11 août 2024

La poupée / La muñeca

 Je republie ce billet, relu ce week-end, pour la beauté, l'originalité du poème. 


Dans une interview, je ne sais plus laquelle, Marguerite Yourcenar disait qu’on met plus de soi dans la poésie que dans les romans.

Je veux penser qu’elle était d’humeur légère et ludique quand elle a écrit ce calligramme, s’inspirant d’ Apollinaire, vers 1932.
Petrouchka est l’équivalent russe de notre Polichinelle.
Si vous suivez ce blog depuis un temps, vous savez qui est Silvia Barón Supervielle, c’est elle qui a traduit, tâche extrêmement compliquée, (mais elle a également traduit Borgès!), ce poème en espagnol.
Deux bijoux.
En una entrevista, no me acuerdo cual, Marguerite Yourcenar decía que en la poesía uno pone más de si mismo que en las novelas.
Quiero creer que estaba de humor ligero y lúdico cuando escribió este caligrama, inspirado de Apollinaire, en los años ‘30
Petroushka es el equivalente ruso de nuestro Polichinelle (Polichinela).
La traducción al español, tan complicada (pero ella tradujo a Borges!) es de Silvia Barón Supervielle.
Dos joyas.

Poème pour une poupée achetée dans un bazar russe M. Yourcenar





Je suis
Bleu de roi
Et noir de suie.

Je suis le grand Maure
(Rival   de    Petrouchka).
La nuit me sert  de   troïka;
J’ai  le   soleil pour  ballon  d’or.

Presque aussi vaste que les ténèbres,
Mais    tout    aussi    fragile    qu’un    vivant,
Le moindre souffle émeut mon corps sans vertèbres.

Je    suis    très    résigné,    car   je   suis   très    savant :
Ne   raillez   pas    mon   teint   noir,  ni  mes  lèvres béantes,
Je  suis,  comme  vous,   un   pantin   entre  des   mains   géantes.



Petrouchka, source Wiki




Poema para una muñeca comprada en un bazar ruso.




Soy
El rey
Azul voy
Negra mi ley

Yo soy el gran Moro
(Rival de Petrouchka)
La   noche  fue  mi troica
Y  el  sol  mi  balón  de   oro.

De   las   tinieblas,   el   rellano;
Del    aire    respirante,   el    rocío;
Un  soplo  oscila  en  mi cuerpo vacío.

Soy muy resignado porque soy muy sabio.
No desdeñen mi tez negra o mi abierto labio:
Soy como ustedes un juguete en la enorme mano.
Versión de Silvia Barón-Supervielle

22 commentaires:

  1. Magnifique ♥♥
    "Je suis, comme vous, un pantin entre des mains géantes." Nous le sommes, n'est ce pas, entre les "mains géantes" de la Vie ?

    Merci Colo ! Il fait chaud, même en Alsace :-)
    Bises

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    1. Des pantins dans les grandes chaleurs, sûrement, pantins du temps...?
      Merci Fifi, bonne semaine quand même...

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  2. Je suis
    Bleu de roi
    Et noir de suie.

    Je suis le grand Maure
    (Rival de Petrouchka).
    La nuit me sert de troïka;
    J’ai le soleil pour ballon d’or.

    Presque aussi vaste que les ténèbres,
    Mais tout aussi fragile qu’un vivant,
    Le moindre souffle émeut mon corps sans vertèbres.

    j'adore! une merveille

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  3. "Le moindre souffle émeut mon corps sans vertèbres " ... ça me parle ce ver ! Splendide poème. Bises Colo.

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    1. Oh ma pauvre amie, je comprends, j'espère quand même que peu à peu tu te remets!
      je t'embrasse

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  4. Je ne connaissais pas du tout ce poème mais la traductrice de nom tout de même. J'oublie toujours que Marguerite Yourcenar a écrit aussi des poèmes, je crois ne jamais en avoir lu d'elle ou alors au lycée peut-être ! Il faudra que je recherche ses recueils en médiathèque...En tous les cas ce poème est très original. Merci pour ce partage

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    1. C'est vrai que c'est un domaine où on n'attend pas M. Yourcenar. Je connais peu de poèmes d'elle...

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  5. Les poèmes, plus que la prose encore, sont faits pour être lus et relus et relus encore. Grand plaisir à redécouvrir celui-ci, merci Colo.

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    1. Et relus encore, absolument, oui. Et à chaque fois on y voit/comprend de nouvelles choses.
      Bonne journée Tania.

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  6. Merci chère Colo de partager ce beau poème, c'est une découverte pour moi et j'apprécie.
    Gros bisous et bel après-midi.

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  7. Et donc Petrouchka son rival possède les mêmes couleurs (noir et bleu) et du vert ?(Verde) Je regarde uniquement la photo hein, je n’y connais rien 🤣

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    1. Ha, ha, on ne peut être "spécialiste" en tout Thaïs...merci de ta visite.

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  8. J'aime beaucoup ces "textes dessinés" (ça me rappelle Apollinaire) dont je ne parviens pas à retrouver le mot !

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    1. Belle surprise Nikole de te lire ici, des calligrammes...pas un mot qu'on emploie souvent.

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  9. Tiens c'est une bonne idée de republier des billets, j'ai vu cela chez Marie Gillet. Il est vrai que les poèmes se prêtent mieux à la relecture que la prose.
    Yourcenar, Silvia B Supervielle (et même Borgès), des noms qui m'enchantent. Merci pour ce calligramme.

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    1. Avec plaisir. Mais oui les poèmes, par leur concision, s'oublient vite. Il faudrait apprendre par coeur ceux qu'on aime, me suis-je dit tant de fois!

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  10. Je passais juste te dire que je pense à toi et que j'espère que tu n'as pas eu à souffrir de la tempête, ni toi ni tes proches...je me mets très bientôt en pause (je suis à nouveau grand-mère).

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    1. C'est gentil Manou, notre partie de l'île a été épargnée, un gros orage sans dégâts.
      Bonne pause grand-mère alors, un beso

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  11. Ta photo est parfaitement adaptée, merci Colo pour cette découverte. Je ne savais pas que Marguerite Yourcenar avait écrit des poèmes.
    Ce caligramme en forme de sapin semble léger dans le vent et profond à la fois. Je t'embrasse. Claudie.

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    1. Merci Claudie, toujours aussi positive, je t'embrasse à mon tour

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