Ce poème m’a émue, m'a fait penser à ma très vieille amie, Margarita, qui est analphabète.
Este poema me conmovió, me hizo pensar en mi amiga, muy mayor, Margarita, que es analfabeta.
Antònia Vicens nació en Santanyí (Mallorca) en
1941. Es novelista y poeta.
Née à Santanyí (Mallorca) en 1941, elle est romancière et poète.
Née à Santanyí (Mallorca) en 1941, elle est romancière et poète.
Il
avait toujours mal aux pieds
Les
pieds le faisaient toujours souffrir
mon
père.
C’est
en boitant qu’il parcourait tous les magasins de chaussure
à
la recherche de souliers confortables qui l’aideraient
à
supporter le poids de toutes les blessures
déchirements
et coupures
que
la mer lui avait faits.
Il
n’en trouva jamais. Il a dû s’en aller
pieds
nus avec sa montre et son couteau
à
couper le pain, à couper les larmes, dans la poche de la veste et
la
figure blanche comme l’écume des vagues
tant
de fois surfées.
Toujours
il me le disait:
Je
n’ai pas eu d’enfance.
Il
ne se l’ôtait pas de la tête:
J’ai
appris à écrire mon nom à la
guerre
Sifflaient
les balles glissaient les étoiles
de
sang quand j’ai appris à écrire mon nom.
Je
ne voulais pas être un aide-maçon quelconque
Et
ma mère disait :
C’est
un bel homme. Dommage
qu’il
ne sache pas écrire. Toi
tu
dois aller à l’école Antonia.Tu
ne
dois pas être une ignorante comme ton père, ma fille.
Et
le bleu de ses yeux se répandait sur ses joues quand,
diluvienne,
elle
pleurait son absence.
(Traduction Colo)
LOS
PIES SIEMPRE LE DOLÍAN
Los
pies siempre le dolían
a
mi padre.
Cojeando
recorría todas las zapaterías
buscando
unos zapatos bastante cómodos que lo ayudaran
a
sobrellevar el peso de todos los daños
los
desgarros y los cortes
que
el mar le había hecho.
Nunca
los encontró. Tuvo que marcharse
descalzo
con el reloj de pulsera y el cuchillo
de
rebanar pan de rebanar lágrimas en el bolsillo de la chaqueta y
una
cara blanca como la espuma de las olas
que
tantas veces montó.
Me
lo decía siempre:
No
tuve infancia.
No
se lo sacaba de la cabeza:
Aprendí
a escribir mi nombre en el frente.
Chillaban
balas se deslizaban estrellas
de
sangre cuando yo aprendía a escribir mi nombre.
No
quería ser un peón cualquiera.
Y
decía mi madre:
Es
un hombre apuesto. Lástima
que
no sepa escribir. Tú
tienes
que ir a la escuela Antònia. No
tienes
que ser un ignorante como tu padre hija.
Y
el azulete de los ojos se le esparcía por las mejillas cuando
diluviana
lloraba
su ausencia.
*
Traducción de Carlos Vitale*L'original en catalan.
ELS PEUS SEMPRE LI
FEIEN MAL /// Els peus sempre li feien mal / al pare. / Ranquejant
recorria totes les sabateries / cercant unes sabates prou còmodes
que l’ajudessin / a dur el pes de tots els traus / els treps i els
talls / que la mar li havia fet. / No les va trobar mai. Va haver
d’anar-se’n / descalç amb el rellotge de polsera i el ganivet /
de llescar pa de llescar llàgrimes dins la butxaca del gec i / una
cara blanca com l’escuma de les ones / que tantes vegades va
muntar. / M’ho deia sempre: / No vaig tenir infància. / No s’ho
treia del cap: / Vaig aprendre a escriure el meu nom al front. /
Giscaven bales lliscaven estrelles / de sang quan jo aprenia a
escriure el meu nom. / No volia ser un peó qualsevol. / I deia la
mare: / És un home plantós. Llàstima / que no sàpiga escriure. Tu
/ has d’anar a l’escola Antònia. No / has de ser una ignorant
com ton pare filla. / I el blavet dels ulls se li escampava per les
galtes quan / diluviana / plorava la seva absència.
Une immense émotion pour moi ce matin à la lecture de ce poème. Je n'ai même pas assez de mots pour le dire.
RépondreSupprimerComme je vous comprends!
Supprimerterriblement touchant!
RépondreSupprimermerci Colo
Merci à toi Adrienne, bonne journée.
SupprimerNe pas savoir lire et écrire, c'est un fardeau pour bien des gens. Mais dans leurs yeux, on voit déjà tellement de choses que parfois, il n'y a pas besoin de mots. Merci pour ce magnifique poème très émouvant. Belle journée.
RépondreSupprimerBonjour Dédé, tu as raison, la vie est très compliquée quand on est analphabète. Ma vieille amie a développé une mémoire extraordinaire pour pallier cette terrible carence.
SupprimerMerci à toi pour cette visite matinale, ton appréciation. Bonne journée!
On s'imagine que le pouvoir de lire et écrire est acquis, pourtant de plus en plus de gens démunis sont quasi analphabètes. Ce poème est très émouvant. Merci et bonne journée. Bises
RépondreSupprimerOui, ces faux analphabètes savent lire mais ne comprennent pas ce qu'ils lisent, tu as raison, il y en a de plus en plus...c'est désolant pour ne pas dire plus.
SupprimerBonne journée à toi aussi Kwarkito, besos.
Emouvant poème! C'est pour dire la qualité de ta traduction. J'aime beaucoup aussi tes coupures à la ligne. J'imagine tes longues réflexions là-dessus. C'est tout un art, en plus du choix des mots.
RépondreSupprimerBonjour An, oui, où couper est un casse-tête, merci merci pour tes mots.
SupprimerBonne journée, en couleurs!
C'est très émouvant, on a tous rencontré dans notre vie et dans notre cœur des femmes ou des hommes qui vivaient ces manques avec toutes les difficultés que cela entraine... Les mots sont admirables, merci Colo. Lumineuse journée à toi. brigitte
RépondreSupprimerUn jour ma vieille amie m'a raconté qu'on lui apportait une lettre et qu'elle devait signer un reçu. Elle a demandé au jeune homme s'il avait le temps, surpris il a dit oui, Elle l'a fait rentrer dans sa cuisine, l'a fait asseoir, et laborieusement a dessiné quelque chose qui était supposé être son nom...Elle riait, mais que de difficultés, oui!!
SupprimerBonne journée chère Brigitte.
très émouvant un bel hommage à son père, cela me fait penser à mon grand père qui lui aussi travailla dur au travail à 10 ans
RépondreSupprimerJ'ai pensé la même chose, superbe hommage.
Supprimerà 10 ans, autres temps...dire que certains disent et pensent qu'on vivait mieux avant!
C'est incroyablemnent touchant et admiratif, plein d'amour, d'éblouissement... et d'envie de prendre dans ses bras ce père qui boitait des pieds et de l'écriture...
RépondreSupprimerBoiter de l'écriture...quelle belle invention langagière!
SupprimerC'est un poème extrêmement touchant et les deux tableaux qui l'accompagnent sont parfaits.
RépondreSupprimerMerci Aifelle.
SupprimerQue ce poême est chargé d'émotions! Bisous
RépondreSupprimerBeaucoup de tendresse dans ce portrait, besos Val.
SupprimerTexte touchant. La pauvreté et l'analphabétisme vont de pair.
RépondreSupprimerMais l'analphabétisme émotionnel, un mal de civilisations évoluées opulentes ?
Il n'est pas général, mais oui, peut-être-
SupprimerMerci d'être passé.
Mal aux pieds, mal d'enfance, comme la poétesse nous fait ressentir ces douleurs et aussi cet amour pour son père. Merci pour l'original en catalan - tant de différences dans les sonorités, on l'entend déjà en le lisant.
RépondreSupprimerBonne après-midi, Colo.
Une belle langue, le catalan, il me plaît de plus en plus (depuis que je le comprends bien:-))
SupprimerBonne soirée Tania.
c'est vraiment beau, merci colo
RépondreSupprimerMerci à toi Niki, bonne soirée.
SupprimerTrès émouvant!
RépondreSupprimerUn poème à lire et relire
je suis bien d'accord avec toi Marie.
SupprimerQué bonito homenaje a Margarita, Mamá...
RépondreSupprimerSe lo merece, ¿verdad hija?
SupprimerMerci Colo de nous avoir traduit ce texte magnifique et si touchant !
RépondreSupprimerC'est pour moi une découverte que cette poétesse majorquine, elle m'a touchée, et pas seulement dans ce seul poème.
SupprimerBonne journée Fifi!
Bon Soir Colo. On ne sort pas indemne de la lecture de ce poème. Il nous rappelle tant de choses, tant d'anciens qui n'avaient qu'une vie de travail.L'Éducation est une avancée que nos jeunes ne mesurent pas forcément. Il n'y a pas si longtemps que beaucoup signaient avec une croix.
RépondreSupprimerLes mots sont forts pour expliquer une vie de peu, mais si digne et si remplie et ce désir que sa fille s'en sorte, aille à l'école...
Je suis sûre que ton amie analphabète a un cœur gros comme ça et qu'elle a développé bien d'autres qualités.Tu lui rends un bel hommage par ce billet fort, très fort, qui émeut aux larmes et ses illustrations, dont la première, très forte aussi.
Bravo Colo.
Je t'embrasse bien fort.
PS: j'ai lu aussi le poème en catalan et j'y reconnais là, à la lecture(la prononciation est sans doute une autre affaire), des mots proches de mon occitan. Bref je ne suis pas dépaysée par certains passages.
RépondreSupprimerBonsoir Maïté, tu as tout à fait raison, le catalan et l¡occitan ont beaucoup en commun!
SupprimerQuant au poème, je vois qu'il t'a émue autant que moi.
Merci, bonne soirée, je t'embrasse
D'une très profonde simplicité, gage d'authenticité, et d'autant plus émouvant.
RépondreSupprimerTrès simple, oui, comme si elle racontait tranquillement.
SupprimerJ'aime la simplicité de l'évocation de l'image du père. A travers ce poème on saisit la chance d'une fille qui reçut éducation. Cette chance qui lui donne la possibilité d'honorer son père et mère en laissant un témoignage fort émouvant.
RépondreSupprimerBonjour Sergio, on est loin de "mon père ce héros au regard si doux" de V. Hugo en effet, c'est comme un souvenir, un poème qui coule de source, se raconte.
SupprimerBon week-end!
Tu as bien fait de garder la boule verte. J'espère qu'elle mettra gaieté, chaleur et lumière dans ton foyer pour les fêtes de fin d'année.
RépondreSupprimerSûrement Chinou, je te souhaite d'agréables fêtes
SupprimerWouah ! C'est fort! Très fort !
RépondreSupprimerUne vie de labeur, une mère qui souhaite que son enfant ne suive pas les traces de son père (et on la comprend!)
Quelle émotion pour cette fin d'année !
Bonne soirée à toi !
Bonnes fêtes Enitram!
SupprimerMerci Colo pour ces pépites que tu nous offre.douce nuit à toi et autres douceurs
RépondreSupprimerMerci à toi et bonne journée, heureuse que tu aimes ce poème.
SupprimerMoi aussi, je t'adresse ts mes voeux pour un joyeux réveillon et journée de Noël. Gros bisous
RépondreSupprimerMerci Val.
SupprimerQuel magnifique poème, Colo, qui me rappelle tant de gens rencontrés au fin fond de la campagne. Un voisin de la maison où nous passions les vacances entre autres, aux même regard bleu et dont la finesse était aussi profonde que les callosités de ses mains. Bonne fin d'année , chère Colo !
RépondreSupprimerIl est des rencontres, si profondes, qu'on les garde à jamais dans les yeux et le coeur.
SupprimerEncore quelques jours avant le 1º, repose-toi surtout.