27 juil. 2025

Un océan de douleurs / Un océano de dolores

 

Pas besoin de vous expliquer le pourquoi du choix de ce poème, hélas.

No necesito explicaros el por qué elegí este poema, por desgracia.

 

                                               

Détail de l'œil de Saint Jean, La descente de croix Detalle del ojo de San Juan. El Descendimiento. Van der Weyden.


 

Larme (extraits)

Jaime Gil de Biedma


Ils ne voyaient pas la larme. 

 

Immobile

dans le centre le la vision, brillante,

trop lourde pour rouler sur une joue d’homme,

immense,

ils disaient qu’un nuage, ils dissimulaient, ne voulaient

pas la voir

sur la terre obscurcie,

briller sur la terre obscurcie.


Et aujourd’hui la douleur

des autres, de beaucoup,

douleur de beaucoup d’autres, douleur de tant d’hommes,

océan d’hommes que les siècles traînent

au travers des siècles, sombrant dans l’histoire. (...)

 

Regardez par contre les hommes qui sourient,

les hommes qui conseillent le sourire.

Regardez-les

pressés, qui accourent.

Face à la sourde réalité

ils pérorent, recommandent, donnent confiance.

Attentionnés, ils offrent leurs services. Et ils sourient

sourient.

Ce sont les vils

propagandistes diplômés

du sourire sans douleur, les guérisseurs

sans honneur.


(…)


Ainsi va le monde

et ainsi les hommes. Regardez

notre histoire, cette mer,

cet immense dépôt de souffrances anonymes,

regardez comment se rassemble

tout en lui: des injustices

silencieusement dévorées, humiliations, poings

serrés en secret

et des pleurs. D’émouvants pleurs inaudibles

de ceux qui n’attendent plus rien de personne…


Trad: Colo

 

 

 
CAUTIVERIO. 100 X 81 CM. Pintura sobre madera. Gustavo Benito

https://gustavoabenito.com/pintura-raspada/ 

 

Lágrima (fragmentos)

Jaime Gil de Biedma

 

No veían la lágrima.

Inmóvil
en el centro de la visión, brillando,
demasiado pesada para rodar por mejilla de hombre,
inmensa,
decían que una nube, pretendían, querían
no verla
sobre la tierra oscurecida,
brillar sobre la tierra oscurecida.

He ahora el dolor
de los otros, de muchos,
dolor de muchos otros, dolor de tantos hombres,
océanos de hombres que los siglos arrastran
por los siglos, sumiéndose en la historia.(...)

Ved en cambio a los hombres que sonríen,
los hombres que aconsejan la sonrisa.
Vedlos
presurosos, que acuden.
Frente a la sorda realidad
peroran, recomiendan, imponen confianza.
Solícitos, ofrecen sus servicios. Y sonríen,
sonríen.
Son los viles
propagandistas diplomados
de la sonrisa sin dolor, los curanderos
sin honra.

(...)

Así es el mundo
y así los hombres. Ved
nuestra historia, ese mar,
ese inmenso depósito de sufrimiento anónimo,
ved cómo se recoge
todo en él: injusticias
calladamente devoradas, humillaciones, puños
a escondidas crispados
y llantos, conmovedores llantos inaudibles
de los que nada esperan ya de nadie…



19 juil. 2025

Plein soleil / Pleno sol

 

Alchimie

Les ombres ne reviendront pas.
Conserve ma promesse comme une conque intermittente.
Je vais mettre midi à bouillir dans un chaudron
pour que toute la maison sente le soleil. 


(trad: Colo)

 Leandro Calle 1969-     , Zarate, province de Buenos Aires

 

 

   

Mark Rothko

 

Alquimia

No volverán las sombras.
Conserva mi promesa como una intermitente caracola.
Voy a poner a hervir en un caldero el mediodía
para que huela a sol toda la casa.

Leandro Calle 1969 -    , Zarate, provincia de Buenos Aires

 

 

 

14 juil. 2025

Entre eux / Entre ellos

 

 

Le mur


il ne sait rien de la mer



La mer


elle ne sait rien du mur



Entre eux


le va-et-vient du vent
 

 

extrait de Komboloï, Werner Lambersy 

 



Photo Colo, Nord de Mallorca



La pared
no sabe nada del mar

El mar
no sabe nada de la pared

Entre ellos
el vaivén del viento

(Trad, Colo) 

 

Bonne semaine!


¡Qué tengáis una buena semana!

 

9 juil. 2025

Un peu de tout, la vie en été / Un poco de todo, la vida en verano

 

Balade quotidienne avant que le soleil ne rende le plaisir de vivre par trop chaleureux.

Paseo cotidiano antes que el sol convierta el placer de vivir demasiado caluroso.





Trois femmes et un chien, groupe d'âges disparates. Nous rencontrons pas mal de gens qui profitent de la relative fraîcheur du matin. Marche lente dans la campagne, rien ou presque ne nous échappe. V, la plus âgée, s'arrête souvent pour parler des choses de la terre, de la vie dans le village de sa jeunesse. Son père était berger de moutons, elle raconte si bien la vie d'alors.


Tres mujeres y un perro, grupo de edades variadas. Nos encontramos con bastante gente que aprovecha el relativo frescor de la mañana. Paseo lento por el campo, nada o casi nada se nos escapa. V, la mayor, se para a menudo para hablar de cosas de la tierra, de la vida en el pueblo de su juventud. Su padre era pastor de ovejas, cuenta tan bien la vida entonces.


De nombreux papillons cette année, des hirondelles à foison, et l'autre jour ces cochons qui ont à peine daigné ouvrir un œil à notre passage.

Hay numerosos conejos este año, golondrinas en abundancia y, el otro día, esos cerdos que apenas se dignaron a abrir un ojo a nuestro paso.



Sommeil de porcs / Sueño de cerdos Mallorca Foto Colo




Cette semaine, à l'ombre, j'ai lu ce poème qui résume si bien nos petites peurs et nos grands courages.

Esta semana, a la sombra, leí este poema que resume tan bien nuestros pequeños miedos y nuestras grandes valentías.





Valiente / Courageux



GRACIA IGLESIAS LODARES (Madrid 1977)




 Il avait peur des pas

des portes entrouvertes

des rideaux

des pieds des sphinx

de la langue des chats



Il était effrayé par les rires des vieux

et par les photos d'enfants en cravate

par les ours en peluche

par les mouettes au cinéma

des années soixante



Il craignait surtout de

voir pleurer son père

de parcourir un couloir

de se couper avec du papier

et de mourir chaque nuit



Mais il était si courageux

qu'il regardait dans les yeux

et qu'il épanchait son âme

et disait je t'aime

 
et c'était vrai.

(Trad:Colo)


 

Le daban miedo las pisadas

las puertas entreabiertas

las cortinas

los pies de las esfinges

la lengua de los gatos.


Le asustaban la risa de los viejos

y las fotos de niños con corbata

los osos de peluche

las gaviotas de cine

de los años sesenta.


Temía sobre todo

ver llorar a su padre

recorrer un pasillo

cortarse con papel

y morir cada noche.


Pero era tan valiente

que miraba a los ojos

y derramaba el alma

y decía te amo

y era cierto.


 Billet repris en partie de celui publié il y a 10 ans. Il est des choses qui ne changent pas....

1 juil. 2025

Mots qui nous secouent

 

Aujourd’hui un poème hors de mes habitudes espagnoles. Il vient du Cameroun, une jeune femme brillante, cliquez et vous verrez, Minsili Zanga, et devrait rassurer tous ceux qui pensent que la poésie c’est pas pour eux, qu’ils ne la comprennent pas.

Léger et entraînant. 

 

https://www.minsilizanga.com/author/minsili/page/17/

 

La discrète et inéluctable marche vers la poésie

Minsili Zanga



Inventer des histoires

Voir des nouvelles surgir

Observer la naissance d’un récit

Coucher des mots sur l’actualité

Disséquer un fait social

Oui, tout cela je l’ai fait

.

Mais m’adonner à la poésie ?

Pour moi elle restait de l’inaccessible

L’incompréhensible même

Engoncée aux versets

Réduite aux strophes et vers

Quatrains de mes années scolaires

.

Dissyllabes quadrisyllabes…

Oh là là !

Pentamètres heptamètres…

Rimes croisées suivies plates…

Aïe !

Sonnets, ode et…

.

Á Ǹti wama !

Oh mon dieu !

Akíé abím ndzug a dí !

Mais que c’est compliqué !

.

C’était ça la poésie pour moi

C’est-à-dire figée ennuyeuse

Et cette rime ah celle-là !

Ces contraintes métriques

Pourquoi donc ?

Faire de la poésie ?

Hum non, sûrement pas !

.

Et pourtant !

Tout naturellement

Comme si la belle Dame

Discrète mais sûre de son fait

Dans une tranquille assurance

Attendait son heure

Celle de l’écriture poétique

Elle est venue à moi

Et de quelle façon !

.

D’abord elle m’a dit

Ou plutôt soufflé en silence ?

.

Vogóló wamәn !

Écoute-toi voir !

.

Écoute, et tu verras !

Tu verras que

La poésie est diverse

Tiens, ton peuple !

Ceux de la Terre Rouge

Ne vois-tu pas leur poésie ?

Par la parole

Les chants

La musique

Les mots

Le Mvet !

Elle est dans tout

.

Vogóló !

Écoute !

.

N’entends-tu pas la poésie du Mvet Ekang ?

L’art de l’antique Harpe-Cythare

Portant le cœur de la terre Rouge ?

As-tu oublié la poésie des chants Beti ?

.

Ndǝ hm mǝ ngá vogolo…

Une part de moi a écouté…

Et alors…

.

Mintsogán

Pensées

.

Vinrent d’abord des Mintsogán

Pensées et réflexions vous happant d’un coup

Instantanées ne demandant qu’à sortir

.

Des pensées-perles

Des mots-écrins

Qui s’emmêlent

S’exposent

Prennent forme

Entre larmes et rires

Entre étonnement et…

Tant d’émotions !

.

Et un jour la rencontre !

L’inconscient est devenu conscient

L’imagination impose son camp

Elle vous susurre une vérité longtemps-là :

Certaines choses ne peuvent être dites qu’en poésie

.

Et l’imagination de murmurer

Ou plutôt chanter ?

.

Mǝtáman ?

La poésie ?

.

Elle n’est pas que vers et rime

Elle est aussi prose en forme

Prose et musique réunis

Mots qui touchent l’Esprit

Mots qui nous secouent

.

Fais-je de la prose en poème

Ou du poème en prose ?

À vous de juger !

©Minsilizanga.com