Tout d’abord je voulais vous signaler un Printemps des Poètes exceptionnel de qualité et variété sur le blog de l’ami K.
Pour nous aujourd’hui.
Nicanor Parra (Chili 1914-2018), quel personnage! L’anti-poète que je ne dois sans doute pas vous présenter.
Voici pour commencer un extrait d’une interview sur lui:
“Le coq à l’âne est son dada, si je puis dire. Il saute d’un sujet à l’autre sans rapport logique. Est-ce seulement un jeu auquel se livre Parra pour désarçonner son lecteur ?
Parra
appartient à une société ou une époque où la force de
l’instabilité est permanente. Sa poésie exploite à l’extrême
limite les comportements contradictoires de notre monde. Il faut
apprendre à vivre dans la contradiction sans conflit, dit-il, c’est
une condition pour pouvoir survivre.”
Puis
le voilà.
La
montagne Russe (extrait)
La poésie a été le paradis
De l'idiot solennel.
Jusqu’à ce que j’arrive
M’y installer avec mes montagnes russes
Montez,
si ça vous chante.
Mais je ne réponds de rien
si vous redescendez
en saignant de la bouche et du nez.
Mais je ne réponds de rien
si vous redescendez
en saignant de la bouche et du nez.
Extracto de « Montaña rusa »
La Montana Rusa
Durante medio siglo
La poesía fue
El paraíso del tonto solemne.
Hasta que vine yo
Y me instalé con mi montaña rusa.
Suban, si les parece.
Claro que yo no respondo si bajan
Echando sangre por boca y narices.
Montañas Rusas Fabiaba Calandria |
Finalement
un poème entier
Nicanor Parra – Casse-tête
Je
ne donne à personne le droit.
J’adore un morceau de chiffon.
Je change des tombes de place.
J’adore un morceau de chiffon.
Je change des tombes de place.
Je
change des tombes de place.
Je ne donne à personne le droit.
Je suis un type ridicule
Sous les rayons du soleil,
Moi le fléau des bistrots.
Moi je meurs de rage.
Je ne donne à personne le droit.
Je suis un type ridicule
Sous les rayons du soleil,
Moi le fléau des bistrots.
Moi je meurs de rage.
Je
n’ai plus aucun recours,
Mes propres cheveux m’accusent
Sur un autel d’occasion
Les machines ne pardonnent pas.
Mes propres cheveux m’accusent
Sur un autel d’occasion
Les machines ne pardonnent pas.
Je
ris derrière une chaise,
Mon visage se remplit de mouches.
Mon visage se remplit de mouches.
C’est
moi qui m’exprime mal
Exprime en vue de quoi.
Exprime en vue de quoi.
Je
bégaye,
Du pied je touche une espèce de fœtus.
Du pied je touche une espèce de fœtus.
C’est
pour quoi faire, ces estomacs ?
Qui a fait ce méli-mélo-là ?
Qui a fait ce méli-mélo-là ?
Le
mieux, c’est de faire l’indien.
Je dis une chose pour une autre.
Je dis une chose pour une autre.
Rompecabezas
No
doy a nadie el derecho.
Adoro un trozo de trapo.
Traslado tumbas de lugar.
Adoro un trozo de trapo.
Traslado tumbas de lugar.
Traslado
tumbas de lugar.
No doy a nadie el derecho.
Yo soy un tipo ridículo
A los rayos del sol,
Azote de las fuentes de soda
Yo me muero de rabia.
No doy a nadie el derecho.
Yo soy un tipo ridículo
A los rayos del sol,
Azote de las fuentes de soda
Yo me muero de rabia.
Yo
no tengo remedio,
Mis propios pelos me acusan
En un altar de ocasión
Las máquinas no perdonan.
Mis propios pelos me acusan
En un altar de ocasión
Las máquinas no perdonan.
Me
río detrás de una silla,
mi cara se llena de moscas.
mi cara se llena de moscas.
Yo
soy quien se expresa mal
Expresa en vistas de qué.
Expresa en vistas de qué.
Yo
tartamudeo,
Con el pie toco una especie de feto.
Con el pie toco una especie de feto.
¿Para
qué son estos estómagos?
¿Quién hizo esta mescolanza?
¿Quién hizo esta mescolanza?
Lo
mejor es hacer el indio.
Yo digo una cosa por otra.
Yo digo una cosa por otra.
casse-tête est un bien étrange poème, mais très sombre et très puissant, comme un rêve. Et le coque-à-l'âne que pratique cet auteur ne me laisse pas indifférent.
RépondreSupprimerHola Kwarkito, sa théorie sur la gestion des contradictions est en effet intéressante!
SupprimerBonne journée.
C'est un poète rigolo... qu'entend-il à ton avis par "je fais l'indien" ? J'aime le printemps des poètes, il nous donne accès à des œuvres insoupçonnées. Merci Colo, bises printanières. brigitte
RépondreSupprimerBonjour Brigitte, faire l'indien serait faire le zouave en français.
RépondreSupprimerPour le rire je te mets un extrait d'un article très éclairant sur lui:
"...Autant d’éléments qu’il plonge dans le bain acide d’une ironie jubilatoire. Car s’il y a bien une émotion qui emporte le lecteur de Parra, c’est le rire ; un rire généreux qui se fie avant tout à l’intelligence du lecteur, mais un rire âpre également ; un rire destiné à faire un croc-en-jambe à tous les « idiots solennels » du monde."
(http://escalier-des-aveugles.blogspot.com/2017/07/nicanor-parra-poemes-et-antipoemes.html)
le mystère rôde là .....
RépondreSupprimeret j'ai décidé moi aussi de rire mais derrière mon écran
je vais aller voir l'ami K
Je te vois te marrer!
Supprimerbizarre... et très moqueur!
RépondreSupprimerC'est un poète hors normes, très connu et pas uniquement par les hispanisants.
SupprimerDrôle et inattendu.
Il a sa façon de ruminer le monde et d'en rire, l'essentiel est qu'il nage dans le ciel !
RépondreSupprimerJe vais roder autour du printemps des poètes et voir si j'y suis !!!!! mais comme Nicanor Parra, je ne suis de rien, mais surement de beaucoup.
Bien à toi Colo
Merci
Ah cher Bizak, je ne t'y ai pas vu mais ça ne veut rien dire!
SupprimerBonne après-midi, à bientôt!
Rire en lisant un poème est un exercice bien plaisant je trouve... Merci à lui et à toi !
RépondreSupprimerDe quoi prendre goût (encore plus) à la poésie!
SupprimerVoilà qui me rappelle les anti-pièces de Ionesco. Montagnes russes, casse-tête, méli-mélo, ce sont des cocktails de mots - bien agiter !
RépondreSupprimerExact!
SupprimerBonne soirée.
Je ris derrière mon écran, assise sur ma chaise. Quelle imagination! Et il est bien vrai que pour vivre dans notre monde, il faut savoir gérer la contradiction et ne pas en souffrir. Merci pour cette découverte. Bises alpines.
RépondreSupprimerP.S. ma chaise rit aussi.
Dans les montagnes résonnent tous ces rires...Bonne journée Dédé.
SupprimerIl nous fait travailler les méninges le poète ! et il se marre .. il a bien raison. C'est une mine de découvertes le Printemps des Poètes. (Aifelle)
RépondreSupprimerCe n'est pas, en effet, une poésie facile.
SupprimerCe printemps poétique...je rêve d'une année poétique, ça ne t'étonnera pas, tant de brillant(e)s méconnus.
Bonne journée Aifelle
c'est très surprenant comme poèsie, mais j'aime beaucoup
RépondreSupprimerOn est loin des classiques, en effet. Contente de tu apprécies Niki.
SupprimerQuel billet bien documenté !
RépondreSupprimerLe fait qu'il soit mathématicien n'est peut-être pas étranger à son goût de la contradiction, à sa volonté de rechercher la note déstabilisante. C'est une grande qualité, je trouve, et qu'on se casse la figure dans un poème n'est pas pour me déplaire, s'il s'agit de constante remise en question. Mais « art de démolition »... je m'interroge, même s'il s'agit de parodie.
L'article en lien propose une belle réflexion sur la traduction en français de ce poète, merci à vous.
Merci à vous Christian, j'ai pris plaisir à préparer ce billet un jour de pluie/neige.
SupprimerC’est jubilatoire. J’aime beaucoup cette façon d’ecrire. Merci Colo !
RépondreSupprimerAh, je pensais bien que tu aimerais ce genre de poème cher Obni!·
SupprimerMe revoilà car je viens d'entendre ceci sur une chaîne radio « généraliste » : « Les hommes se servent des mots, le poète les fait ». Ce qui trouve bien place ici.
RépondreSupprimerBonne après-midi, Colette.
Tout à fait, grand merci Christian!
SupprimerBonne fin de journée.
Bienvenida Anna, ne sé cómo llegaste aquí, pero este blog es bilingüe y no te costará mucho (bromeo)
RépondreSupprimerNo dejaré de ir a visitarte, gracias.
Oui, on dirait un peu un rêve, avec toute sa "logique" bousculée que l'on accepte comme telle...
RépondreSupprimerC'est un peu ça, oui!
SupprimerBon week-end Edmée
Merci de la mention.
RépondreSupprimerEt Nicanor, j'adore ;-)
Jolie rime!
SupprimerJe te souhaite un bon we, bisous
RépondreSupprimerBon week-end à toi aussi!
SupprimerIncroyable et désordonnée, sa poésie est à l'image de nos pensées délirantes qui vont et viennent sans aucune logique et pourtant cet inconscient là a des choses à dire
RépondreSupprimerMerci pour tes mots Marie.
SupprimerBon dimanche
Déroutant et pourtant il tord l'esprit comme il tord le cou au conformisme.
RépondreSupprimerOui, tout à fait ça Sergio!
SupprimerBonne journée
Ce qui me vient à l'esprit au vu de sa photo : Anti-poète pas seulement puisqu'il apparaît en anti-coiffeur. Convenons en, ce style était conforme à sa personnalité.
RépondreSupprimerBien vu! Bonne journée Sergio
SupprimerÉtrange, étrange cette poésie débridée qui me fait penser à une écriture automatique où il mettrait beaucoup de lui, consciemment, inconsciemment. Sa coiffure en accord avec les mots cueillis à tout vent m'a fait sourire, tout comme son remue-méninges labyrinthique.
RépondreSupprimerSympa!
En tout cas très éloigné d'un quelconque modèle bien sage!
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