26 août 2010

Rêveries / Ensueños

Penser à ce qu’on aurait pu être, rêver de tous ces possibles, ces impossibles passés. Avec ou sans mélancolie.
Un poème du colombien Álvaro Mutis, le moins noir que j’aie lu de lui. Cet écrivain-poète, le plus connu en dehors de la Colombie après G. García Márquez, n’a pas eu une vie de rêve.

Pensar en quién hubiéramos podido ser, soñar en todos esos posibles, esos imposibles pasados. Con o sin melancolía.
Un poema del colombiano Álvaro Mutis, el menos negro de los que he leido.
Este escritor-poeta, el más conocido fuera de Colombia después de G. García Márquez, no ha tenido una vida de ensueño.


Chanson de l’est - Álvaro Mutis

À deux pas d’ici
un ange invisible attend ;
un vague brouillard, un spectre diffus
te dira quelques mots du passé.
Telle l’eau du ruisseau, le temps
creuse en toi son dur labeur
de jours et de semaines,
d’années sans nom ni souvenir.
À deux pas d’ici
continuera à t’attendre en vain
celui que tu ne fus pas, celui qui mourut
de tant être toi-même ce que tu es.
Pas le moindre soupçon,
ni la moindre ombre
ne t’indique ce qu’aurait pu être
cette rencontre. Et pourtant,
c’est là qu’était la clé
de ton bref bonheur sur terre.

(Trad. Colo)



Canción del este - Álvaro Mutis

A la vuelta de la esquina
un ángel invisible espera;
una vaga niebla, un espectro desvaído
te dirá algunas palabras del pasado.
Como agua de acequia, el tiempo
cava en ti su arduo trabajo
de días y semanas,
de años sin nombre ni recuerdo.
A la vuelta de la esquina
te seguirá esperando vanamente
ése que no fuiste, ése que murió
de tanto ser tú mismo lo que eres.
Ni la más leve sospecha,
ni la más leve sombra
te indica lo que pudiera haber sido
ese encuentro. Y, sin embargo,
allí estaba la clave
de tu breve dicha sobre la tierra.

Mon rêve à moi, mais ce sera pour une prochaine vie, c’est d’être chanteuse d’opéra; Gloria Londoño par exemple, cette soprano colombienne que j’admire tant.

Mi sueño, será en mi próxima vida, es ser cantante de ópera. Gloria Londoño por ejemplo, esa soprano colombiana que tanto admiro.





19 août 2010

Saveurs, parfums des heures/ Sabores, perfumes des las horas

Rares sont les aubes qui m’échappent.
Une journée me semble perdue, ou dure à rattraper si, assise sur une marche en pierre sèche, un café à la main, je rate ce moment.
Tout aussi important est l’instant, car ça va très vite, où le soleil fatigué se glisse derrière la montagne.
Ce sont mes heures.
Heures.Chacun a les siennes.


Pocas son las albas que se me escapan.
Un día me parece perdido, o difícil de recuperar si, sentada en un peldaño de piedra, con un café en la mano, me pierdo este momento.
Igual de importante es el instante, porque va muy deprisa, en el que el sol cansado se desliza tras la montaña.
Son mis horas.
Horas. A cada cual las suyas.


Heure P. Reverdy

Poème lu sur le site Terre de femmes, Angèle Paoli/Terres de femmes)
Foto:I.Pampín
Hora. P. Reverdy

14 août 2010

Frivolité de fin d'été /Frivolidad de fin de verano

Trois ans de suite, 2001, 2002, 2003, Elvira Lindo publia dans le journal El País une série de courts récits basés sur ses vacances estivales dans un village espagnol. Fiction et réalité se mélangent avec un humour décapant dans cette saga familiale où elle narre le quotidien (apparemment banal), ironise sur les vanités de notre société, l’observe en s’amusant énormément.
Pour tous ceux qui ont le moral raplapla, voilà la traduction d’une partie de « Que c’est romantique » publié en 2003 (Otro verano contigo, ed. Aguilar, Tinto de verano 3).

Para los que tienen la moral por los suelos, he aquí unos pasajes de una de las crónicas humorísticas escritas por Elvira Lindo y publicadas por el diario El País durante los veranos 2001, 2002 y 2003.
Esta está sacada de “Tinto de verano 3” “Otro verano contigo” y se llama Qué romántico.

Note : pour la compréhension de l’extrait : son mari est l’écrivain Antonio Muñoz Molina qu’elle appelle ici « mon saint ».

« Grande nouvelle : nous avons eu une tomate.
La figure de mon saint était un poème quand il est entré le légume miniature à la main. Trois jours durant il refusa de le mordre mais moi, voyant qu’il pourrissait, je l’ai coupé en deux (pour cela les femmes nous avons plus de sang froid) et nous l’avons mangé. Aïe, ce couple d’intellectuels
partageant une tomate de leur propre récolte. Je trouve cela fort tendre.

(…) quand mon saint s’assied sur le perron et contemple notre parcelle de cent mètres, comme Scarlett regardait Tara, je lui demande : « Chéri, sans vouloir t’offenser, crois-tu qu’arrivera le jour où tous les efforts que tu fais, et que je valorise, aboutiront à nous faire une petite salade ?, car si nous allons de tomate en tomate tous les 15 jours, je trouve que c’est un peu coïtus interruptus ». « Qui sait » me répond-il, « peut-être que nous ne le verrons pas, mais nos petits-enfants mangeront des pommes de ce pommier et chaque bouchée contiendra toutes nos ardeurs ». Il m’en tomba une larme qu’il interpréta comme un signe de mon extrême sensibilité, bien que la vérité soit que moi, penser que je suis morte et que des descendants mangent ce qui est à moi, ça me fait chier. Pourquoi le nier.
Mais ces discussions frugales ne peuvent dissimuler ce qui saute aux yeux : nous sommes amoureux. ( …). Que sonnent les violons ! Javier Sampedro dit, c’est à la fois illustratif et amusant, que nous tombons amoureux par l’odeur, parce que nous nous voyons comme de bons reproducteurs (nous, nous n’avons plus que des tomates), et à cause de notre doigt majeur. L’histoire du majeur est ce que je trouve le plus sensé. Surtout pour une femme ce doigt du milieu peut être définitif. Lázaro Carreter le disait déjà : « L’orgasme des hommes est analogique, celui des femmes, digital ». Ce doigt du milieu…je le trouve fondamental." (trad. Colo)

“Grandes noticias: hemos tenido un tomate.
La cara de mi santo era un poema cuando entró con la diminuta hortaliza en la mano. Estuvo tres días sin querer hincarle el diente pero yo, viendo que se nos pudría, lo partí por la mitad (la mujeres para eso tenemos más sangre fría) y nos lo comimos. Ay, esa pareja de intelectuales compartiendo un tomate de su propia cosecha. Lo encuentro entrañable.
(…) cuando mi santo se sienta en el pollete, contemplando nuestra parcela de cien metros, como escarlata miraba Tara, yo le pregunto:”Cariño, no te molestes por la pregunta pero, ¿crees que llegará un día en que todo ese esfuerzo que estás haciendo, y que yo valoro, dé para que nos hagamos siquiera una ensalada?, porque si vamos de tomate en tomate cada 15 días, lo encuentro un poco coitus interruptus”. “Quién sabe”. Me contesta, “tal vez nosotros no lo veamos, pero nuestros nietos comerán manzanas de este manzano y en cada bocado estarán contenidos todos nuestros anhelos”. Se me cayó una lágrima, que él interpretó como signo de mi extremada sensibilidad, aunque la verdad es que a mí, pensar en estar yo muerta y unos descendientes comiéndose lo mío, me jode. A qué negarlo.

Pero esas frugales discusiones no pueden disimular lo que a la vista está: estamos enamorados.(…) ¡Que suenen los violines! Dice Javier Sampedro, que ilustra a la par que entretiene, que nos enamoramos por el olor, porque nos vemos pinta de buenos reproductores (nosotros ya sólo tenemos tomates), y por nuestro dedo medio. Lo del dedo medio es lo que encuentro más sensato. Sobre todo para una mujer ese dedo medio puede ser definitivo. Ya lo decía Lázaro Carreter:”El orgasmo de los hombre es analógico, y el de las mujeres, digital”. Ese dedo medio…lo encuentro fundamental”.

10 août 2010

En relisant Colette... / Releyendo a Colette...

« Au lieu d'aborder des îles, je vogue donc vers ce large où ne parvient que le bruit solitaire du coeur, pareil à celui du ressac. Rien ne dépérit, c'est moi qui m'éloigne, rassurons-nous. Le large, mais non le désert. »
Le Fanal bleu S. Gabrielle Colette


Pour voir un plus grand large, clic!
“En lugar de abordar las islas, bogo hacia ese mar abierto donde sólo llega el ruido solitario del corazón, semejante al de la resaca. Nada se marchita; soy yo quien se aleja, tranquilicémonos. El mar abierto, no el desierto.”
El fanal azul S. Gabrielle Colette
Photo prise dimanche en face de Cala Gamba à 11h. / Foto tomada el domingo en frente de Cala Gamba

4 août 2010

Fleurs de nuit / Flores de noche


Lundi, vingt deux heures trente, le téléphone sonne. « Colo, descends avec ton appareil, elles sont toutes ouvertes ». C’est la voix de María Teresa, et le ton ne me laisse aucun choix. J’obtempère donc, à tâtons, une nuit sans lune, ouvre la barrière, descends quelques marches, salue son chien qui me saute dessus et la voilà qui surgit de derrière l’énorme figuier qui masque l’entrée. « Je les ai surveillés toute la journée mais les fleurs viennent seulement de s’ouvrir, alors j’ai pensé à toi ».
« Les » ce sont ses cactus géants appelés San Pedro (echinopsis pachanoi) qui,
cette année, sont couverts de fleurs.


Maria Teresa a 82 ans, un corps douloureux et une allégresse d’esprit qui, me confie-t-elle, l’a fait monter à l’arrière de la moto de son petit-fils il y a peu pour faire une balade mais « ne le dis à personne, on me gronderait ». Promis.
Nous voilà devant ses San Pedro, on les devine car elle n’a rien allumé, ils doivent mesurer entre 3 et 4 mètres de haut, et je vise, un peu au hasard, les fleurs que je ne vois pas. Plus tard elle apporte une lampe de poche ; fantastiques !
Lunes a las diez y media de la noche suena el teléfono. “Colo, baja con tu cámara, se han abierto”. Es la voz de María Teresa y su tono no me deja ninguna opción. Obtempero pues. Es una noche sin luna, a tientas abro la barrera, bajo algunos peldaños, saludo a su perro que me salta encima y, emergiendo de la enorme higuera que tapa la entrada, aparece ella. “Los he vigilado todo el día pero las flores no se han abierto hasta ahora, así que pensé en ti”.
“Los” son sus gigantescos cactus llamados San Pedro (echinopsis pachanoi) que, este año, se han cubierto de flores.
María Teresa tiene 82 años, un cuerpo doloroso y una alegría espiritual que le hizo subirse, hace poco, en la parte trasera de la moto de su nieto para dar una vuelta, “no se lo digas a nadie, me reñirían”. Prometido.
Estamos delante de los San Pedro, más bien se les adivina ya que todo está a oscuras, deben medir entre 3 y 4 metros, y apunto mi cámara, un poco al azar, hacia flores que no veo. Más tarde trae una linterna: ¡fantástico!

(Cliquez sur les photos pour les agrandir)
La journée, explique-t-elle, il y a tellement d’abeilles qu’on ne peut pas s’en approcher et je pense à cette phrase de Philippe Geluk « Le miel des cactus c’est délicieux, même que ce sont des abeilles-fakirs qui le récoltent ».
Durante el día, me explica, hay tantas abejas que uno no puede acercarse y pienso en esa frase de Philippe Geluk:” La miel del cactus es deliciosa, son las abejas-fakir que la cosechan”





Rentrée chez moi je découvre que ces géants, originaires des Andes, sont aussi de puissants hallucinogènes (il y a même sur Youtube la manière de procéder).
On ne le dira pas à Maria Teresa…

De vuelta a casa descubro que esos gigantes, originarios de los Andes, son también potentes alucinógenos (en Youtube se encuentra incluso la manera de proceder).
No se lo diremos a María Teresa…