposo.

En ella vivo.



16 août 2023

Une lettre d'amour / Una carta de amor

 

Pour terminer ce mini cycle Don Quichotte, voici la lettre d’amour qu’il a écrite à sa Dulcinée et qu’il demande à Sancho d’apprendre par cœur.

Si vous la lisez attentivement, vous serez peut-être émus, comme moi.


LETTRE DE DON QUICHOTTE A DULCINÉE DU TOBOSO. Chapitre XXV

«Haute et souveraine Dame,

«Le piqué jusqu'au vif de la pointe aiguë de l'absence, le blessé dans l'intime région du cœur, dulcissime Dulcinée du Toboso, vous souhaite la santé dont il ne jouit pas. Si votre beauté continue à me dédaigner, si vos mérites ne finissent par s'expliquer en ma faveur, si enfin vos rigueurs persévèrent, il me sera impossible, quoique accoutumé à la souffrance, de résister à tant de maux, parce que la force du mal sera plus forte que ma force. Mon fidèle écuyer Sancho vous rendra un compte exact, belle ingrate et trop aimable ennemie, de l'état où je suis à votre intention. S'il plaît à Votre Grâce de me secourir, vous ferez acte de justice, et sauverez un bien qui vous appartient: sinon faites ce qu'il vous plaira; car, en achevant de vivre, j'aurai satisfait à votre cruauté et à mes désirs.

Celui qui est à vous jusqu'à la mort.

Le chevalier de la Triste figure»

(merci à Adrienne pour la recherche de la traduction française)

El Toboso https://es.wikivoyage.org/wiki/El_Toboso  (merci Christw!)
 

Carta de Don Quijote a Dulcinea de Toboso Capítulo XXV



«Soberana y alta señora:

El herido de punta de ausencia, y el llagado de las telas del corazón, dulcísima Dulcinea del Toboso, te envía la salud que él no tiene. Si tu fermosura me desprecia, si tu valor no es en mi pro, si tus desdenes son en mi afincamiento, maguer que yo sea asaz de sufrido, mal podré sostenerme en esta cuita, que además de ser fuerte es muy duradera. Mi buen escudero Sancho te dará entera relación, ¡oh bella ingrata, amada enemiga mía!, del modo que por tu causa quedo. Si gustares de socorrerme, tuyo soy; y si no, haz lo que te viniere en gusto, que con acabar mi vida habré satisfecho a tu crueldad y a mi deseo.

Tuyo hasta la muerte,

El caballero de la triste figura»


10 août 2023

Don Quijote et Verlaine

 

À Don Quichotte

Paul Verlaine (1844-1896)

Recueil, Premiers vers (1864).


Ô Don Quichotte, vieux paladin, grand Bohème,

En vain la foule absurde et vile rit de toi :

Ta mort fut un martyre et ta vie un poème,

Et les moulins à vent avaient tort, ô mon roi !


Va toujours, va toujours, protégé par ta foi,

Monté sur ton coursier fantastique que j'aime.

Glaneur sublime, va ! ― les oublis de la loi

Sont plus nombreux, plus grands qu'au temps jadis lui-même.


Hurrah ! nous te suivons, nous, les poètes saints

Aux cheveux de folie et de verveine ceints.

Conduis-nous à l'assaut des hautes fantaisies,


Et bientôt, en dépit de toute trahison,

Flottera l'étendard ailé des Poésies

Sur le crâne chenu de l'inepte raison !

Paul Verlaine. 

 

Ce poème n'est, étrangement, pas traduit ( à ma connaissance) en espagnol. 

Peut-être un jour essayerais-je .... 

6 août 2023

Marcela

Don Quijote est une histoire d’hommes, mais au long des chapitres apparaissent 39 femmes. Elles sont toutes des femmes soumises, épouses soumises, ou servantes, lavandières.., on les connaît les pauvres.

Toutes sauf Marcela dont vous pouvez suivre toute l’histoire dans les chapitres XII, XIII et XIV. La fin de chapitre XIV est très éclairante https://www.wattpad.com/1050000548-don-quichotte-i-chapitre-14

Alors cette Marcela nous intéresse car cette très belle jeune fille, qui sait lire et écrire, qui est orpheline et a hérité d’une belle fortune, a décidé de vivre dans la montagne et de garder les chèvres. Seule. Libre. Nous sommes au XVIIº siècle. 

Une bergère donc qui est accusée de la mort de Grisóstomo qui était fou d’amour pour elle et qu’elle a éconduit. 


 

Longuement elle plaide sa cause : (court extrait)

Si je conserve ma vertu parmi les arbres de ces solitudes, pourquoi veut-il me la faire perdre, celui qui veut que je la garde parmi les hommes ? J’ai, comme vous le savez, des biens à moi ; je ne convoite pas ceux des autres ; ma situation me rend libre, et il ne me plaît pas de me faire esclave. Je n’aime ni ne hais personne. On ne peut dire que je trompe celui-ci, que je flatte celui-là, que je me raille de l’un et m’adoucis avec l’autre. L’honnête compagnie des bergères de ces villages et le soin de mes chèvres suffisent à mes plaisirs.

Si yo conservo mi pureza con la compañía de los árboles, ¿por qué ha de querer que la pierda el que quiere que la tenga con los hombres? Yo, como sabéis, tengo riquezas propias, y no codicio las ajenas; soy de naturaleza libre, y no gusto de sujetarme; ni quiero ni aborrezco a nadie; no engaño a este ni solicito a aquel; ni tonteo con uno ni me entretengo con el otro. La conversación honesta con las zagalas de estas aldeas y el cuidado de mis cabras me entretienen.”

Passage où Don Quichotte défend Marcela. (j’ai abrévié)

Qu’aucune personne, de quelque condition qu’elle soit, n’ose suivre la belle Marcela sous peine de tomber sur ma furieuse indignation. Elle a montré par de claires et suffisantes raisons le peu ou l’absence de culpabilité qu’elle a eue dans la mort de Grisóstomo, (…) et sa cause est juste; au lieu d’être suivie et poursuivie, elle doit être honorée et estimée par tous les bons du monde (...)”

Palabras de don Quijote defendiendo a la pastor Marcela:

Ninguna persona, de cualquier estado y condición que sea, se atreva a seguir a la hermosa Marcela, so pena de caer en la furiosa indignación mía. Ella ha mostrado con claras y suficientes razones la poca o ninguna culpa que ha tenido en la muerte de Grisóstomo, y cuán ajena vive de condescender con los deseos de ninguno de sus amantes; a cuya causa es justo que, en lugar de ser seguida y perseguida, sea honrada y estimada de todos los buenos del mundo, pues muestra que en él ella es sola la que con tan honesta intención vive”.


 


2 août 2023

Ni folie, ni utopie / Ni locura, ni utopía

 

Cet été sur France Inter, à raison de 3 minutes par jour, nous pouvons suivre, grâce à William Marx, les pas de Don Quichotte, El Quijote.

C’est passionnant, vivant, les podcasts sont ici: https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/un-ete-avec-don-quichotte

Et on se rend compte de l’actualité, ou de l’intemporalité de ce roman extraordinaire.

Voici un exemple: “Y ¿Dónde has visto tú, o leído jamás, que caballero andante haya sido puesto ante la justicia, por más homicidios que hubiese cometido? “

Trad:"Et, où as-tu vu, toi, ou lu un jour, qu’un chevalier errant ait été traduit en justice, quels que soient les crimes qu’il ait commis”.

Impunité des puissants…

Changer le monde, ami Sancho, n'est ni folie ni utopie...Mais justice !
 

Nous allons passer une partie de ce mois d’août, des billets courts, avec ce fier Hidalgo, ça vous dit?

30 juil. 2023

Hibou, chants et oreilles / Mochuelo, canto y orejas

 

L’été ce sont des va-et-vient de la famille, de leurs chiennes à garder mais aujourd’hui tout est calme. Ils ont tous regagné leurs pénates. Comme le dit l’expression espagnole “Cada mochuelo a su olivo”.

En traduction littérale “Chaque hibou sur son olivier”. 

 



Profitons-en pour regarder de plus près d’autres expressions que j’entends souvent.

Vous le savez sans doute, nous avons eu des élections il y a peu, alors “A palabras necias, oídos sordos” était de mise...

Littéralement “ À mots idiots, oreilles sourdes”. 


Il y en a une autre qui, avec l’âge et les maux divers qui l’accompagnent, me plaît beaucoup “Quien canta su mal espanta”, “qui chante fait fuir son mal”

Très recommandable donc.


                                    

Passez une bonne semaine.

21 juil. 2023

La furtive ambiguïté de la vie..../ La furtiva ambigüedad de la vida

 Roberto Juarroz, l’œuvre de toute sa vie, des recueils qui s'appellent 

tous "Poésie Verticale", des poèmes sans titres et qui sont des réflexions 

sur l'homme, les mots, l'éthique, la morale, la mort et l'amour. Des poèmes qui, 

comme celui d'aujourd'hui, mettent en mots ce que parfois nous percevons sans le

 formuler.



Tout texte, tout mot change
selon les heures et les angles du jour ou de la nuit,
selon la transparence des yeux qui les lisent
ou le niveau des marées de la mort.

Ton nom n’est pas le même,
ma parole n’est pas la même
avant et après la rencontre
avant et après avoir repensé
que demain nous ne serons plus.

Chaque chose est différente
regardée de jour ou de nuit,
mais ils deviennent plus différents encore
les mots qu’écrivent les hommes
et les mots que n’écrivent pas les dieux.

Et il n’y a aucune heure,
ni la plus prometteuse, lucide ou impartiale,
ni même l’heure sans quartiers de la mort,
qui puisse équilibrer les reflets,
ajuster les distances
et faire dire aux mêmes mots les mêmes choses.

Tout texte, toute forme, qu’on le veuille ou non,
est le miroir changeant, chatoyant,
de la furtive ambiguïté de la vie.
Rien n’a une seule forme pour toujours.

Même l’éternité n’est pas pour toujours.


(Trad: Colo, inspirée de celle de Jacques Ancet)


Roberto Juarroz

Todo texto, toda palabra cambia
según las horas y los ángulos del día o de la noche,
según la transparencia de los ojos que los leen
o el nivel de las mareas de la muerte.

Tu nombre no es el mismo,
mi palabra no es la misma
antes y después del encuentro,
antes y después de volver a pensar
que mañana no estaremos.

Cualquier cosa es distinta
si se mira de día o de noche,
pero se vuelven aún más distintas
las palabras que escriben los hombres
y las palabras que no escriben los dioses.

Y no hay ninguna hora,
ni la más promisoria o lúcida o ecuánime,
ni siquiera la hora sin carteles de la muerte,
que pueda equiparar los reflejos,
ajustar las distancias
y hacer que las mismas palabras
digan las mismas cosas.

Todo texto, toda forma, se quiera o no se quiera,
es un mudable, tornasolado espejo
de la furtiva ambigüedad de la vida.
Nada tiene una sola forma para siempre.

Ni siquiera la eternidad es para siempre.

17 juil. 2023

De la nécessité de savoir voler..../ De la necesidad de saber volar...

 

Merci à Sergio qui m’a signalé cet autre poème d’Oliverio Girondo, encore plus surréaliste, fort amusant ai-je trouvé, malgré, c’était l’époque, une image de la femme qui ferait hurler je suppose si publié en 2023. 

 

Épouvantail par Oliverio Girondo. (Buenos Aires 1881-1967)

 

Je me fiche éperdument que les femmes
aient des seins comme des magnolias ou comme des figues sèches,
une peau de pêche ou de papier de verre.
Je n’attache aucune importance
au fait qu’elles se réveillent avec une haleine aphrodisiaque
ou avec une haleine insecticide.


Je suis parfaitement capable de supporter
qu’elles aient un nez digne de remporter le premier prix
d’une exposition de carottes;
-mais il y a une chose- et sur ce point je suis intraitable- que je ne leur pardonne
sous aucun prétexte, c’est de ne pas savoir voler.
Si elles ne savent pas voler, celles qui prétendent me séduire perdent leur temps!


C’est la raison et la seule pour laquelle je suis tombé si follement
amoureux de Maria Luisa.


Que m’importaient ses lèvres à épisodes et ses chaleurs sulfureuses?
Que m’importaient ses extrémités de palmipède
et ses regards de pronostic réservé?
Maria Luisa était une véritable plume!
Dès l’aube elle volait de la chambre à la cuisine,
elle volait de la salle à manger au cellier.
En volant elle préparait mon bain, ma chemise.
En volant elle faisait ses courses, vaquait à ses occupations…
Avec quelle impatience j’attendais qu’elle rentre, en volant,
de quelque promenade dans les environs!


Là-bas au loin, perdu dans les nuages, un point rose.
« Maria-Luisa! Maria-Luisa! » …et en quelques secondes,
elle m’étreignait de ses jambes de plumes,
pour m’emmener, en volant, quelque part.


Durant des kilomètres de silence  nous planions en une caresse
qui nous rapprochait du paradis;
durant des heures entières nous faisions notre nid dans un nuage,
comme deux anges, et soudain,
en vrille, en feuille morte,
l’atterrissage forcé d’un spasme.
Quel délice d’avoir une femme aussi légère…,
même si elle nous fait voir trente-six chandelles, de temps en temps!
Quelle volupté de passer ses journées dans les nuages
et ses nuits dans un vol sans escale!


Après avoir connu une femme éthérée,
Quel sorte d’attrait une femme terrestre peut-elle offrir?
Il n’y a pas de différence substantielle, n’est-ce pas?
entre vivre avec une vache ou  avec une femme
qui a les fesses à soixante-dix huit centimètres au-dessus du sol.


Moi, du moins, je suis incapable de comprendre
la séduction d’une femme pédestre,
et pour autant que je m’efforce de le concevoir,
je ne peux même pas imaginer
qu’on puisse faire l’amour autrement qu’en volant.

Traduit par Juliette Gheerbrant et Olivier Favier.

 


 Igor Shulman

Pauline Bailly https://www.artmajeur.com/pauline-bailly-1/fr?view=grid

 

ESPANTAPÁJAROS Oliverio Girondo, (Buenos Aires 1881-1967)



No se me importa un pito que las mujeres
tengan los senos como magnolias o como pasas de higo;
un cutis de durazno o de papel de lija.
Le doy una importancia igual a cero,
al hecho de que amanezcan con un aliento afrodisíaco
o con un aliento insecticida. 


Soy perfectamente capaz de sorportarles
una nariz que sacaría el primer premio
en una exposición de zanahorias;
¡pero eso sí! -y en esto soy irreductible- no les perdono,
bajo ningún pretexto, que no sepan volar.
Si no saben volar ¡pierden el tiempo las que pretendan seducirme! 


Ésta fue -y no otra- la razón de que me enamorase,
tan locamente, de María Luisa.
¿Qué me importaban sus labios por entregas y sus encelos sulfurosos?
¿Qué me importaban sus extremidades de palmípedo
y sus miradas de pronóstico reservado?
¡María Luisa era una verdadera pluma!
Desde el amanecer volaba del dormitorio a la cocina,
volaba del comedor a la despensa.
Volando me preparaba el baño, la camisa.
Volando realizaba sus compras, sus quehaceres...
¡Con qué impaciencia yo esperaba que volviese, volando,
de algún paseo por los alrededores!
Allí lejos, perdido entre las nubes, un puntito rosado.
"¡María Luisa! ¡María Luisa!"... y a los pocos segundos,
ya me abrazaba con sus piernas de pluma,
para llevarme, volando, a cualquier parte. 


Durante kilómetros de silencio planeábamos una caricia
que nos aproximaba al paraíso;
durante horas enteras nos anidábamos en una nube,
como dos ángeles, y de repente,
en tirabuzón, en hoja muerta,
el aterrizaje forzoso de un espasmo.
¡Qué delicia la de tener una mujer tan ligera...,
aunque nos haga ver, de vez en cuando, las estrellas!
¡Que voluptuosidad la de pasarse los días entre las nubes...
la de pasarse las noches de un solo vuelo! 


Después de conocer una mujer etérea,
¿puede brindarnos alguna clase de atractivos una mujer terrestre?
¿Verdad que no hay diferencia sustancial
entre vivir con una vaca o con una mujer
que tenga las nalgas a setenta y ocho centímetros del suelo?
Yo, por lo menos, soy incapaz de comprender
la seducción de una mujer pedestre,
y por más empeño que ponga en concebirlo,
no me es posible ni tan siquiera imaginar
que pueda hacerse el amor más que volando.

 

11 juil. 2023

En Bretagne / En Bretaña

 Si Oliveiro Girondo est Argentin, il a passé énormément de temps en Europe. 

Audacieux dans ses images, ironique, une poésie d’avant-garde de son pays. 

Ici nous sommes dans une commune française, dans le Finistère, Douarnenez, vous connaissez peut-être, moi pas.




Paysage Breton

Oliveiro Girondo ( Buenos Aires 1891-1967)

Douarnenez,

d’un coup de gobelet

s’embourbe

entre ses maisons-dés

un bout de mer,

avec une odeur de sexe à s’en pâmer.



Barques blessées, au sec, les ailes pliées !

Des tavernes qui chantent avec une voix d’orang-outan !

Sur les quais,

mercurisés par la pêche,

des marins qui se tiennent les bras

pour apprendre à marcher,

et vont s’éclater

avec un élan de vague

sur les murs;

des femmes saumâtres,

iodées

aux yeux aquatiques, aux cheveux d’algue,

qui révisent les filets pendus du toit

tels des voiles nuptiaux.



Le clocher de l’église

est un escamotage de prestidigitation,

il sort de sa cloche

une nuée de pigeons.

Tandis que les petites vieilles

avec leurs bonnets de nuit,

entrent dans la nef

pour se saouler de prières,

et pour que le silence

arrête de ronger un instant

les nez de pierre de saints. 

(Trad: Colo)

 


Paisaje bretón

Oliverio Girondo

Douarnenez,
en un golpe de cubilete,
empantana
entre sus casas como dados,
un pedazo de mar,
con un olor a sexo que desmaya.


¡Barcas heridas, en seco, con las alas plegadas!
¡tabernas que cantan con una voz de orangután!
sobre los muelles,
mercurizados por la pesca,
marineros que se agarran de los brazos
para aprender a caminar,
y van a estrellarse
con un envión de ola
en las paredes;
mujeres salobres,
enyodadas,
de ojos acuáticos, de cabelleras de alga,
que repasan las redes colgadas de los techos
como velos nupciales.


El campanario de la iglesia,
es un escamoteo de prestidigitación,
saca de su campana
una bandada de palomas.
Mientras las viejecitas,
con sus gorritos de
dormir,
entran a la nave
para emborracharse de oraciones,
y para que el silencio