Cléopâtre
, Eduardo Galeano
Ses
courtisanes la baignent dans du lait d’ânesse et de miel. Après
l’avoir ointe de sucs de jasmins, lys et chèvrefeuille, elles
déposent son corps sur des coussins de soie rembourrés de
plumes.
Sur
ses paupières fermées, de fines tranches d’aloès. Sur la figure
et le cou, des emplâtres faits de bile de bœuf, d’œufs
d’autruche et de cire d’abeilles.
Quand
elle s’éveille de sa sieste, la lune brille déjà au ciel.
Les
courtisanes imprègnent de roses ses mains et parfument ses pieds
d’élixirs d’amandes et de fleur d’oranger. Ses aisselles
exhalent des fragrances de citron et de cannelle, et les dattes du
désert donnent de l’arôme à sa chevelure, brillante d’huile de
noix.
Et
arrive le tour du maquillage. De la poudre de scarabée sur les joues
et les lèvres. De la poudre d’antimoine dessine les sourcils. Le
lapis-lazuli et la malachite lui font un masque d’ombres bleues et
d’ombres vertes autour des yeux.
Dans
son palais d’Alexandrie, Cléopâtre entre dans sa dernière nuit.
La
dernière pharaonne,
celle
qui ne fut pas aussi belle qu’on le dit,
celle
qui fut meilleure reine qu’on le dit,
celle
qui parlait plusieurs langues et s’y connaissait en économie et
autres mystères masculins,
celle
qui éblouit Rome,
celle
qui défia Rome,
celle
qui partagea le lit et le pouvoir avec Jules César et Marc Antoine,
a mis maintenant ses habits les plus éblouissants et s’assied
lentement sur son trône, tandis que les troupes romaines avancent
contre elle.
Jules
César est mort, Marc Antoine est mort. Les défenses égyptiennes
tombent.
Cléopâtre
commande d’ouvrir le panier en paille.
La
sonnette sonne.
Le
serpent glisse.
Et
la reine du Nil ouvre sa tunique et lui offre ses seins nus,
brillants de poudre d’or.
(Trad:Colo)
NB: cette fois, et pour l'instant, j’arrête ces portraits pour laisser la place à la poésie.
NB: cette fois, et pour l'instant, j’arrête ces portraits pour laisser la place à la poésie.
Si vous voulez vous remettre en mémoire la vie de Cléopâtre, ses amours, lisez cette narration fort sympathique et vivante:
Cleopatra
Eduardo
Galeano
Sus
cortesanas la bañan en leche de burra y miel. Después de ungirla en
zumos de jazmines, lirios y madreselvas, depositan su cuerpo desnudo
en almohadones de seda rellenos de plumas.
Sobre
sus párpados cerrados, hay finas rodajas de áloe. En la cara y el
cuello, emplastes hechos de bilis de buey, huevos de avestruz y cera
de abejas.
Cuando
despierta de la siesta, ya hay luna en el cielo.
Las
cortesanas impregnan de rosas sus manos y perfuman sus pies con
elixires de almendras y flores de azahar. Sus axilas exhalan
fragancias de limón y de canela, y los dátiles del desierto dan
aroma a su cabellera, brillante de aceite de nuez.
Y
llega el turno del maquillaje. Polvo de escarabajos colorea sus
mejillas y sus labios. Polvo de antimonio dibuja sus cejas. El
lapislázuli y la malaquita pintan un antifaz de sombras azules y
sombras verdes en torno de sus ojos.
En
su palacio de Alejandría, Cleopatra entra en su última noche.
La
última faraona,
la
que no fue tan bella como dicen,
la
que fue mejor reina de lo que dicen,
la
que hablaba varias lenguas y entendía de economía y otros misterios
masculinos,
la
que deslumbró a Roma,
la
que desafió a Roma,
la
que compartió cama y poder con Julio César y Marco Antonio, viste
ahora sus más deslumbrantes ropajes y lentamente se sienta en su
trono, mientras las tropas romanas avanzan contra ella.
Julio
César ha muerto, Marco Antonio ha muerto. Las defensas egipcias
caen.
Cleopatra
manda abrir la cesta de paja.
Suena
el cascabel.
Se
desliza la serpiente.
Y
la reina del Nilo abre su túnica y le ofrece sus pechos desnudos,
brillantes de polvo de oro.
(En "Mujeres"ed sigloXX, p.90)