6 mai 2021

Une valse surréaliste / Un vals surrealista

Cette chanson de Leonard Cohen, tant écoutée dans ma jeunesse, vous la connaissez sans doute: Take This Waltz.

Esa canción de Leonard Cohen, escuchado tantas veces en mi juventud, le conocéis tal vez,









Peut-être comme moi ne compreniez-vous pas alors les paroles. 

Et bien cette chanson est la traduction d'un poème, (très) surréaliste, de F. Garcia Lorca, extrait de "Poète à New-York".
Alors "mon travail" est de vous livrer ce poème, non ?

Quizás, al igual que yo entonces, no entendíais las palabras. Esa canción es la traducción de un poema, (muy) surrealista, de F. Garcia Lorca, del poemario “Poeta en Nueva York”.
Aquí van el poema y la canción interpretada por Ana Belén.


Ana Belén, entres autres, la chante en espagnol.

                         




Petite Valse Viennoise

 
F. Garcia Lorca

À Vienne il y a dix jeunes filles,
une épaule où sanglote la mort
et une forêt de colombes disséquées.
Il y a un fragment du matin
dans le musée du givre.
Il y a un salon à mille fenêtres.

Ay, ay, ay, ay !
Prends cette valse la bouche fermée.
 
Cette valse, cette valse, cette valse,
de oui, de mort et de cognac
qui mouille sa traîne dans la mer.
 
Je t’aime, je t’aime, je t’aime,
avec le fauteuil et le livre mort,
dans le couloir mélancolique,
dans l’obscur grenier de l’iris,
dans notre lit de la lune
et dans la danse que rêve la tortue.

Ay ! Ay ! Ay ! Ay !
Prends cette valse à la taille brisée.
 
À Vienne il y a quatre miroirs
où jouent ta bouche et les échos.
Il y a une mort pour piano
qui peint en bleu les garçons.
Il y a des mendiants sur les toits.
Il y a de fraîches guirlandes de larmes.

Ay ! Ay ! Ay ! Ay !
Prends cette valse qui se meurt dans mes bras.
 
Parce que je t'aime, je t'aime, mon amour,
dans le grenier où jouent les enfants,
en rêvant de vieux lustres de Hongrie
dans la rumeur de la soirée tiède,
en voyant des brebis et des iris de neige
dans le silence obscur de ton front.

Ay ! Ay ! Ay ! Ay !
Prends cette valse du : « Je t’aime toujours. »
 
À Vienne je danserai avec toi
costumé avec
une tête de fleuve.
Regarde mes rives de jacinthes !
Je laisserai ma bouche entre tes jambes,
mon âme dans des photographies et des lys ;
et dans les ondes obscures de ta démarche
je veux, mon amour, mon amour, laisser,
violon et sépulcre, les rubans de la valse.

 
 
 
 

Pequeño vals vienés
F. Garcia Lorca

En Viena hay diez muchachas,
un hombro donde solloza la muerte
y un bosque de palomas disecadas.
Hay un fragmento de la mañana
en el museo de la escarcha.
Hay un salón con mil ventanas.

¡Ay, ay, ay, ay!
Toma este vals con la boca cerrada.

Este vals, este vals, este vals,
de sí, de muerte y de coñac
que moja su cola en el mar.

Te quiero, te quiero, te quiero,
con la butaca y el libro muerto,
por el melancólico pasillo,
en el oscuro desván del lirio,
en nuestra cama de la luna
y en la danza que sueña la tortuga.

¡Ay, ay, ay, ay!
Toma este vals de quebrada cintura.

En Viena hay cuatro espejos
donde juegan tu boca y los ecos.
Hay una muerte para piano
que pinta de azul a los muchachos.
Hay mendigos por los tejados.
Hay frescas guirnaldas de llanto.

¡Ay, ay, ay, ay!
Toma este vals que se muere en mis brazos.

Porque te quiero, te quiero, amor mío,
en el desván donde juegan los niños,
soñando viejas luces de Hungría
por los rumores de la tarde tibia,
viendo ovejas y lirios de nieve
por el silencio oscuro de tu frente.

¡Ay, ay, ay, ay!
Toma este vals del “Te quiero siempre”.

En Viena bailaré contigo
con un disfraz que tenga
cabeza de río.
¡Mira qué orilla tengo de jacintos!
Dejaré mi boca entre tus piernas,
mi alma en fotografías y azucenas,
y en las ondas oscuras de tu andar
quiero, amor mío, amor mío, dejar,
violín y sepulcro, las cintas del vals.

Federico García Lorca
Poeta en Nueva York (1929-30)

30 commentaires:

  1. très surréaliste en effet et j'ignorais totalement l'origine de la chanson de L Cohen que j'ai mille fois écouté et qui est encore sur ma playliste actuelle

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    1. Voilà que tus ais une chose de plus :-))
      Bonne soirée Dominique

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  2. C'est toujours une frustration de ne pas comprendre les paroles d'un air qui nous berce, qui nous enchante...la surprise peut être déroutante,"surréaliste" comme tu dis :-)
    Merci pour ta traduction, Colo !
    Bises pluvieuses mais printanières quand même :-)

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    1. J’aimais l'air, la voix de L Cohen, mais à l'époque autant l’anglais que l'espagnol étaient des mystères pour moi...je n'ai pas été déçue cette fois, mais parfois en effet!!!
      Bonne soirée, un beso pas pluvieux.

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  3. J'étais loin d'imaginer un texte aussi poétique et aussi riche, et même de Garcia Lorca !!!
    La voix chaude de Léonard Cohen suffisait à nous plonger dans une douce mélancolie.
    Merci beaucoup de nous faire découvrir l'originalité de cette valse viennoise, Colo.

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    1. Avec plaisir Tania, si tu as le temps, écoute la façon, très sensible et nuancée, dont la chante Ana Belén.
      Bonne soirée.

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    2. Je viens de l'écouter en lisant les paroles, c'est superbe aussi, merci !

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    3. Contente que cette interprétation en espagnol te plaise aussi.
      Merci d'être revenue.

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  4. ah ben ça alors! je trouvais en effet les paroles un peu "surréalistes", mais le "we all live in a yellow submarine" me le semblait tout autant, alors je n'ai jamais cherché qui avait écrit les paroles!
    merci Colo!

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    1. Ah, tu me fais rire !
      C'est vrai que le yellow submarine....

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  5. J'aime Léonard Cohen (tout : le poète, l'écrivain, le chanteur, l'homme) et Garcia Lorca.
    Pourtant je ne faisais pas le lien.
    Merci !

    Merci aussi pour la version d'Ana Belen (que je ne connais pas assez).
    Une découverte - encore une !

    Douce soirée,
    Pierre.

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    1. Bonsoir Pierre,


      Le lien n’est pas évident du tout, pas étonnant que tu ne laies pas fait!Ana Belén, je n'aime pas toutes ses chansons, mais ici elle me semble avoir vraiment trouvé la façon, le ton justes pour chanter ce poème.

      Bonne soirée, amicalement !

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  6. J'adore cette chanson, sans en comprendre les paroles. Et bien voilà, c'est fait et j'étais loin de me douter de son contenu. Je ne connaissais pas non plus cet aspect de Garcia Lorca. C'est un bon début pour une journée ensoleillée (mais toujours froide chez moi, brrrrr). Bises Colo.

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    1. Ah mais je t'envoie avec plaisir quelques degrés Aifelle!

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  7. Grand merci Colo pour ce regard (et cette oreille) renouvelée sur une mélodie que j'adore...
    Amicalement

    ANNE

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    1. Une interprétation un peu différente et pleine de nuances, je trouve.
      Bonne journée Anne, merci.

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  8. Merci pour la traduction, je vais ressortir mon "33" tours pour écouter la chanson...

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    1. Ah, tu as encore une platine ?
      J'aimerais bien réécouter certains de nos 33"" mais...
      Bon week-end !

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  9. Un seul commentaire : merveilleux ! Merci

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  10. Merci Colo d'avoir fait ces liens et de nous les offrir !
    Je ne savais pas qui avait écrit les paroles...et c'est superbe aussi en Espagnol !
    Belle journée et un Besos !

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    1. Ana Belén est une "grande dame" de la chanson espagnole, contente que cela te plaise!
      Bon dimanche, un beso de sol !

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  11. Aaaaah la voix chaude de Cohen; je découvre cette valse et elle va me changer de "Dance me to the end of love " que j'écoute parfois en boucle.
    https://www.youtube.com/watch?v=2zjLBWnZGTU

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    1. Une voix envoûtante, c'est vrai. J'espère pour toi que the end of love n'arrivera pas trop vite;-))

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  12. Merci chère Colo pour la magnifique chanson de Léonard Cohen et sa merveilleuse voix chaude. J'apprécie aussi Ana Belén. Grand merci pour la traduction. C'est superbe :-)
    Je te souhaite un bel après-midi, j'espère ensoleillé car la pluie est chez nous.
    Je t'embrasse ♥

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    1. Bonjour Denise, merci pour cet enthousiasme ! Ça me fait plaisir.
      Après plusieurs jours de pluie, soleil ce matin mais pas chaud du tout, brrr.
      Un beso Denise

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  13. C'est toujours mieux quand on a les paroles et qu'en plus elles sont traduites en Français. C'est très intime cette chanson. Merci beaucoup.

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    1. Avec plaisir Élisabeth. soleil aujourd’hui ici, enfin !

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