22 janv. 2023

R. Alberti peintre / R. Alberti pintor

 La semaine dernière nous avons parlé de Rafael Alberti, de son choix de dédier plus de temps, d'efforts, de talent à la poésie qu'à la peinture, au dessin.

Il n'a pourtant jamais totalement abandonné sa palette ! De 1939 à 1977, il s'exile en France, en Argentine puis en Italie (Il reviendra en Espagne après la mort de Franco) et là il peint, dessine. 

En Italie il illustre de 6 "licogaphies" un cahier de poèmes de divers poètes en honneur à Garcia Lorca, c'est vraiment beau je trouve:  “Nunca fui a Granada”, de Rafael Alberti para García Lorca (1975)

 

Voici quelques dessins et peintures de lui, au début sans textes, puis avec des mots, ce qu'il appelle des licographies. 







15 janv. 2023

Couleurs ! / ¡ Colores !

Jeune, le poète Rafel Alberti, poète et peintre, hésita sur le chemin à prendre. S’il 

choisit le premier, la couleur, ses nuances, apparaissent dans ses mots.

C’est donc lui que j’ai choisi pour accompagner cette photo prise à l’aube ce matin, 

 le 15 janvier 2023. 

 


 

Cet extrait fait partie d’un recueil, puis d’un poème “À la peinture”



Mille neuf cent dix-sept


Mille neuf cent dix-sept

Mon adolescence: la folie

pour une boîte de peinture,

une toile blanche, un chevalet.


Bonheur de mon bagage

pour un matin impressionniste.

Plaisir divin, l’imprévue

leçon ouverte du paysage.


Candide et compliquée

coule la couleur de la palette,

qui éclaire l’arbre de violet

et de mauve le tronc à l’ombre


(…)


Le vermillon brûle heureux

de se marier avec le jaune

et de dresser la tour de briques

sous un orange lumineux.

Trad: Colo

 

  Mil novecientos diecisiete

Mil novecientos diecisiete.
Mi adolescencia: la locura
por una caja de pintura,
un lienzo en blanco, un caballete.

Felicidad de mi equipaje
en la mañana impresionista.
Divino gozo, la imprevista
lección abierta del paisaje.

Cándidamente complicado
fluye el color de la paleta,
que alumbra al árbol en violeta
y al tronco en sombra de morado.
(...)

El bermellón arde dichoso
por desposar al amarillo
y erguir la torre de ladrillo
bajo un naranja luminoso.

7 janv. 2023

Une bavarde / Una habladora

Manuel Machado (Sevilla 1874-1947), frère d’Antonio que vous connaissez 

sûrement, est lui aussi un poète connu, un peu moins célèbre.

Le poème d’aujourd’hui, léger et si vivant , m’a fait penser à Lorca. À vous de voir...

 

                            Fuente de Hispalis, Sevilla


La fontaine dit….

 

Elle ne se taisait pas, la fontaine,

ne se taisait pas…



Elle riait,

sautait,

bavardait...Et personne ne savait

ce qu’elle disait,



Claire, joyeuse, polyphonique,

colonnette salomonique

elle perforait

le silence du crépuscule

et, bavarde, s’élevait

pour voir le soleil couchant.



Elle ne se taisait pas, la fontaine,

ne se taisait pas…



Comme une veine

de la nuit, sa vrille,

argent froid,

rétrécissait

et s’étirait…

Montait,

descendait,

bavardait….Et personne ne savait

ce qu’elle disait.

Quand l’aube revenait.

(Trad: Colo) 


                                                  

                                 Gran cascada parque Cuidadela (Barcelona)

Manuel Machado: Dice la fuente…



No se callaba la fuente,
no se callaba…

Reía,
saltaba,
charlaba… Y nadie sabía
lo que decía,



Clara, alegre, polifónica,
columnilla salomónica
perforaba
el silencio del Poniente
y, gárrula, se empinaba
para ver el sol muriente.

No se callaba la fuente,
no se callaba…



Como vena
de la noche, su barrena,
plata fría,
encogía
y estiraba…
Subía,
bajaba,
charlaba… Y nadie sabía
lo que decía.

Cuando la aurora volvía…

Manuel Machado Ruiz


1 janv. 2023

Raconter le monde / Contar el mundo

 

                                          Jean Siméon Chardin.Les bulles de savon

 

C’était ce que Diana craignait le plus:

que la réalité débarque”

Liliana Heker


Conséquente, elle commença à laver son linge.

Elle mit de l’eau dans un seau

et agita le savon avec un sentiment ambigu:

c’était une odeur nouvelle et une nouvelle certitude

pour raconter le monde.

Regarder comment se cassent les bulles, dit-elle,

n’est pas plus étrange que se regarder dans le miroir.”


Elle pensait parler pour ses écrits

et elle rit tandis qu’elle touchait l’eau.

Le linge se submergeait lentement, et

la frottait lentement, à mesure qu’elle

apprenait le jeu.


Décidée,

elle prit chaque bulle

et lui donna un nom; c’était

le mieux qu’elle savait faire jusqu’à présent,

nommer, et que les choses

lui explosent dans la main.

Irene Gruss, poétesse, née à Buenos Aires en 1950

Traduction: Colo

 

            BONNE ANNÉE à tous, FELIZ AÑO a todos !


                                    Jean Siméon Chardin. Pompas de jabón, detalle


Era lo que Diana más temía::
que la realidad irrumpiera
Liliana Heker



Consecuente, ella empezó a lavar su ropa.
Puso agua en un balde
y agitó el jabón, con un sentimiento ambiguo:
era un olor nuevo y una nueva certeza
para contar al mundo.
“Mirar cómo se rompen las burbujas, dijo,
no es más extraño que mirarse a un espejo.”


Creía que hablaba para sus papeles
y se rió, mientras tocaba el agua.
La ropa se sumergía despacio, y
la frotaba despacio, a medida que
iba conociendo el juego.


Decidida,
tomó cada burbuja de jabón
y le puso un nombre; era
lo mejor que sabía hacer hasta ahora,
nombrar, y que las cosas
le estallaran en la mano.

Irene Gruss, poeta nació en 1950 en Buenos Aires