Bonne fin d'année, je vous souhaite, je nous souhaite, des crépitements lumineux.
Portez-vous bien et on se retrouve, j'espère, en poésie en 2026.
Blog bilingue français-español.
Bonne fin d'année, je vous souhaite, je nous souhaite, des crépitements lumineux.
Portez-vous bien et on se retrouve, j'espère, en poésie en 2026.
Il y a un temps, un long temps, l’idée de monter une pièce de théâtre a surgi. C’était peut-être Marga qui l’a lancée. Elle venait de lire, en français, “La cantatrice chauve” d’Ionesco et elle avait tellement ri...
Quand ces cinq Majorquines, presque toutes d’anciennes profs, sont venues me demander de les aider à adapter le texte au catalan et d’être...la capitaine des pompiers, comment refuser ?
Ce qui est sûr, c'est que je ne lui ressemblerai pas.
https://maldoror-theatre.com/evenements/cantatrice-chauve/
Alors nous voilà, 6 retraitées, n’ayant jamais été actrices, embarquées dans une aventure que nous ne prévoyions pas si compliquée. Déjà mémoriser ce texte, la plupart du temps sans queue ni tête, est un exploit. En partie parce que nous sommes prises de fous rires. L’autre partie c’est l’âge,(je suis la plus âgée), et le manque d’habitude d’apprendre par cœur.
L’enthousiasme ne manque pas, mais il nous faudrait une directrice maintenant.
L’idée est de la représenter, une fois qu’on sera prêtes, seulement à nos familles et amis.
Si par le plus grand des hasards c’était pas trop trop moche, on le ferait au village aussi.
![]() |
À lui non plus.... https://lestroiscoups.fr/la-cantatrice-chauve-eugene-ionesco-theatre-lalbatros-festival-off-avignon/ |
Le catalan (version majorquine) est une langue que je comprends assez bien maintenant, que je parle quand il le faut, mais pas vraiment couramment. Alors une amie et voisine s’est offerte comme “coach-prononciation-intonation” ! Il y a du travail ;-))…elle est patiente.
Voilà pourquoi je suis et serai peu présente sur les blogs.
Mais, si vous avez des idées à me suggérer pour ce rôle de pompière, je vous en serais très reconnaissante.
Aujourd'hui il pleut ici; ces gouttes ont pris une autre vie après la lecture du poème. Quand on y met des mots, du rythme, du talent...
Alors je republie ce poème( 1º publication 2018).
Comme un peu partout, à Madrid il y a de “grands musées”, Le Prado, Reina Sofía et Thyssen, puis ceux que les guides touristiques appellent “petits”.
Ce dimanche-là nous sommes allés visiter l’un de ces musées à taille humaine, je veux dire où on peut tout voir sans en sortir épuisé ou frustré. C’est le Musée Lázaro Galdiano.
Pas besoin de réserver, d’acheter un ticket auparavant, il y a peu de monde.
Le bâtiment est un “Palacete” (hôtel particulier), appelé Parque Florido en honneur à sa femme, Paula Florido y Toledo, Argentine, trois fois veuve, héritière d’une fortune considérable. Elle était amatrice et collectionneuse d’art.
Son mari, le quatrième donc, Lázaro Galdiano, Espagnol, (1862-1947), était financier, homme d’affaires, avocat, collectionneur d’objets d’art et bibliophile. À deux ils parcoururent le monde et réunirent le tout dans le Palacete. À la mort de Paula, n’ayant pas d’héritiers, il légua maison et collections à l’État Espagnol.
Alors, cette visite très agréable est aussi fort intéressante.
Parmi les œuvres connues il y a ce tableau de Jérôme Bosch, "El Bosco", ici méditation de Saint Jean Baptiste.
Et les sorcières de Goya.
Les plafonds, le mobilier, les nombreux objets, certains tableaux ou statues, magnifiques. La collection d'armes ne m'a pas intéressée, ni les très nombreux tableaux de la Vierge, de qualités variables.
Je vous mets quelques photos, et, si vous allez un jour à Madrid, essayez de vous y rendre.
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| Hortense de Beauharnais, Bronze, Atelier François Bosio 1768-1845 |
Et des coffres exceptionnels comme celui-ci, qui date de 1577, en bois de chêne et ébène,
garnis d'ivoire et d'argent.
Enfin, une vidéo (en espagnol mais vous y verrez des tas d'autre œuvres).
Peu connu, je pense, Juan Rodolfo Wilcock, et c’est fort dommage. Si je le connais peu comme traducteur, sa poésie m’enchante, et si vous me suivez depuis longtemps, vous aurez déjà lu l’un ou l’autre poème de lui ici.
Simplicité et profondeur dans le poème d’aujourd’hui.
Dos esculturas de Jorge de Oteiza . Izquierda: Caja vacía, 1958; derecha: De la serie de la desocupación de la esfera, 1957
ESPACE
Juan Rodolfo Wilcock *Argentina 1919-1978
Dans ma chambre il n’y a rien,
sauf un tourne-disques et un lit;
et dans le cœur rien non plus,
sauf un fils différent de moi.
Ainsi il y a de l’espace pour bouger
tant dans le cœur que dans la chambre
j’ai jeté les guenilles au feu,
les sentiments, à la mer.
Tout le monde n’a pas une chambre vide,
tout le monde n’a pas le cœur vide:
on peut y laisser entrer
chaque matin un monde nouveau.
(Trad.Colo)
*”Né de père anglais et de mère italienne, Wilcock se forma dans une Buenos Aires cosmopolite, où il se lia d’amitié dès 1941-1942 avec Borges, Silvina Ocampo et Bioy Casarès, et il se définit comme un « écrivain européen7 », qui aurait finalement choisi d’écrire en italien car c’est la langue qui ressemble le plus au latin ! Fixé définitivement en Italie en 1957, Wilcock est un écrivain qui touche à tous les genres, un journaliste, un essayiste, un traducteur aussi, capable de traduire vers l’italien aussi bien l’espagnol que le français ou l’anglais.”
Source: https://books.openedition.org/pur/39154?lang=fr
![]() |
| Fábrica MDK https://www.tccuadernos.com/blog/solido-vacio-arquitectura-fran-silvestre-david-cohn/ |
ESPACIO
Juan Rodolfo Wilcock
En mi cuarto no hay nada,
salvo el
tocadiscos y una cama;
y en el corazón tampoco hay nada,
salvo
un hijo distinto a mí.
Así hay espacio para moverse
tanto en
el corazón como en el cuarto
tiré los harapos al fuego,
los
sentimientos, al mar.
No todos tienen el cuarto vacío,
no
todos tienen el corazón vacío:
se puede dejar entrar
cada
mañana un mundo nuevo.
Je vous recommande à ce sujet un très intéressant billet de Kwarkito sur deux sortes de champignons, qui pourraient être extrêmement utiles. https://kwarkito.blogspot.com/2025/10/lavenir-serait-il-dans-les-champignons.html
Papillon de la Sierra
N’est-ce pas toi, papillon,
l’âme de ces terres solitaires,
de ses ravins profonds
et de ses cimes rudes?
Pour que tu naisses,
de sa baguette magique
un jour une fée fit taire
les tempêtes de pierre
et elle enchaîna les monts
afin que que tu voles. (...)
Trad:Colo
Mariposa de la Sierra
-- de Antonio Machado --
¿No
eres tú, mariposa,
el alma de estas sierras solitarias,
de
sus barrancos hondos
y de sus cumbres agrias?
Para que tú
nacieras,
con su varita mágica
a las tormentas de la
piedra, un día,
mandó callar
un hada,
y encadenó los
montes
para que tú volaras.
(….)
Beaucoup d’espèces endémiques, certaines plus répandues.
Ils vivent surtout dans la moyenne montagne, entre 1.500 et 1900 mètres d’altitude. Ils sont étudiés de près car ils sont des indicateurs du changement climatique. Ainsi les chercheurs ont pu observer une récente migration vers l’altitude.
Mais ont-ils vu la fée….?
Una mariposa apolo ('Parnassius apollo nevadensis') en Sierra Nevada
(Source https://www.granadahoy.com/granada/Mariposas-Sierra-Nevada-cambio-climatico_0_1408359512.html)
Que ce soit à Montevideo ou à Shanghai, au XVIIº ou en 2025, la passion amoureuse est la même. Et on n’oublie pas ces moments fous où rien d’autre ne compte.On est d'accord ?
Cristina Peri Rossi, poétesse uruguayenne aux multiples distinctions, la raconte avec talent et rythme.
La Passion
Cristina Peri Rossi, Montevideo-Uruguay 1941
Nous sortîmes de l’amour
comme d’une catastrophe aérienne
Nous avions perdu nos vêtements
le nord
il me manquait une dent
et à toi la notion de temps
Était-ce une année longue comme un siècle
ou un siècle court comme un jour ?
Sur les meubles
dans la maison
des restes brisés:
verres photos livres effeuillés
Nous étions les survivants
d’un effondrement
d’un volcan
d’eaux déchaînées
et nous nous quittâmes avec la vague sensation
d’avoir survécu
sans bien savoir pour quoi.
![]() |
| Venus y Adonis José de Ribera 1637 / Mitología |
La pasión
Cristina
Peri Rossi, Montevideo-Uruguay 1941
Salimos
del amor
como de una catástrofe aérea
Habíamos perdido
la ropa
los papeles
a mí me faltaba un diente
y a ti
la noción del tiempo
¿Era un año largo como un siglo
o
un siglo corto como un día?
Por los muebles
por la
casa
despojos rotos:
vasos fotos libros deshojados
Éramos
los sobrevivientes
de un derrumbe
de un volcán
de las
aguas arrebatadas
y nos despedimos con la vaga sensación
de
haber sobrevivido
aunque no sabíamos para qué.
![]() |
| Granadas 2025 Colo |
En ce beau jour d’automne je republie 10 ans après un poème du Majorquin Jaume
Mesquida, né à Palma de Mallorca (1948) mais qui a toujours vécu à Manacor
(patrie de Rafael Nadal aussi).
Il raconte bien l'immense amour des majorquins pour la nature, le vent, la mer,
leur île.
Dans le recueil “Majorque, l'île aux poètes”, il se trouve en Catalan, mais aussi
traduit en Espagnol et en Français.
Je n'ai pas résisté à l'envie d'en faire une traduction très personnelle;-))
Obole de
silence I
La
nuit battit en retraite et laissa intacte la couleur
rouge des
cerises.
L'ombre resta prisonnière dans la jarre de terre.
Le
vent cacha le murmure odorant de la forêt dans la flûte
que
soutenaient, alanguies, des mains blanches.
Mille petits
éclats de lune étaient restés accrochés aux branches odorantes
du
citronnier.
Dans les branches de l'oranger, devant le porche de
bois,
se
prirent les mille grains vermeils du soleil
qui approcha
timidement les lèvres au bord ébréché
de la cruche, pour
boire à satiété.
Les yeux des maisons s'étaient ouverts et
regardaient surpris
l'azur si pur de ce jour ensoleillé.
De
bon matin les vieilles se sont installées devant la mer
tissant
un souvenir sur le métier rougi de leur sang,
tandis que le
jour, d'un fil de lumière doré, cousait un tablier
d'écume à
la brise des hautes falaises.
Là le vent du sel soufflait dans
leurs cheveux gris,
longs et lisses
et les petites fleurs
jaunes insulaires de camomille
réunies en bouquets sauvages et
odorants
par les poings âpres des rochers.
Chacune
trouvait très facilement son aiguille de douleur
dans le
pailler de la tristesse.
(Trad
Colo)
Mazanilla silvestre /camomille sylvestre de Mallorca
En sortant d’une première balade-visite au grand cimetière de Palma, un mot m’est venu à l’esprit: accueillir.
Pas seulement à cause des tombes, des statues et mausolées qui donnent la bienvenue aux morts, mais par la découverte d’un emplacement pour les tombes des musulmans (les juifs ont un cimetière à eux dans un village de l’île).
Ensuite la vue de ce ficus géant, qui a accueilli un palmier entre ses racines.
Accueillir: une personne, un animal, une plante, une idée, un goût nouveau…tout ce qui fait notre richesse, personnelle et collective.
Enfin ce poème. Cubain.
Hospitalité
Joaquín Lorenzo Luaces (La Havane 1826, 1867)
Ne poursuis pas, bon ami;
arrête là ton cheval,
qu’à des lieues on voit
que tu arrives épuisé.
Ils ne sont pas sûrs maintenant
les chemins, et ils sont mauvais;
et les ruisseaux sont rivières,
et les sentiers des marais.
Vous prendrez un café avec moi,
on fumera du tabac,
et ensuite je ferai mettre
votre lit dans ma chambre.
Descendez donc, je souffre
de vous voir en si piteux état,
et l’homme et la bête demandent
une nuit de repos…
Si vous êtes un étranger,
comme je le soupçonne,
ami, il se peut que vous ignoriez
les coutumes de notre terre.
Celui qui voyage sur les terres
des chasseurs cubains
n’a pas besoin d’auberge
pour à l’abri dormir.
(Trad: Colo)
No
prosiga, buen amigo;
detenga
al punto el caballo,
que
a la legua se conoce
que
viene más que cansado.
No
están seguros ahora
los
caminos, y están malos;
y
los arroyos son ríos,
y
las veredas pantanos.
Tomará
café conmigo,
fumaremos
un tabaco,
y
haré que le pongan luego
el
catre en mi propio cuarto.
Bájese,
pues, que me duele
mirarle
en tan cruel estado,
y
hombre y bestia están pidiendo
una
noche de descanso…
Si
es usted un forastero
como
sospecho hace rato,
amigo,
puede que ignore
los
usos de nuestros campos.
El
que viaja por las tierras
de
los monteros cubanos,
no
necesita posada
para
dormir abrigado.
FEMMES Luís García Montero
Matin de banlieue
et l’autobus s’approche de l’arrêt.
Il fait froid dans la rue, légèrement,
presque l’éveil du printemps,
de ville qui ne s’est pas
encore réchauffée.
De mon siège je vois les femmes,
les yeux ensommeillés et les habits sans éclat,
cherchant leur horaire de travail.
Elles montent et mettent à jour
sur les vitres de l’abribus
une annonce de corps choisis
et de lingerie.
Les jeunes femmes nous regardent dans les yeux
depuis le règne parfait de leur photographie,
sans horaire, sans hâte,
obscènes comme un rêve bronzé.
(...)
Je te souhaite une bonne journée,
que la chance te cherche
dans ta maison petite et ordonnée,
que la vie te traite dignement.
MUJERES Luís García Montero
Mañana
de suburbio
y el autobús se acerca a la parada.
Hace
frío en la calle, suavemente,
casi de despertar en primavera,
de ciudad que no ha entrado
todavía en calor.
Desde
mi asiento veo a las mujeres,
con los ojos de sueño y la ropa
sin brillo,
en busca de su horario de trabajo.
Suben
y van dejando al descubierto,
en los cristales de la
marquesina,
un anuncio de cuerpos escogidos
y de ropa
interior.
Las muchachas nos miran a los ojos
desde el
reino perfecto de su fotografía,
sin horarios, sin prisa,
obscenas como un sueño bronceado.
(...)
Que
tengas un buen día,
que la suerte te busque
en tu casa
pequeña y ordenada,
que la vida te trate dignamente.