Nancy Morejón (Cuba 1944- )
Biograpie : https://www.marche-poesie.com/morejon/
Biografía: https://www.isliada.org/poetas/nancy-morejon/
Peut-être, mais peut-être pas, avez-vous lu ou entendu son poème le plus connu : Femme Noire. Fort attachée aux origines africaines des siens, elle est la voix des ancêtres qui souffrirent l’esclavage et atterrirent à Cuba ou ailleurs. Ce poème, si vous le lisez, visualise des images très fortes. Le ton y est intense et courageux.
Tal vez, o tal vez no, habéis leído o oído su poema más conocido: Mujer Negra. Muy ligada a los orígenes africanos, es la voz de sus ancestros quienes sufrieron por esclavitud. El poema visualiza imágenes muy fuertes y tiene un tono intenso y valiente.
Billet modifié le 15-4-2021.
Femme Noire
Je continue de respirer l'écume de la mer qu'on me fit traverser.
La nuit a disparu de ma mémoire
mais l'océan lui-même ne pourrait s'en souvenir.
Pourtant je n'oublie pas le premier pélican que j'aperçus.
Les nuages, hauts, comme d'innocents témoins oculaires.
Je n'ai pas oublié, je crois, mon rivage perdu ni la langue de mes ancêtres.
On m'a laissée ici et c'est ici que j'ai vécu.
C'est pour avoir travaillé dur
que je suis née ici une seconde fois.
Grande fut l'épopée mandingue qu'alors je tentai d'évoquer.
Je me suis révoltée.
J'ai brodé la casaque de Mon Maître et je lui ai donné un fils,
mon fils, qui n'a jamais porté de nom.
Et Mon Maître a péri aux mains d'un respectable lord anglais.
Je suis partie.
Dans ce pays on m'a frappée, nez contre terre, à coups de fouet.
Mes rames ont fendu les eaux de toutes ses rivières.
Sous son soleil j'ai semé et j'ai récolté ce qu'on refusait à ma bouche.
Je n'avais pour maison que la bâtisse des esclaves
construite avec les pierres apportées par mes mains
sans que je cesse de chanter au rythme naturel des oiseaux.
Je me suis rebellée.
Sur cette terre j'ai palpé le sang humide
et les os pourris de tant d'autres
amenés ici, ou ailleurs, comme moi.
Je n'ai plus jamais rêvé de la route de Guinée.
Était-ce la Guinée ? Ou le Bénin ? Madagascar ? Ou le Cap-Vert ?
J'ai travaillé plus dur encore.
J'érigeais avec plus de foi mon chant millénaire et mon espoir.
Je préparais mon propre monde.
Je me suis enfuie dans les bois.
J'eus pour liberté le camp retranché
avant de chevaucher avec l'armée de Maceo.
Il me fallut attendre un siècle
pour qu'après de mes descendants,
du haut d'une montagne bleue
nommée la Sierra Maestra
je descende en finir avec l'argent, les usuriers,
les généraux et les bourgeois.
J'existe désormais : aujourd'hui pour la première fois nous possédons et nous créons.
Il n'est plus rien qui ne soit nôtre.
Nôtre est la terre.
Nôtre la mer, nôtre le ciel.
Nôtres, la magie, les chimères.
Mes frères, mes égaux, je vous vois danser
autour de l'arbre que nous avons planté pour le communisme.
Et dont le bois prodigue maintenant retentit.
traduction de Claude Couffon issue de son anthologie bilingue Poésie cubaine du XXe siècle (1997)
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Éloge de la danse
Nancy Morejón.
Le vent souffle
Comme un enfant
Et les airs halètent
Dans la jungle, dans la mer.
Avec le vent,
Tu souffles sur la flamme froide:
Voiles de lune, tu souffles toi
Et les fleurs et la mousse
Battent dans le vent.
Et le corps
Au fil de l’eau
Au fil du vent
Dans l’éternel signe de la danse.
(Trad: Colo)
Santiago Ríos (Costa cercana a La Habana, acuarela)
http://www.santirios.com/Espannol/ViajeCuba.html
Elogio de la Danza
A Leo Brouwer
El
viento sopla
Como un niño
Y los aires jadean
En la
selva, en el mar.
Entras y sales
Con el viento,
Soplas
la llama fría:
Velos de luna soplas tú
Y las flores y el
musgo
Van latiendo en el viento.
Y el cuerpo
Al filo
del agua
Al filo del viento
En el eterno signo de la danza.
no woman no cry, enfin un truc que je connais, et encore! ce n'est que grâce à une copine qui avait un grand frère ;-)
RépondreSupprimerOh tu n'as pas suivi Bob Marley,il n'est pas trop tard, jamais trop tard.
SupprimerBonne journée Adrienne.
Des images fortes et du rythme, oui, chez cette poétesse. Merci, Colo & bonne journée.
RépondreSupprimerUne combattante cette dame, et son énergie, sa détermination passent dans ses écrits. Surtout dans Femme Noire". Merci, bonne journée à toi aussi.
SupprimerJe n'avais lu qu'une partie du poème, merci de le citer en entier.
SupprimerIl en vaut la peine, en effet Tania
Supprimerrien que pour ce visage et ce sourire merci à toi
RépondreSupprimerUne grande douceur dans ce visage, oui !
SupprimerIl y a dans sa poésie une puissance particulière.
RépondreSupprimerUne énergie, une force, un ton très décidé.
Merci pour - une fois encore - cette découverte.
Pierre.
Avec grand plaisir Pierre-Geontran
SupprimerTrès beau poème "Femme noire". Je ne le connaissais pas, c'est fort. Il y a aussi un bel élan dans le poème sur la danse. Bonne fin d'après-midi.
RépondreSupprimerJ'aurais dû suivre ma première idée et mettre Femme Noire plutôt que l'hommage à Bob Marley.
SupprimerC'est vrai qu'il est puissant ce poème, si collé à la réalité.
Bonne semaine Aifelle
Merci pour ces trois poèmes Colo, une belle découverte !
RépondreSupprimer"Femme noire" par sa construction narrative et la chute déterminée de la dernière phrase dégage force et puissance.
"Éloge de la danse" lui virevolte, nous entraine dans un tourbillon. Un bonheur !
Courage pour le potager...je t'embrasse.
Merci !
SupprimerComme je le dis à Aifelle, j'aurais dû, peut-être vais-je changer le billet d'ailleurs, Femme Noire, tu ne penses pas?
Je t'embrasse aussi.
Je suis allée lire le poème Femme noire : que c'est magnifique. J'aime aussi celui sur la danse. Je ne connaissais pas cette poétesse. Merci pour cette lecture du matin. Une leçon de courage, d'une certaine façon, que cette poésie : envers et contre tout, écrire et danser...
RépondreSupprimerBonne journée. Je t'embrasse.
Bonjour Marie, je viens de modifier le billet et d'y publier le poème Femme Noire. Je pensais qu'il était trop connu, mais..
SupprimerNous pouvons tous en sortir une leçon, bien sûr!
Un beso.
très beau billet - je ne connaissais pas du tout cette artiste, merci colo
RépondreSupprimerAvec plaisir Niki
SupprimerTu as bien fait de compléter ton billet avec le texte de "Femme noire". Voisinant avec "Éloge de la danse", l'ensemble dégage une grand force. Comme le visage de cette femme qui exprime à la fois la douceur et une grande force de vie, toutes les deux admirables.
RépondreSupprimerPS
Il me semble voir une faute de frappe qui s'est glissée dans la quatrième strophe :
"Sous son soleil j'ai semé et j'ai révolté ce qu'on refusait à ma bouche."
Probablement "récolté" au lieu de "révolté" ?
Merci Colo pour cette nouvelle et belle découverte.
Bises printanières
Tu as tout à fait raison Fifi, c'est récolté bien sûr, merci.
SupprimerBonne après-midi, besos por toi.
Merci Colo pour ces deux magnifiques poèmes et celui de "Femme noire" est très prenant. Quel courage.
RépondreSupprimerBisous et douce fin de journée.
Bonjour Denise, oui il est bon et important de parler de toutes ces vies!
SupprimerBon week-end, un beso.
Merci pour cette découverte. Cela ravive mon désir d'aller à Cuba. j'aime la chute du poème, la reconquêten quelle merveille!
RépondreSupprimerSe rendre à Cuba et remonter l'histoire des habitants, un projet intéressant.
SupprimerSans parler des couleurs et de la musique...
Bonne semaine Zoë.
Sacrée histoire! Je te souhaite une belle journée. Ici, soleil mais pas encore bien chaud le matin. Bisous
RépondreSupprimerTerrible histoire, oui.
SupprimerBonne semaine Val, très frisquet ici aussi.
Un courage magnifique, des mots d'une force incroyable... Que de combats à mener dans l'existence humaine, merci Colo de nous offrir ces mots et cette voix si digne. Bises printanières. brigitte
RépondreSupprimerImaginer ce qu'ont vécu ces esclaves est déjà terrible. À travers les récits oraux, sans doute, d'une génération à l'autre, ces histoires, plus ou moins déformées, sont arrivées jusqu'à elle.
SupprimerMerci de ta visite, un beso.
Des poèmes très forts.
RépondreSupprimerQui mériteraient d'être dits pour sentir encore plus leur force.
3Femme Noire" est un texte qui monte en intensité, avec , comme il a été si bien dit , des images très fortes et des paliers franchis jusqu'à l'ultime libération.
Le deuxième poème est envoûtant aussi.
Merci Colo de m'avoir fait connaître cette grande dame. J'ai vu dans sa biographie qu'elle s'était
intéressée à Nicolas Guillén,un poète que j'aimais bien en son temps.
Bisesssssssssssss Colo ET une excellente journée: voilà ce que je te souhaite.
Bonjour Maïté, contente de te lire!
SupprimerTu as raison, Nicolas Guillen fut le premier poète cubain noir, un précurseur, elle s'appuie sur lui en quelque sorte pour se lancer. Des poèmes forts, tous les deux. Osés sans doute aussi.
Je te souhaite également une excellente journée, pluvieuse ici. Besos
Merci beaucoup pour la découverte, on ne connait pas assez les poèmes des esclaves et de leurs descendants !
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