18 sept. 2012

Aux îles Canaries 1 / En las islas Canarias

À l'aube d'un jour blanc / En el amanecer de un día blanco


Depuis le temps que Espaces Instants existe, ici mais ailleurs auparavant, jamais nous n'avons débarqué sur les îles Canaries. L'année que j'y ai passée, ma première en Espagne juste après la mort de Franco, m'a laissé des souvenirs glissés dans le fond d'un tiroir, un dossier consciemment « oublié ».
Pas par la faute des îles ni de leurs habitants, mais par celle d'un dur apprentissage de la langue, des coutumes et la découverte de ce qui pour moi s'assimilait au tiers-monde. Je n'y étais pas préparée.
Alors trois billets vont rétablir cette injustice. À chaque fois une poétesse et un artiste.
Desde que existe Espaces Instants, aquí pero en otros sitios antes, nunca hemos desembarcado en las islas Canarias. El año que pasé allí, para mi el primero en España, justo después de la muerte de Franco, me dejó unos recuerdos metidos en el fondo de un cajón, un expediente conscientemente «olvidado».
No por culpa de las islas ni de sus habitantes, sino por la de un duro aprendizaje de la lengua, de las costumbres y del descubrimiento de lo que para mí se asimilaba al tercer mundo. No estaba preparada.
Tres entradas van a reparar esa injusticia. Cada vez una poetisa y un artista.



Toi du haut du balcon... Josefina de la Torre (1907-202)

Toi du haut du balcon de ton silence
moi dans la barque sans cap de mon mal,
tous deux perdus sur le même chemin,
toi qui attends ma voix et moi qui attends.

Esclave toi de l'horizon inutile,
enchaînée moi à mon passé.
Pas une silhouette de navire dans ta pupille
ni boussole et timon pour mes bras.

Debout sur la haute balustrade marine
en vain tu attendrais ma venue.
Je devrais arriver sur l'écume
à l'aube d'un jour blanc.

Mais le haut balcon de ton silence
oublia le signal pour mon navire.
Et je me perdis dans le brouillard de ta rencontre
-comme un oiseau aveugle- pour toujours.
(Trad: Colo)

Andrés Delgado


Tú en el alto balcón... Josefina de la Torre

Tú en el alto balcón de tu silencio,
yo en la barca sin rumbo de mi daño,
los dos perdidos por igual camino,
tú esperando mi voz y yo esperando.

Esclavo tú del horizonte inútil,
encadenada yo de mi pasado.
Ni silueta de nave en tu pupila,
ni brújula y timón para mis brazos.

En pie en el alto barandal marino
tú aguardarías mi llegada en vano.
yo habría de llegar sobre la espuma
en el amanecer de un día blanco.

Pero el alto balcón de tu silencio
olvidó la señal para mi barco.
Y me perdí en la niebla de tu encuentro
–como un pájaro ciego– por los años.



42 commentaires:

  1. Mon premier passage à Santa Cruz de Ténérife date de novembre 1949..j'étais seule avec ma mère, nous allions, au Congo Belge, retrouver mon père. Des anciens nous ont emmenées en excursion,j'avais 6 ans, je n'ai jamais oublié l'or des églises ...par après les escales ont été consacrées au shopping....Certes, ce ci est loin de la poésie mais ce sont des souvenirs que je garde moi aussi dans un dossier...belle soirée à toi.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. J'ai vécu à Las Palmas mais visité Tenerife, beaucoup plus verte et dorée, oui.
      Souvenirs...sur la place principale de la ville de nombreux joueurs d'échecs, dans un village des forêts d'avocatiers...
      Merci d'avoir ouvert ton dossier!
      Belle semaine.

      Supprimer
  2. Ce texte est superbe. Un brouillard tout en suggestion, en suspension...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Contente que tu l'aies apprécié K. Belle soirée.

      Supprimer
  3. oh que ce poème me parle, si tu savais !
    J'aime beaucoup l'illustration ... se perdre dans les vagues.
    Merci Colo, merci.
    Je t'embrasse.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je ne peux qu'imaginer Sable...
      Toi qui passes un temps au bord de mer, c'est parfait!
      Belle semaine à toi, besos.

      Supprimer
  4. Quel beau poème que j'entends par ta voix ! Quel changement total de vie pour toi, cette année-là. Et puis, quand le brouillard s'est levé, quelle lumière...
    J'aime l'illustration de Andrés Delgado que tu as choisie, je découvre en lien un autre titre parlant : "Donde habita el paisaje". Douce soirée, Colo.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Bonsoir Tania, ces derniers jours j'ai découvert avec plaisir de très nombreux artistes des Canaries. J'espère que tu aimeras les suivants aussi.
      Belle soirée, je t'embrasse.

      Supprimer
  5. Josefina de la Torre qui était aussi une excellente soprane
    On la compare parfois à Marlène Dietrich.
    Elle était très belle
    Bonne soirée

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oui, oui, une femme pleine de talents et de beauté. Merci de le dire/ rappeler.
      Belle soirée à toi aussi.

      Supprimer
  6. J'aime tout: la douce musique nostalgique du poème et la peinture très suggestive.
    Merci

    RépondreSupprimer
  7. Je retiens la rencontre de ces mots: "esclave de l'horizon inutile"

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Hélas!
      Ton aube est-elle blanche? Colorée? La mienne est d'un beau gris en ce moment.

      Supprimer
    2. Ne pas s'y enliser...je t'envoie des marbrures bleues.

      Supprimer
  8. je fais mes bagages immédiatement pour tu suivre les yeux fermés

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ouvre-les de temps en temps quand même chère amie!

      Supprimer
  9. paroles d'un poids lourd de la chanson, Patrick Norman :
    - "Gulliver dans l'Univers
    S'était fait des amis
    La seule terre qui lui fût étrangère
    C'est les îles Canaries..."

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ah, oui, Patrick Norman, quel plaisir, cela faisait bien longtemps...inconnu ici bien sûr... mais on lui fera découvrir ces îles.
      Bonne journée JEA.

      Supprimer
  10. J'aime beaucoup ce poème. Je ne connais pas cet auteur.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Elle est fort peu connue, même ici tu sais!
      Belle journée.

      Supprimer
  11. c'est beau. c'est déchirant.

    RépondreSupprimer
  12. Blog parfait pour moi, pour améliorer mon francaise, merci

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Bonjour / Hola Marina, je viens de jeter un coup d’œil rapide à ton blog bilingue lui aussi! Amusant, j'y retournerai!
      Hasta pronto, gracias por tu visita.

      Supprimer
  13. C'est poignant ce "haut balcon du silence" ! Quelle solitude dans l'enfance pour oublier les signaux de ceux qui nous aiment ! Mais peut-être ces signaux partaient-ils d'un coeur souffrant plus qu'il n'aurait fallu. La rencontre n'est pas toujours possible. Il faudrait peut-être creuser l'attente, encore et encore. Pff, c'est douloureux, mais quoi d'autre ? L'écriture est-elle suffisante ? Je ne le crois pas, même si elle ouvre des portes ...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Bonjour Lily, bien d'accord avec toi pour l'écriture, pour le reste aussi d'ailleurs; que de rencontres ratées, que de silences aussi. Rien d'autre en effet.
      Passe un excellent week-end.

      Supprimer
  14. Je vais me laisser entraîner sur ce chemin de connaissance… Je ne connais presque rien de ces îles… Merci encore Colo !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci de ta confiance Obni, j'essayerai d'être à la hauteur...

      Supprimer
  15. Que c'est beau ! ....et douloureux à la fois... c'est drôle qu'un poème puisse être les deux !
    Merci pour cette traduction, colo !
    Que de découvertes !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. J'espère que tu en feras encore...le 3º billet sur ces îles t'intéressera particulièrement, tu verras...suspense!
      Beau weekend Euterpe.

      Supprimer
  16. Dur, dur de quitter son pays... es-tu toujours "un oiseau aveugle pour toujours" ??
    Jolie matière de peinture et belle peinture de matière que les toiles de cet artiste ! Bonne journée, chère Colo.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. On non, je suis plutôt devenue un oiseau sédentaire aux mille yeux! Tant vu et appris.
      Je suis bien contente que tu apprécies ces toiles MH, toi la spécialiste.
      Excellente journée à toi aussi, superbe soleil ici.

      Supprimer
  17. Hello Colo ! Impossible de lire tes derniers billets, ton blog (et c'est le seul) déraille complètement. Bizarre, bizarre... Alors je te souhaite un bon wk et t'envoie un big beso ;-)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Hola MH, je ne peux que te dire ceci: depuis déjà tout un temps ce blog ne fonctionne pas avec Google norma, il faut employer Google Chromium ou Firefox...sinon je ne vois pas du tout, désolée et besos.

      Supprimer
  18. Ah, je suis soulagée, car si d'autres yeux et une autre tête voient comme moi, ce qui ne se voient plus, alors bon... en effet comme MH je lis des articles puis quand je reviens plus tard ou un jour ou deux jours après, pffffuit disparus. Et cela même sur mon Mac qui tourne avec Safari... donc bon, c'est pourquoi je ne laisse plus de mots, car je pensais à un grand chamboulement style nettoyage de printemps où l'on jette le surplus pour faire de la place. Donc voilà plusieurs jours que je lis l'article. Tout à l'heure je l'avais en date du 4/10, là maintenant en date du 18/09. Oh secours, je perds la boule et Colo avec... rire et sourire. Enfin tu vois pas mes grimaces et mon hochement de tête... (Ps : là aujourd'hui c'est depuis le bureau que je vois ces anomalies).

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. OH là, là...MH vient de laisser un commentaire sur le dernier billet...avec Google chrome pas de problème dit-elle! Désolée Lou!

      Supprimer
  19. C'est émouvant, le sentiment d'une rencontre improbable, l'exigence de l'attente confrontée à la réalité et le lent cheminement pour enfin se trouver...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est exactement ce qui m'a émue Marcelle.
      Merci d'être passée.

      Supprimer
  20. C'est vrai que les insulaires semblent vivre en haut d'un balcon, entouré par l'immensité bleue et le silence; ce silence que l'on ne trouve que sur une falaise, éloignée de tout, perdue sur un minuscule rocher qui flotte on ne sait comment.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Tu dis si bien ce que tu connais.
      Merci d'être passé Damien, amicalement depuis mon île à nouveau verte après les pluies, et bleue bien sûr!

      Supprimer