20 avr. 2022

Poésie, prose et nous / Poesía, prosa y nosotros

 

Si Flaubert, dans son Dictionnaire des idées reçues, écrivait, ironiquement '' La poésie est inutile, totalement passée de mode'', une moquerie donc, nombreux sont ceux qui le pensent vraiment, idée contre laquelle se rebelle Mario Benedetti (et moi:-)).

Pour lui la poésie suppose une transgression car elle questionne une suite de supposés sociaux que l’homme doit mettre en doute et qui, trop souvent, forment partie de notre oubli quotidien.

Je vous traduis un passage, que je trouve fort intéressant, de “El ejercicio del criterio”.

Car le problème est le suivant: la poésie mord. Parce qu’elle est libre, questionneuse, transgressive, curieuse, subjective, fantaisiste, hermétique parfois et communicative parfois aussi. C’est pour cette raison qu’elle mord. Et pour cette raison une bonne partie du public (je me réfère à celle qui lit, bien sûr) préfère la prose qui souvent contient des réponses, obéit à des plans et structures, est généralement objective, sait organiser ses fantasmes et n’a pas l’habitude de mordre, spécialement quand on lui met (ou qu’elle se met) un bâillon.

Même en temps de censure, et tenant compte que les censeurs sont rarement des spécialistes en métaphores, la poésie passe généralement les douanes avec beaucoup plus de d’allant que la prose.”

 

                           https://www.superprof.fr/ressources/langues/francais/college-fr2/3eme-fr2/poetes-versets-antiques.html



Porque el problema es ése: que la poesía muerde. Por ser libre, preguntona, transgresora, cuestionante, subjetiva, fantasiosa, hermética a veces y comunicativa en otras. Por eso muerde. Y por eso buena parte del público (me refiero al que lee, claro) prefiere la prosa que a menudo contiene respuestas, obedece a planes y estructuras, suele ser objetiva, sabe organizar sus fantasmas y en general no muerde, especialmente cuando le ponen (o se pone) el bozal. Aun en tiempos de censura, y habida cuenta de que los censores no suelen ser especialistas en metáforas, la poesía suele pasar las aduanas con mucho más donaire que la prosa.”

 

NB: Je vous recommande la lecture cette fable de John Keats ici: https://pierresel.typepad.fr/la-pierre-et-le-sel/2022/04/un-jour-un-texte-john-keats-la-sauterelle-et-le-grillon.html

 

 

32 commentaires:

  1. Tout d'abord un grand merci pour keats j'ai aussitôt ajouter ce poème à mon livre de poésie et toc
    j'aime bien Mario Benedetti je ne pourrai pas vivre de façon heureuse sans poésie, pour moi il n'y a pas de degré entre prose et poésie j'aime les deux mais la seconde est plus difficile plus exigeante, on peut écrire en prose sans réel talent l'inverse n'est pas vrai

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    1. Et toc!
      Mario Benedetti est connu pour ne pas mâcher ses mots, ici il fait preuve de beaucoup de délicatesse si j'ose dire:-)
      La poésie doit-elle être utile ? La question même semble idiote, mais bon.
      Je suis tout à fait d'accord avec toi, la poésie est souvent très exigeante, lire des poèmes de Borgés par exemple.

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  2. je pense que prose et poésie ont le don de "mordre", il y a de la poésie très peu mordante et de la prose qui mord très fort ;-)
    (ah! les discussions sur ce qui est utile, inutile, essentiel ou pas... c'est de tous les temps ;-))

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    1. Je pense que la poésie a ceci de particulier qu'elle va droit à l'idée, en peu de mots.
      Le lecteur doit souvent réfléchir, ou se laisser emporter quitte à ne pas tout comprendre. Ceci arrive rarement en prose.

      Ce qui est inutile n'est-il pas souvent essentiel ?
      Un beso

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  3. Moi non plus je ne pourrais pas vivre sans poésie. Elle est la vie. Et justement dans cette période de guerre et de grandes souffrances de part le monde, la poésie montre à la fois sa force et sa liberté. On peut y puiser chaque matin de quoi alimenter notre élan vital. Ainsi, en ce moment pour moi, Avrom Sutzkever. Je vais aller lire Keats, bien sûr.

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    1. Cette liberté de la poésie, qui la rend parfois un peu hermétique et que certains ont du mal à suivre, c'est normal, est pour moi aussi un source de beauté, de rire, de questionnements féconds.
      Bien sûr j'en lis un peu chaque jour; les romans que je lis aussi chaque jour sont un plaisir totalement différent, là c'est s'abstraire, le plus souvent, du notre réel pour entrer dans un univers fictif.
      Tiens je pars lire un poème de Sutzkever, merci

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  4. Plus je fréquente le monde de la poésie, plus je le découvre riche, divers, très fréquenté et très très peuplé ! Impossible de tenter même une recension de tout ce qui se dit, s'écrit, se publie, se récite, se slame, se poste... et qui relève de l'univers poétique.
    En aurait-on à ce point besoin ?
    Je crois que oui, en fait !

    Bien amicalement

    ANNE

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    1. Tu sais que j’explore depuis des lunes la poésie, surtout sud-américaine, et oui c’est fou le nombre et la variété des auteurs et textes.
      Un besoin de s’exprimer ainsi, partout et depuis toujours!
      Bonne fin de journée Anne

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  5. La poésie est la chanson de l'âme
    symphonie lumineuse et fragile
    comme un parfum de fleur
    au coeur de la nuit...

    Marie

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    1. Que c’est joliment dit par toi qui aimes tant tout dire en poésie!

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  6. La poésie ça mord c'est sûr. J'ai lu récemment des poèmes d'Edith Bruck, dont j'ai lu également deux livres. Et bien la poésie percute encore plus que les récits, aussi forts soient-ils. Et il y en a tant d'autres que l'on pourrait prendre en exemple. Bref dire que la poésie est inutile n'est pas recevable (pardon Flaubert, la grande célébrité de Rouen, mon quasi-voisin !)

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    1. Hola Aifelle, je me suis mal exprimée dans le billet si tu as compris que Flaubert critiquait poèmes ou poètes. Dans ce dictionnaire des idées reçues il se moque de ces phrases, idée s toutes faites qu’il entend.
      Il pense juste le contraire!
      Je ne connais pas Edith Bruck, j’y cours, merci

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    2. J'avais tout-à-fait compris qu'il se moquait, mais j'avais envie de me moquer un peu aussi, bon c'est raté, c'était mal fichu ! ;-) Bonne soirée Colo, bises (temps presque estival encore chez moi, incroyable).

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    3. Oh , je suis un peu "bouchée" désolée.
      Un occasion de rire, de moi, bien sûr!
      Enfin une belle journée sans pluies ici, profite de ce beau temps, besos

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  7. Une très belle citation sur la poésie qui "mord". Ce n'est pas celle qui cède à la facilité ou la poésie trop sentimentale et convenue que vise Flaubert, il me semble. De là à la trouver inutile, c'est de l'emportement chez cet écrivain qui a su comme personne écrire une prose rythmée, imagée.
    Sans doute la prose est plus accessible, en général, plus explicite, souvent, et la phrase moins libre que le vers. Mais la prose peut aussi, à mon avis, mériter ces attributs.
    Je m'en vais lire Keats puis préparer le thé, of course.

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    1. Pour Flaubert, mes culpa comme je l’explique plus haut à Aifelle.
      Bon thé… avec des biscuits? Du chocolat?

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  8. Autant je suis d'accord avec le propos, notamment tout ce que dit notre ami Mario en phrase 2, autant j'ai du mal à ranger tout ça dans une "morsure" !

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    1. Hola K, j’y ai réfléchi et me suis demandé si ce terme avait une relation avec les dictatures, avec les coups de bec et/ou de gueule que tant de poètes sud-américains ont habilement glissés dans leurs poèmes.
      Simple idée, peut-être absolument fausse😀

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  9. Hormis ta traduction possible de sens ci-dessus, on peut peut-être dire aussi que la poésie mord comme mordrait une canine leste et amoureuse dans la peau, comme la morsure de l'aube par la lumière, la morsure de la forte présence de certaines images, la morsure graphique de certains mots.
    La poésie est essentielle et vivante.
    Merci à toi pour ce post.

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    1. Merci pour cet éventail de possibles morsures ! La canine leste me met en joie!

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  10. Magnifique poème de Keats...
    Pour ce qui est de la poésie, elle est pour moi une sorte de calligraphie, un geste ultime et précis qui surgit de l'esprit, du cœur, elle va à l'essentiel... Et puis elle peut se trouver dans un geste, une peinture, un paysage, elle est inspiration inspirée et inspirante... On ne peut vivre sans poésie il me semble. Merci dame Colo et doux week end. brigitte

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    1. Bonjour hola, en général oui, peu de mots qui vont à l'essentiel, c'est pourquoi réussir un poème est si complique... Des idées, des mots qui surgissent partout, n'importe quand, c'est ça.
      Bon dimanche, un beso

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  11. C'est vrai qu'il existe pas mal de gens qui ne sont pas attirés par la poésie, un copain de lycée me le disait il y a plusieurs années. L'important c'est d'apprécier et d'y trouver du plaisir. Bon week end. Bises.

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    1. Absolument, et comme l'écrit Dominique plus haut, la poésie est plus exigeante, plus difficile que la prose.
      Bon dimanche Élisabeth, un beso

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  12. Bonjour Colo, j'aime beaucoup la dernière phrase sur le fait que la poésie passe les douanes mieux que la prose. J'imagine très bien la poésie avec sa petite carte d'identité et qui passe sans problème les frontières et la censure. Bon dimanche.

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    1. Passagère clandestine la poésie, absolument.
      Bon dimanche à toi aussi Dasola.

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  13. Bonjour Colo
    Poésie versifiée ou prose, sculpture, littérature, théatre, danse, peinture et j'en passe, l'art, quel qu'il soit et sous toutes ses formes est indispensable à l'Homme et à la vie. Il a été écrit que même dans les situations extrêmes (camps de concentration) l'art, en plus de faire passer des messages, aidait à garder espoir.

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    1. Oui, se réciter des vers appris par cœur semble aider, tout l'art, tu as raison, aide à vivre!

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    1. Cette phrase met fait inévitablement penser à Léo Ferré, Poètes, vos papiers ou Il n'y a plus rien...

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  15. La poésie "qui mord" et qui par sa finesse, son intelligence et sa dissimulation passe les censures du totalitarisme, cela me plait beaucoup ! Merci Colo, belle journée sous le soleil !

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    1. Cette dissimulation est dune importance capitale sous les dictatures, et il était un maître dans le genre!
      Soleil très voilé ici, on évite ainsi les brûlures, les "morsures" des rayons. Merci à toi!

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