2 déc. 2010

La folle imagination / Esa loca imaginación



http://www.orphia.eu

Julián, un petit garçon du village, a 4 ans et ne veut apprendre ni à lire ni à écrire car, clame-t-il, il sera mécanicien de nuages. C’est lui et son imagination qui m’ont fait repenser à ce passage de « La folle du logis » de l’écrivaine Rosa Montero.

« … dans le travail de romancier il y a quelque chose d’encore plus important que ce tintement de mots, c’est l’imagination, les rêveries, ces autres vies fantastiques et occultes que nous avons tous. Faulkner disait qu’un roman « est la vie secrète d’un écrivain, l’obscure frère jumeau d’un homme ». Et Sergio Pitol, (…) ajoute: « Un romancier est un homme qui entend des voix, ce qui l’assimile à un dément ».

(…) il me semble qu’en réalité cette imagination débridée nous assimile plus aux enfants qu’aux lunatiques. Je crois que les humains, nous entrons tous dans l’existence sans savoir bien distinguer le réel du rêve ; de fait, la vie infantile est en grande partie imaginaire.

Le processus de socialisation, ce que nous appelons éduquer, ou mûrir, ou grandir, consiste précisément à tailler les efflorescences capricieuses, à fermer les portes du délire, à amputer notre capacité à rêver éveillés ; et malheur à celui qui ne saura pas sceller cette fissure entre les deux côtés car il sera probablement considéré comme un pauvre fou.

Le romancier a donc le privilège de continuer à être un enfant, de pouvoir être un fou, de maintenir le contact avec ce qui est informe. « L’écrivain est un être qui n’arrive jamais à devenir adulte », dit Martin Amis dans son beau livre autobiographique Expérience, et il doit bien le savoir car il a tout l’aspect d’un Peter Pan un peu fané qui refuse avec entêtement de vieillir. ».

(Trad : Colo . Extrait de « La folle du logis » R. Montero)

PS : ce billet est pour vous mes amis, blogueurs ou pas, vous qui possédez un brin de folie, un zeste d’enfance, des nuages plein les cheveux.

hhtp://www.villard.com

Julián, un niño del pueblo, tiene 4 años y no quiere aprender ni a leer ni a escribir ya que, dice, será mecánico de nubes. Son él y su imaginación los que me han hecho recordar ese pasaje de “La loca de la casa” de Rosa Montero.

“…en el oficio de novelista hay algo aún más importante que ese tintineo de palabras, y es la imaginación, las ensoñaciones, esas otras vidas fantásticas y ocultas que todos tenemos. Decía Faulkner que una novela “es la vida secreta de un escritor, el oscuro hermano gemelo de un hombre”.Y Sergio Pirol (…) añade:” Un novelista es un hombre que oye voces, lo cual lo asemeja con un demente”.

(…) me parece que en realidad esa imaginación desbridada nos asemeja más a los niños que a los lunáticos. Creo que todos entramos en la existencia sin saber distinguir bien lo real de lo soñado; de hecho, la vida infantil es en buena medida imaginaria. El proceso de socialización, lo que llamamos educar, o madurar, o crecer, consiste precisamente en podar las florescencias fantasiosas, en cerrar las puertas del delirio, en amputar nuestra capacidad para soñar despierto; y ay de aquel que no sepa sellar esa fisura con el otro lado, porque probablemente será considerado un pobre loco.

Pues bien, el novelista tiene el privilegio de seguir siendo un niño, de poder ser un loco, de mantener el contacto con lo informe. “El escritor es un ser que no llega jamás a hacerse adulto” dice Martín Amis en su hermoso libro autobiográfico Experiencia, y él debe saberlo muy bien, porque tiene todo el aspecto de un Peter Pan algo marchito que se niega empeñosamente a envejecer”.

Extracto de “La loca de la casa” R.Montero

24 commentaires:

  1. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

    RépondreSupprimer
  2. Indubitablement, Julián connaît ses classiques — d’Aristophane (LES OISEAUX et Nephelococcygia, c’est-à-dire, la cité aérienne de Coucouville-les-Nuées) à Rabelais (qui a forgé, dans PANTAGRUEL, le mot ‘nephelibate’, «qui va dans les nues»)...
    Joyeux décembre (plein d’imagination fertile), Colo !

    RépondreSupprimer
  3. Quand je sera grand, je sera écrivain, comme Sergio Pitol. Mais y a du boulot.
    En fait, j'étais en train d'écrire ceci, extrait d'un texte à venir sur la résilience:
    "La mémoire bannie comme tous les exilés rentre au bercail et c'est maintenant.Il me souvient que je partais parfois à l'école accompagné d'un amour de parent dans chaque mains. Nous jouions à saute flaques les jours de pluie, tandis que je riais ils m'enlevaient en tirant sur mes bras. J'ai six ans. Je vole au dessus des lacs, elle et lui sont mes ailes. Puis les disputes ont remplacés les rires. Avec la frangine,il devint vite inutile d’écrire avec les vermicelles/alphabet : « papa M maman » plus assez de A de I et de E. Métalangage de SMS bien avant l'heure.
    -Tu préfères ton papa ou ta maman ? ben, ça m’arrange pas il me faut un père et un re-père .
    J’peux pas arrêter le mouvement des planètes avec mes petits bras, mais arrêter de grandir, ça je peux !"
    Marrant comme coïncidence non?

    RépondreSupprimer
  4. Le travail d'un bon romancier est une merveille. Construire une histoire, imaginer un monde qui opère par sa propre logique, c'est incroyable. Merci pour cette reconnaissance de mon brin de folie.

    RépondreSupprimer
  5. -Hélder, je découvre la cité aérienne de Coucouville-les Nuées, quel nom plein de poésie, je vais m'y intéresser, merci!
    Voyons ce que décembre nous offre à tous, amicalement.

    -Alex, étonnant, oui, et très joliment écrit. Il y a aussi la petite-fille d'une amie, 3 ans et demie, qui disait il y a peu:"quand je suis grande je serai un papa". Infinies possibilités d'ailes d'amour. Bonne journée, un besito.

    - Ren-Go, ah, ha, à te lire attentivement...! Je blague...un peu! Bonne semaine amigo.

    RépondreSupprimer
  6. Sa part obscure, son jumeau noir... Cela me fait penser à Julien Green, qui n'a cessé d'explorer ce double de lui-même. Belles illustrations pour ce billet d'imaginaire.

    RépondreSupprimer
  7. Je suis sous le charme des 2 illustrations, tous les enfants voudraient être cette petite fille
    Faulkner savait de quoi il parlait avec sa part d'ombre, j'aime cet idée du double, Pessoa est maître en la matière !
    j'ai lu il y a peu Damasio qui explique comment notre cerveau permet tout cela : l'imagination, ou lorsque les portes du délire comme tu le dis restent ouvertes
    James Barrie devait forcément être de ces romanciers là

    RépondreSupprimer
  8. heureux ceux qui ont résisté au rouleau compresseur. J'ai vu trop d'itinéraires d'enfants brisés par le manque de rêve, d'imagination et de candeur des adultes. Je revendique ma folie douce et mon âme d'enfant qui me permet d'aller où je veux! et tant pis pour ceux qui ne comprennent pas (ou tant mieux?!).
    Allez je retourne à mes flaques d'eau, mon caddie trottinette et mes idées arc-en-ciel (plus rigolotes que les noires!). Si ton petit conducteur de nuages a besoin d'un copilote,dis-le moi, ça me tente!
    je t'embrasse, Colo, et merci pour ton billet.

    RépondreSupprimer
  9. -Tania, oui Julien Green, et aussi celui dont on parle tant ces jours-ci Romain Gary,et ses multiples personnalités. Un beso amiga.

    -Dominique, Faulkner oui, un auteur que certains trouvent rébarbatif mais dans les romans duquel je m'immerge avec facilité.
    Quant aux petites filles...tu fais (encore) parfois des bulles? J'adore ça!

    -Ah Sable! J'ai bien sûr pensé à toi, à tes flaques et ton caddie-trottinette (sport que je pratique avec volupté).
    Nous rouler dans un arc-en-ciel, avec plaisir!
    Je t'embrasse, bon weekend.

    RépondreSupprimer
  10. Je suis partante pour des moments a Coucouville-les-nuees, avec nos caddies-trottinette et plein d'arc-en-ciel. Mieux que notre ile Colo? Bisous. Nadina

    RépondreSupprimer
  11. Moi j'aime ce petit garçon qui veut être mécanicien des nuages. Peut-être qu'un écrivain n'est-il qu'un mécanicien des mots afin de proposer des rêves.

    RépondreSupprimer
  12. « L’écrivain est un être qui n’arrive jamais à devenir adulte » : je n'aime pas trop cette manière de le dire . j'aimerais mieux : l'écrivain est un être qui a su devenir adulte sans brimer sa part d'enfance, sans fermer la source de sa créativité, sans se conformer au modèle de l'adulte inachevé, frustré et souvent démuni face aux jaillissements de la vie, que sont la majorité des adultes (c'est ce que je vois autour de moi bien souvent dans la vraie vie de gens ordinaires que je fréquente)

    RépondreSupprimer
  13. -Nadina, inutile de partir, tu les trouveras partout où tu les imagineras! (attention à tes pieds pour la trottinette! hihi) Je t'embrasse.

    - Damien, sûrement! Jolie formule. Tu sais que je suis aussi une super fan des nuages, alors le petit Julián....Bonne journée ami.

    -K, tu as raison d'introduire cette précision mais je ne crois pas que nous soyons maîtres de cette part de nous.
    J'ignore (mais le sait-on?) ce qui fait que certains enfants échappent en partie à ce que R. Montero appelle "le processus de socialisation" et gardent toute leur vie cette étincelle de créativité, de rire. Tandis que la majorité, tu le dis bien, est fermée "aux jaillissements de la vie".
    Merci pour ces réflexions, je t'embrasse.

    RépondreSupprimer
  14. Comme toi Colo je crois que l'imaginaire ne se cadenasse pas, il se gère tant bien que mal.
    Ce qui est certain et nombre d'écrivains le disent c'est qu'il est un merveilleux bouclier contre la folie !
    Par ailleurs, la créativité n'est pas le seul chemin apte à percevoir "les jaillisements de la vie"... une réception bien réelle de la beauté du monde est également source "d'étincelles" de joie ou de rire, cfr ton blog par ex. ;-))

    Superbes illustrations !

    RépondreSupprimer
  15. Simplemente perfecto. Eres un as, Colo. Mil gracias.

    RépondreSupprimer
  16. -MH, étincelons joyeusement donc! (rien à voir avec la Noël, hihihi).
    Merci, bon weekend blanc...et gris-joli?

    -Veamos...debes ser Dani, claro. Eres muy amable, pero de perfecto nada.
    Una pregunta: ¿tú tambien te lanzas por los pasillos de los supernercados usando el carrito como si fuera un patinete? ¿Hé? Yo sí, jijii.
    Besos fuertes.

    RépondreSupprimer
  17. J'aime l'idée du frère jumeau. J'avoue que certains de mes personnages sont un peu frères ou soeurs jumeaux, et c'est certainement inévitable... et puis, écrire un roman, créer des vies et des aventures, c'est un peu s'en nourrir, imaginer et ressentir ce que ça serait si ....

    RépondreSupprimer
  18. -Edmée, j'espérais secrètement que tu passes par ici toi l'écrivaine, la spécialiste. D'inévitables alter ego donc...Merci beaucoup! Amicalement.

    RépondreSupprimer
  19. Quelles belles illustrations ! Quel texte réjouissant ! Cela me fait penser à la petite fille de 2 ans et demi dont je m'occupe le week-end. Elle voit toujours des formes dans la tartine qu'elle a découpé avec ses petites dents (de lait) : une petite fille, un chat, une souris, une voiture...là où je ne vois rien qu'un morceau de toast grignoté. Comme je me sens indigente !

    RépondreSupprimer
  20. Coucou Colo, je crois que ton blog ne m'aime pas trop ces temps-ci! J'ai écrit à deux reprises des super commentaires(évidemment super, puisqu'ils ne sont pas là pour prouver le contraire...) et ta page les refuse obstinément.
    Pff, plus le courage de me répéter encore une fois mais je m'obstinerai pour tes prochains billets...

    RépondreSupprimer
  21. -Euterpe, suivre les enfants dans leurs fantaisies, même les exagérer, c'est si gai!

    -Oh Delphine je suis bien désolée! Tu es la seule à me le dire...je te promets qu'il n'y a absolument aucune consigne contre toi!!! (note que ça m'est déjà arrivé plusieurs fois sur le tien, depuis lors je copie avant d'envoyer).
    Un beso.

    RépondreSupprimer
  22. Des nuages dans les cheveux, de l'or dans les yeux et de l'endre sur les doigts... et plus qu'un zeste de folie!

    RépondreSupprimer
  23. C'est amusant car dernièrement mon petit-fils, Romain m'a dit toi tu n'es pas une mamy, tu es une petite fille, tu es ma copine :-)

    RépondreSupprimer
  24. -Lali, bienvenue, plus on est de fous et de folles...!

    -Marcelle, merveilleux!
    Les jeunes enfants ne connaissent pas les cases fixes...je me souviens de mon petit frère qui, transportant un matelas avec ma mère, lui avait dit: "heureusement qu'on est des hommes nous,maman"

    RépondreSupprimer