Tout
semblait normal ce matin: ciel mi-nuageux, température douce, la
vigne vierge rougissante.
Todo
parecía normal esta mañana: cielo medio nublado, temperatura suave,
la parra virgen enrojeciendo.
Un
jour d'automne comme un autre.
Plaisir
de constater que mes avocats s'arrondissent (pourquoi n'en
cultive-t-on pas ici? Ils poussent parfaitement sur mon terrain où
il fait plus froid qu'en bien des endroits de l'île), les grenades
imitent les avocats mais en rosissant.
Un día
de otoño como cualquier otro. El
placer de constatar que mis aguacates redondean (¿por qué no se
cultivan aquí? Crecen perfectamente en mi terreno donde hace
bastante más frío que en muchos sitios de la isla), las granadas
imitan a los aguacates pero coloreándose de rosa.
Il
était tôt et les seules rencontres furent animales. Je flâne donc
parmi les bosquets, le nez en l'air j'observe un chat qui fait de
même.
Era
pronto y sólo me encontré con unos animales. Vago por el
sotobosque, levanto la vista para observar a un gato que hace lo
mismo.
Total,
nada que señalar hasta que a la vuelta, pasando por el cercado-prado
de cabras, la vi que me miraba.
Bref,
rien à signaler jusqu'à ce qu'au retour, passant devant
l'enclos-prairie aux chèvres, je l'ai vue qui me regardait.
(Clic pour agrandir les photos)
Un
regard...ce regard! Una
mirada...esa mirada.
Je
suis rentrée inquiète, ruminant cette phrase lue dans
L'insoutenable légèreté de l'être de Milan Kundera:
“La
vraie bonté ne peut se manifester en toute pureté et en toute
liberté qu'à l'égard de ceux qui ne représentent aucune force. Le
véritable test de l'humanité (le plus radical, qui se situe à un
niveau si profond qu'il échappe à notre regard), ce sont ses
relations avec ceux qui sont à sa merci : les animaux.”
Volví,
inquieta, rumiando esta frase leída en “La insoportable levedad
del ser” de Milan Kundera: “La
verdadera bondad sólo se puede manifestar con toda pureza y en toda
libertad hacia los que no representan ninguna fuerza. El verdadero
test de la humanidad (el más radical, que se sitúa a un nivel tan
profundo que escapa a nuestra mirada), son las relaciones con los que
están a su merced: los animales.” (Trad: COLO)
Ils
sont trois ce matin, ils étaient là hier et y seront demain. Ils
parlent de premières dents, de nuits blanches et de panades.
D'aucuns
pourraient y voir une marque de modernité, d'égalité des sexes,
mais ces trois hommes jeunes achetant du pain à 9h30 avec landeaux
et poussettes-bébés sont l'image de mon village, du pays, de pays à
l'arrêt. Pas de travail rémunéré disponible.
Eran
tres esta mañana, estaban allí ayer y lo estarán mañana. Hablan
de primeros dientes, de noches en vela y de papillas.
Algunos
podrían ver en esta escena una marca de modernidad, de igualdad de
sexos, pero esos tres hombres jóvenes comprando pan a las 9h30 con
cochecitos de bebés son la imagen de mi pueblo, de mi país, de
países parados. No hay trabajos remunerados disponibles.
Difficile
après un temps de ne pas laisser s'étioler la révolte, de ne pas
perdre les espoirs, mais il faut résister, absolument.
Difficile
dernièrement de parler d'amour et des jolies couleurs de l'aube,
mais il y a des poètes pour nous y aider.
Blas
de Otero est peu connu à l'étranger je crois, dommage, un
grand poète du XXº siècle espagnol, poète de l'après-guerre
civile, cette époque de faims et pauvretés.Au pluriel.
Es
difícil, después de un tiempo, no dejar que la rebelión se
debilite, no perder las esperanzas, pero es imprescindible resistir.
Es
difícil, últimamente, hablar de amor y de los bonitos colores del
alba, pero existen poetas para ayudarnos.
Elegí
a Blas de Otero, poeta de la post-guerra, época de hambrunas y
pobrezas. En plural.
Voici
la traduction, ardue, d'un de ses sonnets.
Impetus
Blas de Otero
Mais
tout ne doit être ruine et vide. Ni tout déblayage et dégel. Sur
cette épaule je porte le ciel, et sur cette autre, un large
fleuve
d'enthousiasme. Et, au milieu, mon corps, arbre de
lumière depuis le ciel. Et, mi-racine mortelle, mi-fronde de
désir, mon cœur debout, rayon sombre.
Seule l'angoisse me
vainc. Mais j'avance sans douter, sur des abîmes infinis, la
main tendue: si je ne l'atteins
de la main, je l'atteindrai
par des cris! et toujours je suis debout, et ainsi me lance à
la mer, depuis une fronde d'appétits.
Tout
à coup cela m'a semblé évident: nous sommes faits de traces.
Plus
j'y pensais, plus leur nombre augmentait.
Ce
que nous avons appris, vu, reçu, pas reçu, souffert, donné...
Mon
corps marqué de traces de rires et de soucis, d'opérations, de
maternités, de chutes.
Ces
traits qui nous font ressembler à papa Jean ou à la tante Suzette
“qui avait les mêmes yeux que toi”.
Tant
de gens rencontrés qui nous ont ouvert des horizons, de livres et
films qui nous ont bousculé les idées, d'amours variés, de
chansons, de paysages.
Et
encore, et encore...
Et
nous avons oublié tout le reste: aucune trace.
Francisco Bores
De
repente me pareció evidente: estamos hechos de huellas.
Más
pensaba en ello, más aparecían.
Lo
que aprendimos, vimos, recibimos, no recibimos, sufrimos. dimos...
Mi
cuerpo marcado por huellas de risas y preocupaciones, operaciones,
embarazos, caídas.
Esos
rasgos que nos asemejan a papa Juan o a la tía Susanita “que tenía
los mismos ojos que tú”.
Tantas
personas encontradas que nos han abierto horizontes, libros y
películas que nos han alterado las ideas, amores variados,
canciones, paisajes.
Y
más, y más...
Y
se nos ha olvidado todo el resto: ninguna huella.
Qu'en disent les
poètes?
¿Qué
dicen de ello los poetas?
Un
poète doit laisser des traces de son passage, non des preuves.
Seules
les traces font rêver.
René
Char
Un
poeta debe dejar huellas de su paso, no pruebas.
Interrogations hautement philophiques d'un dimanche matin...
Interrogaciones altamente filosóficas de un domingo por la mañana...
photo Colo
Qui fut le premier?
¿Quién fue primero?
"Voilà ce chêne solitaire Dont le rocher s'est couronné, Parlez à ce tronc séculaire, Demandez comment il est né."
Lamartine
Merci Enitram!
photo Colo
Je passe souvent devant cette maisonnette et surveille de près le toit et le cactus.
Que va-t-il arriver? A menudo paso delante de esta caseta. Vigilo de cerca el techo y el cactus. ¿Qué pasará?
Que
les fins de journées d’automne sont pénétrantes ! Ah !
pénétrantes jusqu’à la douleur ! car il est de certaines
sensations délicieuses dont le vague n’exclut pas l’intensité ;
et il n’est pas de pointe plus acérée que celle de l’Infini.
Grand
délice que celui de noyer son regard dans l’immensité du ciel et
de la mer ! Solitude, silence, incomparable chasteté de
l’azur ! une petite voile frissonnante à l’horizon, et qui
par sa petitesse et son isolement imite mon irrémédiable existence,
mélodie monotone de la houle, toutes ces choses pensent par moi, ou
je pense par elles (car dans la grandeur de la rêverie, le moi se
perd vite !) ; elles pensent, dis-je, mais
musicalement et pittoresquement, sans arguties, sans syllogismes,
sans déductions.
Toutefois,
ces pensées, qu’elles sortent de moi ou s’élancent des choses,
deviennent bientôt trop intenses. L’énergie dans la volupté crée
un malaise et une souffrance positive. Mes nerfs trop tendus ne
donnent plus que des vibrations criardes et douloureuses.
Et
maintenant la profondeur du ciel me consterne ; sa limpidité
m’exaspère. L’insensibilité de la mer, l’immuabilité du
spectacle me révoltent… Ah ! faut-il éternellement souffrir,
ou fuir éternellement le beau ? Nature, enchanteresse sans
pitié, rivale toujours victorieuse, laisse-moi ! Cesse de
tenter mes désirs et mon orgueil ! L’étude du beau est un
duel où l’artiste crie de frayeur avant d’être vaincu.
Foto Colo
Confiteor
del artista
Charles
Baudelaire
¡Qué
penetrante es el final de los días de otoño! ¡Ah, penetrante hasta
el dolor! Pues hay ciertas sensaciones deliciosas, cuya vaguedad no
excluye la intensidad; y no hay punta más acerada que la del
Infinito.
¡Gran
delicia la de ahogar la mirada en la inmensidad del cielo y del mar!
La soledad, el silencio, la incomparable castidad del azul, la
pequeña vela que se estremece en el horizonte, y que por su pequeñez
y su aislamiento imita mi irremediable existencia, la melodía
monótona del oleaje; todas esas cosas piensan por mí, o yo pienso
por ellas (¡pues en la grandeza de la meditación, el yo se
pierde rápido!); esas cosas piensan, digo, pero musical y
pintorescamente, sin argucias, sin silogismos, sin deducciones.
No
obstante, esas ideas, ya salgan de mí o broten de las cosas, se
toman bien pronto demasiado intensas. La energía dentro de la
voluptuosidad crea un malestar y un sufrimiento positivo. Mis nervios
demasiado tensos sólo producen ya vibraciones dolorosas y chillonas.
Y
ahora, la profundidad del cielo me consterna; me exaspera su nitidez.
Me sublevan la insensibilidad del mar, la inmutabilidad del
espectáculo ...
¿Habrá
que sufrir eternamente, o eternamente huir de lo bello? ¡Déjame,
Naturaleza, hechicera sin piedad, rival siempre victoriosa! ¡Cesa de
tentarme, en mis deseos y en mi orgullo! El estudio de la belleza es
un duelo en el que el artista grita de espanto antes de ser vencido.
Traducción
de Nydia Lamarque 1º edición, 1961, México, Editorial Aguilar.
Découverte
d'un peintre contemporain, originaire de Valencia, José Saborit.
L'art de peindre la mer. Pour en voir plus:
À
la recherche d'un dernier poème canarien, je lis celui-ci.
Chants
de beaucoup de ports
Hier
j'ai quitté ma patrie, et rien ne fit trembler mes paupières.
Et
l'âme resta tranquille, apaisée,
attendant,
sereine, un horizon moins peuplé d'ombres...
Je
considère mon puissant effort
comme
celui de l'aigle royal qui fuirait
l'endroit
où le chasseur le poursuivait
et
va terminer son vol au loin sur un abrupt rocher
inconnu.
Et
celui-là sera son nid, et c'est là qu'elle aura ses enfants,
et
sur ce rocher hospitalier
elle
créera ses amours et sa patrie...!
La
patrie est une voix absurde des temps médiévaux.
C'est
l'état d'âme des êtres qui dicte la patrie.
La
patrie est celle qui tend la main au marcheur;
la
patrie est ce sol où l'on trouve rédemption et courage;
la
patrie est une terre, proche ou lointaine,
où
l'on sèche des larmes brûlantes
et
où elles se transforment en baisers ardents...!
“La
patrie”.
(Trad: Colo)
Mercedes
Pinto (Tenerife 1883-1976 Mexico)
Buscando un último poema Canario, leo este:
“Cantos
de muchos puertos”
“Salí ayer de mi patria, y ni un
temblor estremeció mi párpados. Y el alma permaneció
tranquila sosegada, esperando, serena, un horizonte con
menos sombras...
Yo
considero mi potente esfuerzo como el del águila caudal, que
huyese de donde el cazador le persiguiera y va a parar su
vuelo, en una roca abrupta en lejanía que nunca conociera.
¡Y
aquél será su nido, y allí tendrá sus hijos, y sobre aquella
roca hospitalaria creará sus amores y su patria...! La
patria es voz absurda de tiempos medievales. El estado del alma
de los seres dice cuál es la patria. ¡La patria es la que
tiende la mano al caminante; la patria es aquel suelo donde se
encuentra redención y aliento; la patria es una tierra, cerca o
lejana, donde se enjugan lágrimas candentes y se convierten
en ardientes besos...!” «La patria»
Mercedes
Pinto (Tenerife 1883-1976 Méjico)
Cristino de Vera (Tenerife 1931- )
Si
ce poème n'est pas trop intéressant du point de vue littéraire, le
sujet, lui, l'est.
En
tout cas le démon de la curiosité me presse : que lui est-il
arrivé? qui l'a exilée? qui était le chasseur...?
Une
enquête s'impose.
Née
à Tenerife dans une famille aisée, elle publie dès ses 14 ans des poèmes dans
des journaux et revues locaux et est appelée “la poétesse
canarienne”.
Une
étape noire de sa vie commence en 1909: elle se marie et a trois
enfants avec un homme atteint de paranoïa et qui a des comportements
violents. Ceci amènera cela.
Elle
réussit à le faire interner à Madrid où elle va habiter avec ses
enfants. Après un temps il réussit à s'en échapper mais elle
refuse de suivre à Tenerife cet “irresponsable”.
Mercedes
s'introduit dans les cercles littéraires et intellectuels. C'est une
républicaine à l'esprit progressiste qui a une conscience
féministe: un jour elle fait une conférence intitulée “ Le
divorce comme mesure hygiénique” un texte très osé dans le
contexte d'alors.
Pensez
que l'Espagne, très catholique, vit sous la dictature de Primo de
Rivera. Inutile de vous dire que ce dernier n'a pas apprécié ses
idées et il décide de l'exiler.
Prévenue
par ses amis elle prend les devants et part d'elle même en Uruguay
en 1924 . Elle y est bien accueillie et une nouvelle vie, très
active, commence pour elle et sa famille.
Voilà
donc l'explication du poème.
Mais
je découvre autre chose.
En
1926 elle publie EL, histoire de Francisco, un psychotique paranoïaque
que la jalousie obsessive pousse à harceler une femme.
Impossible
de ne pas y deviner une partie de son vécu. Ce texte a fasciné
Luís Buñuel qui en a fait un film du même nom. Il n'a pas eu de
succès à l'époque mais est un de ses chefs-d’œuvre, le film que
lui-même préférait aussi paraît-il.
J'arrête
ici mais prenez le temps de regarder le film en entier...terrible.
Parfait.
Este
poema parece poco interesante desde un punto de vista literario, otra
cosa es el asunto.
En
cualquier caso el demonio de la curiosidad me empuja: ¿qué le ha
pasado? ¿quién le ha exiliado? ¿quién era el cazador...?
Una
pesquisa se hace necesaria.
Nacida en Tenerife
en una familia acomodada, a partir de los 14 años publica poemas en
periódicos y revistas locales y la llaman la “poetisa canaria”
Una
etapa negra de su vida comienza en 1909: se casa y tiene tres hijos
con un hombre que padece de paranoia y que tiene comportamientos
violentos. Eso explica aquello.
Acaba
por hacerlo internar en Madrid donde va a vivir con sus hijos. Al
cabo de un tiempo su marido se escapa pero ella se niega a seguir a
Tenerife a ese “irresponsable”.
Mercedes
se introduce en los círculos literarios e intelectuales. Es una
republicana con un espíritu progresista que tiene una conciencia
feminista: un día da una conferencia titulada “El divorcio como
medida higiénica” un texto muy atrevido en el contexto de la
época. Hay que pensar que España, muy católica, vive bajo la
dictadura de Primo de Rivera. No hace falta decir que este ultimo no
apreció sus ideas y decide exilarla. Avisada por sus amigos toma la
delantera y se marcha a Uruguay en 1924. Fue bien acogida y una nueva
vida, muy activa, empieza para ella y su familia.
Esa
es la explicación del poema.
Pero
descubro otra cosa.
En
1926 publica EL, la historia de Francisco, un psicótico paranoico
cuyos celos obsesivos le llevan a acosar a una mujer.
Imposible
no adivinar una parte de sus vivencias. Ese texto fascinó a Luis
Buñuel a partir del cual realizo una película con ese mismo nombre.
No tuvo éxito en su tiempo pero es una de sus obras maestras y según
parece, la película que él mismo prefería.
Aquí
me paro pero tomad el tiempo de mirar la película entera...terrible.
Perfecta.
Notes: Le texte "EL" suivi de "Le divorce comme mesure hygiénique" est traduit en français. Foto: http://anuncios.ebay.es/otros-libros-revistas/vida-y-obra-de-cristino-de-vera-11840572.htm?vipv=fotos&vipn=5