21 sept. 2014

Nuages / Nubes


                             Photo Colo, aube à Puigpunyent, Mallorca 2014

            Nuages ( Jorge Luis Borges)
    I. Pas une chose au monde qui ne soit
    nuage. Nuages, les cathé­drales,
    pierre impo­sante et bibliques ver­rières,
    qu’aplanira le temps. Nuage l’
    Odys­sée,
    mou­vante, comme la mer, neuve
    tou­jours quand nous l’ouvrons. Le reflet
    de ta face est un autre, déjà, dans le miroir
    et le jour, un laby­rinthe impal­pable.
    Nous sommes ceux qui partent. Le nuage
    nom­breux qui s’efface au cou­chant
    est notre nuage. Telle rose
    en devient une autre, indé­fi­ni­ment.
    Tu es nuage, tu es mer, tu es oubli.
    Tu es aussi ce que tu as perdu.
    Nuages (I), Jorge Luis Borges, Les Conju­rés,
    tra­duc­tion par Claude Este­ban,

                         Photo Colo, aube à Puigpunyent, Mallorca 2014

    NUBES   (de Jorge Luis Borges)

    1. No habrá una sóla cosa que no sea
      una nube. Lo son las catedrales
      de vasta piedra y bíblicos cristales
      que el tiempo allanará. Lo es la Odisea,
      que cambia como el mar. Algo hay distinto
      cada vez que la abrimos. El reflejo
      de tu cara ya es otro en el espejo
      y el día es un dudoso laberinto.
      Somos los que se van. La numerosa
      nube que se deshace en el poniente
      es nuestra imagen. Incesantemente
      la rosa se convierte en otra rosa.
      Eres nube, eres mar, eres olvido.
      Eres también aquello que has perdido.

                            Photo Colo, Mallorca

    Nubes II (extracto) JL Borges(...)
    ¿Qué son las nubes? ¿Una arquitectura
    del azar? Quizá Dios las necesita
    para la ejecución de Su infinita
    obra y son hilos de la trama oscura.
    Quizá la nube sea no menos vana
    que el hombre que la mira en la mañana.
        Nuages ll (extrait) JL Borges

        (...)
        Que sont les nuages? Une architecture
        du hasard? Dieu, peut-être, en a-t-il besoin
        pour l'exécution de son oeuvre infinie.
        Ils sont le fil d'une trame obscure.
        Le nuage, peut-être, est aussi vain
        que l'homme qui le regarde dans le matin.
         (Trad: Colo)

Clic pour agrandir les photos, comme toujours! ;-)

37 commentaires:

  1. Très beau. Tout.
    Souvent, mon intime, profond, coeur et neurones, vibrent à la beauté d'un ciel. Comme si le premier matin du monde.

    RépondreSupprimer
  2. C'est superbe, vrai que je connais plus la prose de Borges que sa poésie et c'est un tord car j'aime ...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Certains poèmes de lui sont fort hermétiques, celui-ci m'enchante aussi.
      Bonne fin de dimanche Dominique.

      Supprimer
  3. je ne connaissais Borges que comme l'auteur de nouvelles (El Aleph...) et je le découvre ici fin poète :-)
    merci Colo!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. À ce que je trouve sur la Toile, mais ça ne veut pas tout dire!, il y a pas mal de poèmes non traduits en français Adrienne.
      Merci de ta visite!

      Supprimer
  4. j'adore ce texte dont j'ignorais l'existence.... il ne peut que réjouir l'amateur de nuages que je suis

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ici où j'habite le ciel, les nuages sont souvent magiques...

      Supprimer
  5. Ah Borges ! Oui, l'oeuvre poétique à ne oublier... Ah Borges, tu me prends par les sentiments là , quelle émotion devant une telle force d'évocation, puissante et subtile.....
    ;-)

    Tiens je t'envoie un nuage, celui de Supervielle, qui n'est peut-être pas si loin ... il se trouve que ce texte appartient au recueil Gravitations... !!!
    * * *


    Il fut un temps où les ombres
    A leur place véritable
    N’obscurcissaient pas mes fables.
    Mon coeur donnait sa lumière.
    Mes yeux comprenaient la chaise de paille,
    La table de bois,
    Et mes mains ne rêvaient pas
    Par la faute des dix doigts.
    Ecoute-moi. Capitaine de mon enfance,
    Faisons comme avant,
    Montons à bord de ma première barque
    Qui passait la mer quand j’avais dix ans.
    Elle ne prend pas l’eau du songe
    Et sent sûrement le goudron,
    Ecoute, ce n’est plus que dans mes souvenirs
    Que le bois est encor le bois, et le fer, dur,
    Depuis longtemps, Capitaine,
    Tout m’est nuage et j’en meurs.
    (Jules Supervielle)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Pas si loin tu dis, tout tout près même.
      Grand merci K, je ne connaissais pas ce poème, superbe, et l'envie me prends de la traduire en espagnol, d'en faire un autre billet-nuages.
      Gravitons, gravitons!

      Supprimer
  6. Le premier vers démarre fort. Il nous invite à prendre de la hauteur et à relativiser tout ce qui nous entoure. Nous sommes en mouvement perpétuel et les choses se modifient au fil du temps, jusqu'à disparaitre. Restent l'évasion et le rêve, la beauté de l'imaginaire. Une pensée pour Baudelaire qui écrivit "L'étranger".
    J'avais cru un instant que tu avais changé de blog ! Je ne sais comment je suis parvenue à ton autre page. A l'instant je viens de récupérer mon com. Bonne soirée Colo !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci Lily, tes analyses sont toujours intéressantes.

      Pas changé de blog, l'autre est une longue et vieille histoire. Je le maintiens par fidélité à celui qui m'y avait invitée, mais aussi par provocation car j'y ai reçu au début des commentaires xénophobes et inacceptables.

      Bonne semaine Lily

      Supprimer
  7. Merci pour la traduction, Colo ! Merci pour tes images !
    Un beau billet !
    J'aime les nuages et leur fascinante transformation au fil de l'heure...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Comment ne pas se laisser emporter par eux?
      Merci Fifi, bonne semaine.

      Supprimer
  8. Splendides photos sur un texte tout aussi splendide. Sa poésie est limpide et claire.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci Aifelle. Depuis 2 jours je n'arrive pas à aller sur ton blog...ça bloque. Suis-je la seule?
      Je réessayerai.
      Bonne semaine, un besito.

      Supprimer
  9. Le nuage, magnifique prétexte d'élans métaphysiques de l'inoubliable Borges. Rappel de la pensée bouddhiste : rien n'est figé, tout est changement et transformation.

    Et vous avez réussi quelques belles rimes dans le second : comme l'espoir accompli d'une rémission durable. Bonne semaine !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Grand merci pour vos mots délicats Christian, je suis fort touchée.
      Bonne semaine à vous aussi.

      Supprimer
  10. Magnifique...je l'écoute et le réécoute, mon esprit prend le pas sur les nuages.
    Je le mettrai dans mon prochain billet avec le poèmes de Supervielle...super!

    Grand merci sieur Gérard, bonne semaine.
    Après 4 mois sans une goutte d'eau, nous sommes en alerte-pluies multicolore...j'attends ça avec impatience, tout le monde attend ce cadeau, même violent, du ciel.

    RépondreSupprimer
  11. Immense merci Lily, je me sens toute réjouie à l'idée de lire, relire, traduire cette semaine.

    Si mon corps doit beaucoup se reposer en ce moment, ma tête fonctionne super bien! ;-))
    Je t'embrasse, encore merci!

    RépondreSupprimer
  12. J'adore les nuages et les rêves qui s'en dégagent. Vous aimeriez sûrement le livre de Danièle Boulaire "une année dans les nuages" poétique et vivante observation du ciel...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Bienvenue et grand merci pour cette référence. Ce livre m'est inconnu mais je vais explorer cette poésie du ciel!
      Bonne semaine à vous.

      Supprimer
  13. "Nous sommes ceux qui partent" ! La-bas, très loin...
    J'avais presque les mêmes au-dessus de ma tête hier !
    Belle soirée

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Universalité des nuages qui nous relient, nous font rêver ou imaginer.
      Bonne journée à toi!

      Supprimer
  14. Nous parlions de nuages hier encore.C'est vrai qu'un ciel bleu c'est magnifique mais souvent c'est sans nuance. Pouvoir observer des nuages, c'est comme de la dentelle qui s'effiloche… Ou une masse de ouate… qui renvoie à l'enfance. Merci pour ce beau poème d'un auteur souvent hermétique mais les mots sont là et on peut aussi les faire vivre autrement.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. L'ennui naquit un jour de l'uniformité...oui, tu as raison, ce bleu-uni qui nous est offert plusieurs mois par an présente peu d'intérêt...de même que le gris-uni d'ailleurs.
      Après 4 mois de sécheresse bleue, il pleut. Tu ne peux savoir combien tout le monde est content ici (enfin, pas les touristes j'imagine), on en veut plus et plus et encore!
      Merci d'être passé, bonne semaine Obni.

      Supprimer
  15. Très jolie plongée dans le ciel des nuages et les nuages du coeur.
    Je me souviens d'un blogueur qui peignait les nuages et leur donnait la parole ...
    Les nuages parlent toutes les langues et se font comprendre partout, on peut passer sa vie à les regarder, les commenter, les sentir. Ils sont la préfiguration de l'infini ou de l'éternité.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci Savarati.
      Donner la parole aux nuages? Pourquoi pas...Je les sens si vivants, intemporels, universels.
      Discrets dépositaires de rêves et secrets.

      Supprimer
  16. Que tout est beau, Colo! Et les photos et le poème.
    Il ne se passe pas un jour, s'en que je ne regarde le ciel. J'aime les nuages, j'aime le ciel.
    Merci pour ce très joli billet avec tant de douceur.
    Bisous

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est fort gentil Denise.
      Quand on vit à la campagne, qu'on a un grand potager, l’observation du ciel est quotidinne, et...si plaisante. Contente de partager cet amour avec toi !
      Besos

      Supprimer
    2. Oh la la! Colo, il faut lire "sans que je ne" dans mon commentaire. Merci et mille excuses!
      Bisous

      Supprimer
    3. Si tu savais le nombre de fois que ça m'arrive Denise...vingt fois excusée!
      Bonne journée, un beso

      Supprimer
  17. "Nous pensons que les nuages parlent aux rêveurs et que l'âme s'enrichit à les contempler. En vérité, ceux qui s'abandonnent aux évocations suscitées par leurs formes feront l'économie d'une psychanalyse."
    Extrait du Manifeste de la Société d'Appréciation des Nuages (cité par Denis Grozdanovitch)

    (envoyé par Tania de son sud ensoleillé!..je le publie à sa demande!!)

    RépondreSupprimer
  18. J'ai beaucoup de retard partout et chez toi particulièrement.

    Très belle évocation croisée du monde des nuages en photo, poèmes et poésie.
    Pas un jour, même au cœur de la ville où je ne vive accrochée aux ciels changeants; mais il est sûr qu'il y a des endroits privilégiés pour regarder le ciel et s'en imprégner.Lorsque je vais chez ma mère, il y a un endroit loin de tout où le ciel semble prendre le pas sur la terre. L'horizon y semble infini et les divers jeux de nuages y sont un ravissement.
    Marrant car j'ai marqué dans mon carnet: "trouver des poèmes de Borges et si possible une œuvre"... Tu me combles.
    Merci Colo.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Bonjour Maïté, aucun problème...vivre au rythme de son corps est essentiel!

      Les îles sont des endroits privilégiés pour se plonger dans le ciel, les nuages...ceci dit la poésie de Borges me semble souvent compliquée, trop à mon goût..
      Bonne semaine ma belle, je t'embrasse fort

      Supprimer