(Suite vie et poèmes de Rafael Alberti)
Vient
ensuite une période créative, enthousiaste: dans la Résidence
d’étudiants il s’unit à d’autres poètes tels F. Garcia
Lorca, Miguel Herńandez,
Pedro Salinas...et ensemble, envoûtés par le surréalisme, les
rires et les idées folles, ils vont former ce bloc
de poètes connus comme ceux de la Génération
du ‘27.
Mais
cette allégresse ne
dure pas longtemps pour notre Rafael qui entre dans une crise existentielle spirituelle; il perd la foi, sa santé est fragile, il
a des problèmes d’argent.
De
là naît le recueil “Sur les anges” dont voici un poème.
(deux autres sur le blog Ma Librairie de Claudialucia
https://claudialucia-malibrairie.blogspot.com/2009/04/rafael-alberti-sur-les-anges.html)
Sin título, Dalí, surrealismo |
LE BON ANGE
Une
année, déjà endormi,
quelqu’un
d’inattendu
s’arrêta
à ma fenêtre.
Lève-toi!
Et mes yeux
virent
des épées et des plumes.
Derrière
moi monts et mers,
nuages,
becs et ailes,
les
crépuscules, les aubes.
Regarde-la
là-bas! Son rêve,
suspendu
au néant.
Oh
désir, marbre fixe,
fixe
lumière, fixes eaux
mobiles
de mon âme!
Quelqu’un
dit: Lève-toi!
Et
me voilà dans ta demeure.
(Trad:Colo)
El ÁNGEL BUENO”
Un
año, ya dormido,
alguien que no esperaba
se paró en mi ventana.
¡Levántate! Y mis ojos
vieron plumas y espadas.
Atrás montes y mares,
nubes, picos y alas,
los ocasos, las albas.
‹¡Mírala ahí! Su sueño,
pendiente de la nada.
¡Oh anhelo, fijo mármol,
fija luz, fijas aguas
movibles de mi alma!
Alguien dijo: ¡Levántate!
Y me encontré en tu estancia.
alguien que no esperaba
se paró en mi ventana.
¡Levántate! Y mis ojos
vieron plumas y espadas.
Atrás montes y mares,
nubes, picos y alas,
los ocasos, las albas.
‹¡Mírala ahí! Su sueño,
pendiente de la nada.
¡Oh anhelo, fijo mármol,
fija luz, fijas aguas
movibles de mi alma!
Alguien dijo: ¡Levántate!
Y me encontré en tu estancia.
L’écriture
de ce recueil l’aide à sortir de la crise. Et le voilà qui se
lance en politique pour secouer, dit-il, la conscience endormie d’un
pays qui s’achemine vers l’épisode le plus terrible de son
histoire, la Guerre Civile. Sa poésie devient un lieu de combat, communiste.
Et
c’est là qu’il rencontre, en 1930, une femme extraordinaire,
María Teresa León, écrivaine, engagée, féministe avec laquelle
il se marie. Elle dissipe tous ses doutes et il s’engage à fond
dans la lutte contre le fascisme. 1936, la guerre éclate, il aide à
mettre à l’abri des bombardements les tableaux les plus précieux
du Prado, accueille les intellectuels de tous bords qui luttent pour
la République.
À Niebla, Mon chien (1938)
"Niebla", toi tu ne comprends pas : c'est ce que
chantent tes oreilles,
le tabac innocent, naïf, de ton regard
et les longs flamboiements que dans le bois tu laisses,
en sautant, tendre éclair de rien échevelé.
Regarde ces chiens troubles, orphelins, circonspects,
qui, surgissant soudain des brumes déchirées,
traînent dans leurs timides pas désorientés
tout le récent effroi de leur maison en ruine.
Malgré ces fugaces voitures, sans convoi,
qui transportent la mort dans un caisse nue ;
et malgré cet enfant qui observe, réjoui,
la bataille là-haut, qui aurait pu l'assassiner ;
malgré le meilleur compagnon perdu, malgré
ma sordide famille qui ne comprend pas
ce que j'aurais voulu surtout qu'elle eût compris,
et malgré cet ami qui déserte et nous vend ;
"Niebla", mon camarade,
tu n'en sais rien, bien sûr, mais il nous reste encore,
au milieu de cette héroïque peine bombardée,
la foi, qui est la joie ; la foi : la joie, la joie.
A
Niebla, Mi Perro
«Niebla»,
tú no comprendes: lo cantan tus orejas,
el tabaco inocente, tonto, de tu mirada,
los largos resplandores que por el monte dejas,
al saltar, rayo tierno de brizna despeinada.
Mira esos perros turbios, huérfanos, reservados,
que de improviso surgen de las rotas neblinas,
arrastrar en sus tímidos pasos desorientados
todo el terror reciente de su casa en ruinas.
A pesar de esos coches fugaces, sin cortejo,
que transportan la muerte en un cajón desnudo;
de ese niño que observa lo mismo que un festejo
la batalla en el aire, que asesinarle pudo;
a pesar del mejor compañero perdido,
de mi más que tristísima familia que no entiende
lo que yo más quisiera que hubiera comprendido,
y a pesar del amigo que deserta y nos vende;
«Niebla», mi camarada,
aunque tú no lo sabes, nos queda todavía,
en medio de esta heroica pena bombardeada,
la fe, que es alegría, alegría, alegría.
(Capital de la Gloria,1938)
el tabaco inocente, tonto, de tu mirada,
los largos resplandores que por el monte dejas,
al saltar, rayo tierno de brizna despeinada.
Mira esos perros turbios, huérfanos, reservados,
que de improviso surgen de las rotas neblinas,
arrastrar en sus tímidos pasos desorientados
todo el terror reciente de su casa en ruinas.
A pesar de esos coches fugaces, sin cortejo,
que transportan la muerte en un cajón desnudo;
de ese niño que observa lo mismo que un festejo
la batalla en el aire, que asesinarle pudo;
a pesar del mejor compañero perdido,
de mi más que tristísima familia que no entiende
lo que yo más quisiera que hubiera comprendido,
y a pesar del amigo que deserta y nos vende;
«Niebla», mi camarada,
aunque tú no lo sabes, nos queda todavía,
en medio de esta heroica pena bombardeada,
la fe, que es alegría, alegría, alegría.
(Capital de la Gloria,1938)
il y a des vers qui font tilt chez moi sans que je sache vraiment pourquoi mais c'est tout le bonheur de la poésie
RépondreSupprimerDerrière moi monts et mers,
nuages, becs et ailes,
les crépuscules, les aubes.
ah cela m'enchante et m'emporte
Surtout ne résiste pas....te voilà déjà loin, loin.
SupprimerEtonnant, ce poème de guerre et de mort qui s'ouvre sur la joie !
RépondreSupprimerEnchantée par "lo cantan tus orejas".
Merci, Colo.
Bonjour Tania, la foi dans une victoire, dans la légitimité/nécessité du combat...c'est ainsi que je l'ai compris, que Niebla, enchanté qu'on lui parle, semble ressentir aussi...
SupprimerSuite et fin la semaine prochaine.
j'aime
RépondreSupprimerj'aime le poème à son chien :-)
Nous voilà deux donc!
SupprimerParler de joie à son chien alors que tout semble s'effondrer, cela m'a profondément émue. Bises alpines et merci pour cette découverte.
RépondreSupprimerBonjour Dédé, ce poème est moins connu que "A galopar" mais je le trouve magnifique.
SupprimerMerci à toi Dédé
Ah merci. J'ai hâte de connaître la suite du feuilleton rafael Alberti. Oui la joie la joie...
RépondreSupprimerJe suis contente que cette histoire de vie, résumée à ma manière, te passionne. Suite et fin la semaine prochaine.
SupprimerBonne journée Kwarkito.
Deux poèmes superbes chacun à leur manière, particulièrement celui où il s'adresse à son chien. Dans le contexte c'est remarquable. Quelle vie chez lui ...
RépondreSupprimerLa vie de toute une génération, c'est terrible.
SupprimerJe connaissais peu ce poète, à part les deux ou trois poèmes chantés par Paco Ibañez, me voilà enchantée.
Bonne journée Aifelle.
La guerre et le bon ange, plumes d'ailes et plumes de flèches, couleurs, bruit... quelle beauté!
RépondreSupprimerUne plume vive, une "belle plume" comme on dit.
SupprimerEncore deux très belles propositions. Merci.
RépondreSupprimerLe chien, compagnon confiant, me touche de près.
C'est ça, oui, un écoutant de premier ordre le chien.
SupprimerContente que cela te plaise K.
Un chien, des petits enfants qui jouent : un regard posé sur la joie innocente apporte du réconfort quand ça ne va plus, quand les maux de la guerre grondent.
RépondreSupprimerParmi ceux d'Alberti que vous renseignez ailleurs, j'aime "Les Anges collégiens" qui suit un peu la même idée:
"Aucun de nous ne comprenait quoi que ce fût :
ni pourquoi nos doigts étaient d'encre de Chine,
ni pourquoi le soir ouvrait des compas pour ouvrir à l'aube des livres.
Nous savions seulement qu'une droite peut, à son gré, être courbe ou brisée
et que les étoiles errantes sont des enfants qui ignorent l'arithmétique.
Bon week-end Colette.
Magnifiques ces anges collégiens, merci beaucoup! Les doigts d'encre de Chine...et le dernier vers aussi.
SupprimerBon week-end à vous aussi, grand soleil ici, 28º.
L'ange et le chien associés en hommage au poète. Je me demande si "nos" anges ne s'incarnent pas parfois en chien pour nous soutenir de leur affection.
RépondreSupprimerMerci Colo pour la découverte de ce poète et des deux magnifiques textes
Bonne fin de semaine et bisesss
PS
Dans la Bible Tobie pour accomplir son voyage est accompagné d'un ange "et le chien suivit derrière"
J'en suis presque sûre Fifi, les deux sont bien présents à nos côtés.
SupprimerJe n'avais pas songé à Tobie, mais oui!
Merci, bon dimanche, un beso!
28° ! Ici, grand vent et humidité, 12° au lever... C'est une honte
RépondreSupprimer;-)
Ah mais au lever il "ne fait que 18º" ici! ;-)
SupprimerVoyons si Éole vous envoie un soleil bienfaisant...
Créer aide à sortir des périodes de doute, cela recentre sur l'essentiel. La vie a tout organisé pour ce poète, et il l'a entendue, c'est très beau. Son combat fut très beau aussi. Merci Colo, bises ensoleillées. brigitte
RépondreSupprimerLa suite et la fin de cette biographie en poèmes la semaine prochaine, encore beaucoup d'exils hélas...Mais la poésie toujours l'aidera, tu as raison.
SupprimerBonne semaine Brigitte, un beso
Tu me donnes envie de relire l'espagnol cette langue si poétique et si chantante...(je n'en ai fait que deux ans, dommage)
RépondreSupprimerBonne idée Marie. Je sais qu'il y a des professeurs d'espagnol et de français qui emploient des poèmes/textes de ce blog en cours!
SupprimerL'espagnol est une langue que j'aime énormément, mais chacun ses sonorités, ses goûts bien sûr.
Merci pour ces lectures que je me prête à lire alors que je ne suis pas du tout littéraire, et qui me plaît bp. Gros bisous
RépondreSupprimerOh que ça me fait plaisir Val!
SupprimerBonne journée, un beso
Bonjour Colo
RépondreSupprimerquels beaux "camarades" que ce bon ange(gardien) et ce chien(gardien aussi)doté d'un très beau prénom d'origine atmosphérique!Ce sont les deux piliers qui donnent, semble-t-il la raison de vivre à Alberti: la foi et la joie, dans ce monde qui n'est que feu, sang et guerre. Il fallait y croire. Cette période me glace.
D'un côté,sont soulignées la grâce, l'innocence des animaux et des enfants, de l'autre, les traumatismes.
j'ai aimé cette image:
"le tabac innocent, naïf, de ton regard
et les longs flamboiements que dans le bois tu laisses,
en sautant, tendre éclair de rien échevelé."
Merci pour cette lecture attentive Maïté, je me suis attardée sur ce poète peu connu je crois à l’étranger et si important dans les pays hispanisants.
SupprimerD'exils en exils, ses poèmes racontent sa vie, terrible.
Je t'embrasse
Quels magnifiques poèmes ! Tu sais que j'aime Alberti puisque tu as mis un lien vers mon blog, ce dont je te remercie. Celui de Niebla (le brouillard? ) me plaît infiniment, cet "ange gardien" qui permet de résister à la haine et au désespoir. René Char a aussi écrit un beau poème sur la mort de son chien Tigron, un autre thème.
RépondreSupprimerBonjour Claudia, oui, j'ai été heureusement surprise de voir Alberti chez toi, il n'a pas l'air d'être très connu au-delà des frontières.
SupprimerOui, Niebla c'est brouillard une superbe poème, un confident.
Le chien, un merveilleux compagnon, tout comme le chat. Alberti s'est marié et il a vécu des choses très dures. Mais il s'en est sorti. Du moins, ta note le dit pour l'instant. Merci de t'attarder sur ce poète que je découvre.
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