5 nov. 2011

García Lorca, la peine noire / Romance de la Pena negra

Federico García Lorca, j’y reviens encore et encore.

Aujourd’hui ce poème qui réunit ses thèmes de prédilection : les gitans, les chevaux, la nature, la mer, la tristesse…

Siempre vuelvo a Federico García Lorca.

Hoy este poema que reúne sus temas de predilección: los gitanos, los caballos, la naturaleza, el mar, la tristeza…

Romance de la peine noire

Les coups de bec des coqs
creusent, cherchent l’aurore,
quand de la colline sombre
descend Soledad Montoya.
De cuivre jaune, sa chair
sent le cheval et l’ombre.
Ses seins, noires enclumes,
gémissent des chansons rondes.
Soledad: Qui cherches-tu
seule et à cette heure?
Je cherche qui je veux,
dis-moi, si cela t’importe?
Je cherche ce que je cherche,
ma joie et ma personne.
Soledad de mes chagrins,
cheval qui s’emballe,
finit par trouver la mer
et les vagues le dévorent.
Ne me rappelle pas la mer
car la peine noire pousse
au pays des olives
sous la rumeur des feuilles.
Soledad, comme tu es triste !
Quelle peine désolante !
Tu pleures du jus de citron
si aigre à l’attente et à la bouche.
Que ma peine est grande ! Je traverse
ma maison comme une folle
traînant mes nattes,
de la cuisine à l’alcôve.
Quelle tristesse ! Ma chair
et mon linge deviennent noir jais.
Aïe ! Mes chemises de fil !
Aïe ! Mes cuisses de pavot !
Dans la source aux alouettes,
Soledad, lave ton corps
et laisse ton cœur
en paix, Soledad Montoya.

****
Tout en bas chante le fleuve:
volant de ciel et de feuilles.
De fleurs de citrouille,
l’aube se couronne.
Oh ! Peine des gitans !
Peine pure et toujours seule.
Oh ! Peine de source occulte
et d’aurore lointaine !

(traduction Colo/ MAH)

Voici une version chantée, flamenco: émotions.

Romance de la pena negra de Federico García Lorca

Las piquetas de los gallos
cavan buscando la aurora,
cuando por el monte oscuro
baja Soledad Montoya.
Cobre amarillo, su carne,
huele a caballo y a sombra.
Yunques ahumados sus pechos,
gimen canciones redondas.
Soledad, ¿por quién preguntas
sin compaña y a estas horas?
Pregunte por quien pregunte,
dime: ¿a ti qué se te importa?
Vengo a buscar lo que busco,
mi alegría y mi persona.
Soledad de mis pesares,
caballo que se desboca,
al fin encuentra la mar
y se lo tragan las olas.
No me recuerdes el mar,
que la pena negra, brota
en las tierras de aceituna
bajo el rumor de las hojas.
¡Soledad, qué pena tienes!
¡Qué pena tan lastimosa!
Lloras zumo de limón
agrio de espera y de boca.
¡Qué pena tan grande! Corro
mi casa como una loca,
mis dos trenzas por el suelo,
de la cocina a la alcoba.
¡Qué pena! Me estoy poniendo
de azabache carne y ropa.
¡Ay, mis camisas de hilo!
¡Ay, mis muslos de amapola!
Soledad: lava tu cuerpo
con agua de las alondras,
y deja tu corazón
en paz, Soledad Montoya.
***
Por abajo canta el río:
volante de cielo y hojas.
Con flores de calabaza,
la nueva luz se corona.
¡Oh pena de los gitanos!
Pena limpia y siempre sola.
¡Oh pena de cauce oculto
y madrugada remota!

26 commentaires:

  1. "la peine noire pousse au pays des olives sous la rumeur des feuilles " Prémonition ? En écrivant ces vers, sa sensibilité de poète pressentait-elle une autre peine noire ?

    RépondreSupprimer
  2. "Peine pure et toujours seule" - tu reviens à Lorca et nous t'accompagnons des yeux, des oreilles et du coeur.

    RépondreSupprimer
  3. magnifique. Une interprétation savourée religieusement.Merci pour ce moment de grâce.

    RépondreSupprimer
  4. **Sable, parfois les petites feuilles des oliviers deviennent noires, oui.
    Que de peines...

    **Tania, merci pour cet accompagnement!

    **Maïté, il existe, tu imagines bien, plusieurs interprétations, celle-ci me fait frisonner. Merci de ton écoute attentive.

    RépondreSupprimer
  5. qué maravilla. Muchas gracias por compartirlo con nosotros. Besos, muchos besos

    RépondreSupprimer
  6. Merci pour cette si belle romance de la pena negra, quel bel instant je viens de passer avec Lorca ...
    Et ce jus de citron pleuré ...
    Besos

    RépondreSupprimer
  7. **Anonyme que me manda muchos besos....debes ser Dani. ¡Gracias guapo! Mil besos para ti también.

    **Verónica, les fleurs de citrouille vont-elles également vers la mer?
    Avec Lorca on n'est jamais déçu...bonne soirée.

    RépondreSupprimer
  8. Lorca, Manuel y Alba Molina: ¡conmovedor romance!

    Bon dimanche, Colo, bonne semaine.

    RépondreSupprimer
  9. Merci de nous faire partager ce billet.

    Yo tambien siempre vuelvo a Federico Garcia Lorca

    Bon dimanche

    RépondreSupprimer
  10. **Hélder, hoy, más vale inundarse en un romance que fuera...¿Arca de Noe o Rigoletto?
    Una semana agradable para Usted también.

    **Alba, nos commentaires se sont croisés je crois!
    Lorca, source inépuisable d'images, de mots; puissance évocatrice, oui, oui!
    Bonne journée.

    RépondreSupprimer
  11. En effet, cette chanson c'est du frisson... et même la mer est dévoreuse.
    Veel liefs

    RépondreSupprimer
  12. Hommage d'Antonio Machado :

    - "On le vit marchant entre des fusils
    Par une longue rue
    Qui donnait sur la campagne froide
    de l'aube, encore sous les étoiles.
    Ils tuèrent Federico
    Alors que pointait la lumière.
    Le peloton de bourreaux
    N'osa pas le regarder au visage.
    Tous fermèrent les yeux;
    Ils prièrent...Dieu lui-même ne te sauverait pas...
    -
    Federico tomba mort
    Du sang sur le front, du plomb dans les entrailles.
    ... C'est à Grenade que le crime eut lieu,
    Vous savez - pauvre Grenade ! - dans sa Grenade !"

    RépondreSupprimer
  13. **MH, il existe une adaptation en français qui n'est pas mal du tout:
    http://www.myspace.com/yannickjamin/music/songs/romance-somnambule-80087907
    Kusjes voor U.

    **JEA, bel hommage, digne te tragique, oui; je me permets d'y ajouter la fin:
    "On les vit s'éloigner...
    Taillez, amis,
    Dans la pierre et le rêve, à l'Alhambra,
    Une tombe au poète,
    Sur une fontaine, où l'eau pleure,
    et, éternellement dise :
    Le crime eut lieu à Grenade ... dans sa Grenade !"

    RépondreSupprimer
  14. Quel poème magnifique mais tellement triste !

    RépondreSupprimer
  15. Vous m'avez donné envie d'en savoir plus sur lui !

    RépondreSupprimer
  16. **MH, une erreur s'est glissée sous mes doigts, pardon...l'adresse correcte est celle-ci: http://www.myspace.com/yannickjamin/music/songs/romance-de-la-peine-noire-80087999

    **Danièle: ils sont rarement gais les écrits de Lorca, tu as raison. Peines de gitans...

    **Cédric, pas de déceptions avec Lorca, un monde bien à lui. Bonnes découvertes.

    RépondreSupprimer
  17. Coucou amielointaine,
    Je ne connaissais pas ce poéme, je le relis pour la 3ième fois, cette tristesse me touche. Tu sais Colette tes poémes que tu déniches "derrière les fagots" me rappelle le même talent que déploie ma cantatrice préférée Cécilia BARTOLI qui déniche des perles musicales. Bravo pour ce talent et biz bien cordiale

    RépondreSupprimer
  18. Les flores de calabaza illuminent ce poème et la peine noire semble chasser par ce soleil en forme de fleur qui se lève après une nuit tourmentée.
    Magnifique poème. Merci Colo.

    RépondreSupprimer
  19. **Salut Veb, je partage ton admiration pour Cecilia Bartoli et ses découvertes! Moi c'est pas du talent tu sais, c'est de la lecture!!
    Merci pour tout, je t'embrasse.

    **Euterpe, tu as raison, la nature, la source aux alouettes, atténuent les peines; ici et ailleurs!
    Belle semaine à toi!

    RépondreSupprimer
  20. Dos versos me encantan:

    Vengo a buscar lo que busco,
    mi alegría y mi persona.

    Ademas, no son tan tristes como los otros.

    Un beso

    RépondreSupprimer
  21. **Delphine, un poco de orégano en el monte...
    Un beso.

    RépondreSupprimer
  22. il y a des jours où la poésie est à l'unisson de la pensée, le poème est alors comme une extension de soi
    malgré tout pour le moment je ne pleure pas du jus de citrion ! tout n'est pas perdu

    RépondreSupprimer
  23. **Chère Dominique, je t'envoie pèle-mêle un chant d'alouette, quelques olives à l'origan et un énorme bouquet de fleurs de citrouille.
    Je t'embrasse.

    RépondreSupprimer
  24. C'est beau comme la peine des gitans...

    RépondreSupprimer
  25. Il est des lieux où on revient toujours... chez toi.
    Il est des poètes vers lesquels on se tourne toujours... Federico, entre autres.

    RépondreSupprimer
  26. *Marcelle, un superbe poème, oui. Bonne soirée.

    **Lali, merci, merci! Je passe très souvent chez toi avec délice, plaisir des découvertes.

    RépondreSupprimer