29 sept. 2025

Que la chance te cherche / Que la suerte te busque

 

FEMMES  Luís García Montero

 

Matin de banlieue

et l’autobus s’approche de l’arrêt.


Il fait froid dans la rue, légèrement,

presque l’éveil du printemps,

de ville qui ne s’est pas

encore réchauffée.

De mon siège je vois les femmes,

les yeux ensommeillés et les habits sans éclat,

cherchant leur horaire de travail.


Elles montent et mettent à jour

sur les vitres de l’abribus

une annonce de corps choisis

et de lingerie.

Les jeunes femmes nous regardent dans les yeux

depuis le règne parfait de leur photographie,

sans horaire, sans hâte,

obscènes comme un rêve bronzé.


(...)

Je te souhaite une bonne journée,

que la chance te cherche

dans ta maison petite et ordonnée,

que la vie te traite dignement. 

 

 


 

MUJERES  Luís García Montero

 

Mañana de suburbio
y el autobús se acerca a la parada.


Hace frío en la calle, suavemente,
casi de despertar en primavera,
de ciudad que no ha entrado
todavía en calor.
Desde mi asiento veo a las mujeres,
con los ojos de sueño y la ropa sin brillo,
en busca de su horario de trabajo.


Suben y van dejando al descubierto,
en los cristales de la marquesina,
un anuncio de cuerpos escogidos
y de ropa interior.
Las muchachas nos miran a los ojos
desde el reino perfecto de su fotografía,
sin horarios, sin prisa,
obscenas como un sueño bronceado.
(...)

Que tengas un buen día,
que la suerte te busque
en tu casa pequeña y ordenada,
que la vida te trate dignamente. 

 







 

32 commentaires:

  1. Pour répondre à ton commentaire, ici, c'est la fin des aubergines, et le début des cèpes , châtaignes....Le temps reste agréable, ça fait du bien aussi d'avoir moins chaud. Gros bisous

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    1. Merci, nous vivons à différentes latitudes Val, mais le temps a rafraîchi, un bonheur, oui...

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  2. Coucou. Ce poème me fait sentir à la fois la fragilité et la beauté du quotidien, le poids des images idéalisées dans nos vies, et une forme de souci bienveillant pour les autres, ici adressé à la personne que le poète imagine. Il oscille entre réalisme, contemplation et tendresse. Bises alpines.

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    1. Hola Dédé, il y a tout ça, oui. Moi j'ai pensé que la dernière strophe s'adresse à toutes les femmes vues à l'arrêt de bus. Ou à une en particulier ? Tout est possible, mais tant de tendresse...Un beso mediterraneo.

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  3. Ces femmes prenant le bus tôt le matin pour rejoindre leur lieu de travail, voudraient bien ressembler aux modèles de leurs magazines féminins préférés, avec leur "look" bronzé, leurs vêtements, et leurs dessous très "tendance", leur apparente décontraction...Une manière d'être et de se comporter qui les change de leur petite vie tranquille et (trop) bien réglée.
    Belle semaine, Colo

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    1. Bonjour Antoine. Ah, tu penses que les travailleuses rêvent d'être mannequins bronzées. Pourquoi pas ? Deux mondes mis face à face, le réalisme des travailleuses, le soit disant paradis des autres.
      Merci, et très bonne semaine à toi aussi.

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  4. Le poète termine sur de beaux souhaits, elle en a de la chance la femme qu'il évoque :-) J'ai un brin d'agacement devant l'affiche d'une femme presque dénudée, au corps parfait, exposé à tous les regards. Je ne suis pas sûre que tant de femmes que cela les envient. Ça chatouille mon côté féministe. Bonne journée Colo, bises.

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    1. Ce poème fait partie d'un recueil qu'il a publié après la mort de sa femme, que tu connais probablement: Almudena Grandes.
      Un brin d'agacement ? Un énorme agacement tu veux dire !!! Comme l'écrit le poète, il y a de l’obscénité, puis ce contraste avec lui travailleuses qui se lèvent tôt...
      Bonne journée à toi

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  5. une bel hommage à la f'âme-courage 💚🕊️

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  6. J'aime beaucoup ce poème, ce mélange de mélancolie et de générosité. Il m'émeut beaucoup et la dernière strophe est d'une délicatesse inouie

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    1. Tout le petit recueil est aussi beau et émouvant.

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  7. Il y a tout dans tes photos, Colo : le rêve et la vie quotidienne des femmes qui se hâtent, l'indifférence aussi.
    Et l'humour aussi grand que ces seins de la taille d'une tête grise, qui se détourne...

    Merci pour la traduction du poème : "Que la vie te traite dignement" : la chute essentielle de ces scènes de rue !
    Bonne soirée, Colo !
    Bises pluvieuses :-)

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    1. Merci Fifi, on rêve d'une dignité pour tous !
      Bonne journée, ici après la pluie, le soleil ce matin. Un beso !

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  8. Ce que l'on retient en plus du poème c'est la première photo... Ce fossé qui existe entre la travailleuse et la "nana" sur l'affiche... corps parfait avec des sous-vêtements au top...
    On retiendra aussi
    "Que la vie te traite dignement. "

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    1. Bonjour Marie, le poème est venu en premier lieu puis j'ai eu la chance de trouver des photos qui correspondaient aux mots.
      Ces "travailleuses de la mode" sont-elles plus contentes que les autres ? Je n'en sais rien en fait.
      Je t'embrasse affectueusement, et t'envoie toute la lumière du soleil qui brille aujourd'hui.

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  9. "Que la vie te traite dignement", n'est-ce pas là le plus important ?
    J'avoue ne pas regarder les publicités, elles me fatiguent et polluent les espaces à mon goût...
    Bises automnales dame Colo, à bientôt. brigitte

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    1. Hola Brigitte, ici les publicités sont mises en contraste avec les travailleuses.
      La dignité est absolument le plus important, on est bien d'accord !
      Un beso, bonne fin de semaine.

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  10. Que "la vie les traite dignement" ces femmes qui au petit matin, partent travailler tout au long de l'année, certaines pour un salaire de misère. Elles sont loin de pouvoir se payer ces dessous frivoles bien que superbes (ou ces parfums dont on voit la pub aussi à la TV ou dans les rues) mais courageusement elles font face à leur journée et à leur quotidien. Je les trouve admirables et je trouve que le poète les met joliment à l'honneur tout en montrant deux mondes qui s'opposent dans nos sociétés inégalitaires...Voilà comment je le ressens ce poème, comme un poème qui met le doigt sur les injustices, sur la manipulation de nos médias (et des pubs), sur le pratique face au superflu, sur la réalité face à cette image de la femme idéalisée, imposée par la société (et peut-être rêvée ?) . Merci pour ce partage, une belle découverte en poésie

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    1. Nous avons fait la même analyse Manou, c'est comme ça que j'ai lu/traduit le poème: un hommage aux travailleuses de l'autobus.
      Merci, bonne soirée.

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  11. Tes photos montrent pleinement ce que le poète veut dire. Ce n'est pas le corps de ces femmes qui est obscène, c'est le fait de les exposer comme des objets sexuels et ce que ces images véhiculent par rapport aux autres femmes. Pas du tout d'accord avec Antoine ! Je pense comme toi ou Aifelle !
    J'aime Almuneda Grandes. Je n'ai pas encore tout lu d'elle mais je compte bien le faire.

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    1. Nous sommes d'accord sur ce mot "obscène" aussi.
      Ma fille est fan à 100% d'Almudena Grandes, alors j'ai tout lu, et c'est magnifique.

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  12. Il y a 50 ans, on apposait de petits autocollants féministes - "C'est un crime contre les femmes" - sur les affiches qui usaient et abusaient de la femme-objet. Y réagit-on encore ? Le poème oppose obscénité et dignité, à juste titre. Bonne soirée, Colo.

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    1. Je m'en souviens, oui. Depuis et peu à peu les marques ont changé de tactique, on n'en voit pratiquement plus...
      Ce poème est aussi plein de tendresse, bienveillance.
      Bonne journée Tania.

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  13. J'aime beaucoup la dernière strophe !
    Et à propos des photos de femmes-objets, je trouve qu'il y en a de plus en plus avec la montée de ce qu'on appelle le masculinisme...

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    1. Ah oui ? je ferai plus attention quand j'irai en ville alors....quelle horreur.

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  14. "Femmes, je vous aime" aurait écrit Julien Clerc....... Quand verrons nous des hommes dans ce même abribus "les yeux ensommeillés et les habits sans éclat" ? Ode à la femme qui travaille dur.

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    1. Ici les ouvriers de la construction, par exemple, on vient les chercher dans des minibus. Je crois que la classe ouvrière, sexes confondus, ont les yeux ensommeillés. Ici il a pris les femmes, contraste avec les pubs.
      Merci Chinou, bonne fin de semaine.

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  15. Les quatre dernières lignes sont si belles, antithèse parfaite de l'indécence publicitaire.

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    1. Généreuse et émouvante cette dernière strophe, oui, merci K.

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  16. Deux mondes, de flagrantes disparités entre les femmes...
    Bien vu et un beau poème compatissant.

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    1. Merci Enitram, j'espère que tu vas bien. Bon dimanche.

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