La poésie des année `80 dont Luis García Montero fait partie, est appelée “poésie de l’expérience”. On pourrait l’appeler poésie de la vie, poésie qui explore la réalité quotidienne avec sa partie merveilleuse, et l’autre qui l’est moins.
Je vais vous traduire quelques poèmes, en plusieurs billets, de ce recueil "Chambres séparées"; poèmes faciles à comprendre, pas évidents à traduire:-))
Escale à Barajas* Luis García Montero (Granada 1958)
Personnages étranges,
des vieux avec une valise et beaucoup de dignité,
des jeunes qui ont appris
l’impertinence de la séduction
dans des pays et modes différents,
des cadres provinciaux,
une faune nu-pieds et sans pudeur,
qui dort sur les fauteuils
de l’aéroport.
Près des fenêtres
les nuages et la piste d’atterrissage versent
sur la modernité un poison romantique
et chacun attend son départ.
Joies, nostalgies, inquiétudes,
une fatigue du monde.
Que je lui prête de l’argent pour un taxi
me demande un homme démuni
qui a perdu son bagage ce matin
au retour de Paris.
C’est ce qu’il me dit.
Moi je le vois partir,
traverser la foule des passagers.
Sur les écrans électroniques
se brassent les destinations,
s’agitent les noms de villes étranges.
Il regarde les nuages et s’éloigne enfin
à la recherche de son île
où la chimie et la mort semblent naturelles
et les hauts palmiers sont en plastique.
(Trad: Colo)
* Barajas est le nom de l'aéroport de Madrid
Escala en barajas Luis García Montero (Granada 1958)
Escala
en Barajas
Personajes extraños,
ancianos con maletas y
mucha dignidad,
jóvenes que aprendieron
la impertinencia
de la seducción
en modas y países diferentes,
ejecutivos
de provincias,
fauna descalza y sin pudor,
que duerme en
los sillones
del aeropuerto.
Junto
a los ventanales
las nubes y la pista de aterrizaje vierten
un
veneno romántico en la modernidad
y cada cual espera su
salida.
Alegrías, nostalgias, inquietudes,
un cansancio de
mundo.
Eso me cuenta
Yo
lo veo marcharse,
Cruzar entre viajeros.
En las pantallas
electrónicas
se baraja el destino,
aletean los nombres de
ciudades extrañas.
Mira
las nubes y por fin se aleja
en busca de su isla
donde
química y muerte resultan naturales
y las altas palmeras son de
plástico.
Habitaciones separadas, 1994 Colección Visor de poesía, p29-30.
Cc, oui, au prix où sont les choses ici, je me tourne vers des produits que nous offre la nature. Et je découvre de nouvelles saveurs. Bisous
RépondreSupprimerTu fais bien, on fait tous la même chose je pense. Un beso.
Supprimerah oui, les plantes en plastique, c'est pratique ;-)
RépondreSupprimerÇa fait peu rêver...
SupprimerDans le poème, le plastique c'est la mort comme tout ce qui est artificiel !
RépondreSupprimerJe crois que mon commentaire n'est pas parti : je disais que le plastique représente la mort dans ce poème comme tout ce qui est artificiel. Ce qui touche, c'est la parfaite observation des choses de la vie, la (fausse) banalité de l'observation du réel mais d'où naît la nostalgie et la poésie.
RépondreSupprimerTu parles bien du poème, de cette halte dans un aéroport, cet oeil assez bienveillant envers les autres, critique aussi.
SupprimerTa newsletter ne m'arrive plus...j'imagine que j'ai un retard fou sur ton blog. Désolée.
un texte tel un film... sensible
RépondreSupprimerpeu habituée aux aéroports, ce poème me conduit dans les gares d'autrefois... j'aimais à l'âge jeune y regarder en retrait les choses et les gens, leur imaginer des vies... méditer... deviner chaque voyageur et sa singularité...
la photo aussi est belle... un instantané de sérénité au mitan de la modernité... entre étonnement et mélancolie dans ce monde drôlement bitumé, plastiqué...
merci dame Colo (et bravo) pour la traduction* et la découverte de ce chouette poète....
*je ne connais aucun mot d'espagnol fors le prénom de ma fille : Soledad !!
Bonsoir Solilouve, ce poète est très connu ici, et le couple qu'il formait avec Almudena Grandes encore plus.
SupprimerLes gares, oui, un autre lieu d'observation, les gens dans less wagons. El señor Garcia Montero, dans le même recueil, a écrit un poème sur les gares aussi. Ces endroits où la vie quotidienne se montre sous toutes ses formes.
Votre fille s'appelle Soledad, joli, vous lui avez légué votre goût pour la solitude...
Bien d'accord sur le côté visuel du poème qui a, en espagnol, une belle musique que j'espère avoir rendue (un peu) en français.
Bonne soirée !
"Une faune nus-pieds et sans pudeur", c'est drôle j'ai pensé tout de suite à un faune farceur, pourtant ce n'est pas le ton du poème .. c'est particulier les ambiances d'aéroport.
RépondreSupprimerOui, très particulier, surtout quand il y a des retards, des vols annulés, des grèves. Ce peut être l'enfer;-))
SupprimerJ'ai aimé cette observation mise en poème.
"...dans son île, ou la chimie et la mort semblent naturelles…" ça me fait froid dans le dos ! Et pourtant !
RépondreSupprimerJe n'avais pas pris l'avion depuis longtemps et en revenant de Sienne, il nous a fallu traverser l'aéroport Charles de Gaule, quelle mauvaise surprise ! Une foule incroyable avec des gens qui dormaient à même le sol… Des hôtesses qui faisaient rebrousser chemin à tous les passagers d'un avion pour se retrouver nez à nez avec les suivants…
Un poème qui fait réfléchir à notre monde !
A bientôt !
Nous n'avons pas le choix ici quand on veut sortir de l'île, bateau ou avion, je m'en passerais bien, héhé. Tu as donc vécu ce qui se passe trop souvent dans les aéroports,hélas.
SupprimerÀ bientôt Enitram, merci de ta visite
Je n'ai jamais pris l'avion, mon mari et moi on a toujours voyagé en voiture ou en train ou en bateau. Merci pour la découverte de ce poème contemporain. Bonne fin de journée et bises.
RépondreSupprimerVoyager en train est un vrai plaisir je trouve, surtout quand on est retraité et qu'on peut choisir les heures.
SupprimerLuis Garcia Montero décrit bien l'atmosphère, on voit presque les gens..Merci de ta visite, un beso
Evocation qui nous parle, et surtout à toi qui fais souvent "l'expérience" des aéroports, sur ton île ou ailleurs... Un poème d'observation !
RépondreSupprimerBonjour Tania, tous les arts sont basés sur l'observation je crois, que ce soit de la nature, des humains corps et âmes, des constructions...
RépondreSupprimerTu as raison, par la force des choses, la plupart du temps en attendant des visiteurs, j'ai eu maintes fois l'occasion d’observer cette "faune" faussement paisible. L.Garcia Montero décrit cette ambiance avec talent je trouve.
Un poème qui dessine bien le quotidien des aéroports
RépondreSupprimerAbsolument Marie. Bon week-end!
SupprimerL'atmosphère des aéroports est très bien rendue. Quelle justesse ! J'espère qu'avec notre planète qui chauffe, ils seront de moins en moins fréquentés. Besos !
RépondreSupprimerC'est vraiment intéressant cet auteur. Encore et encore
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