22 juin 2014

Un flou très désirable / Una muy deseable vaguedad


Après la poésie et le conte, terminons par la prose de J.R. Willock. Plusieurs romans, datant de son époque italienne dont “La synagogue des iconoclastes” que je viens de lire online, en espagnol.
Después de la poesía y del cuento, terminamos con la prosa de J.R. Wilcock. Varias novelas, escritas en su época italiana, entre otras “La sinagoga de los iconoclastas” que acabo de leer online, aquí.

Plus de trente vies d'hommes géniaux, à travers le temps, y sont racontées: des utopistes, théoriciens, sages, inventeurs de tout genres dont les idées, si elles s'étaient développées, auraient changé du tout au tout la face du monde. Par exemple le génois Felicien Raegge qui pressentit la nature réversible du temps, le nord-américain Bobson qui est sur le point de découvrir l'élément atomique capable d'annuler la gravité ou Absalon Amet, horloger à la Rochelle, inventeur d'un appareil producteur de phrases, certaines fort connues, comme “L'enfer c'est les autres”, formulée en 1774...
Más de treinta vidas de hombres geniales, a través del tiempo, se encuentran relatadas: utopistas, teóricos, sabios, inventores de todos tipos cuyas ideas, de ser desarrolladas, habrían cambiado completamente la faz del mundo.
Por ejemplo el genovés Felicien Raegge que presintió la naturaleza reversible del tiempo, el norte americano Bobson que está a punto de descubrir el elemento atómico capaz de anular la gravedad o Absalon Amet, relojero en La Rochelle, inventor de un aparato productor de frases, algunas muy conocidas, como “El infierno son los otros” formulada en 1774...

Les récits, à la fois comiques et paisiblement cruels, qui composent ces deux livres (note: l'autre est Le steréoscope des solitaires) – à mon avis les plus représentatifs de la prose de Wilcock- montrèrent une des facettes essentielles d'une oeuvre multiple, dont l'esprit pourrait se résumer à cette confession de l'auteur, paradoxalement et elliptiquement féroce:
 “Décrire les hommes c'est exercer la compassion. Traiter tout le monde de la même façon: la littérature de tolère pas l'injustice” 
(Por Héctor Bianciotti - Para La Nacion - París, 1998)

Ces récits peuvent se lire indépendamment l'un de l'autre mais de l'ensemble ce qui m'a enchantée c'est son imagination vraiment sans borne!


Los relatos, a la vez cómicos y apaciblemente crueles, que componen estos dos libros -a mi juicio, los más representativos de la prosa de Wilcock- muestran una de las facetas esenciales de una obra múltiple, cuyo espíritu podría resumirse en esta confesión del autor, paradójica y elípticamente feroz: "Describir a los hombres es ejercer la compasión. Tratar a todos por igual: la literatura no tolera la injusticia". 
 (Por Héctor Bianciotti - Para La Nacion - París, 1998)

Esos relatos pueden leerse independientemente el uno del otro pero del conjunto me encantó su imaginación realmente sin limites!


              Pour vous donner envie de le lire....     

Voici quelques lignes (je me suis tant amusée que je le traduirais bien en entier, mais....) d'un des “portraits”.
Aquí el principio de unos de sus relatos...me divierte tanto que lo hubiera copiado entero pero...

LUIS FUENTECILLA HERRERA

En 1702 el microscopista Anton von Leeuwenhock comunicó a la Royal Society de Londres su curioso descubrimiento. En el agua de lluvia estancada en los tejados había encontrado algunos animalitos, los cuales se desecaban según se iba evaporando el agua, pero después, introducidos de nuevo en el agua, retornaban a la vida: «Descubrí que, una vez agotado el líquido, el animalito se contraía en forma de minúsculo huevecillo y así permanecía inmóvil y sin vida hasta que no lo recubría de agua como antes. Media hora después las bestezuelas habían recuperado su aspecto primitivo y se las veía nadar bajo el cristal como si nada hubiese ocurrido.»

En 1702 le microscopiste Anton von Leeuwenhock communiqua à la Royal Society de Londres sa curieuse découverte. Dans l'eau de pluie stagnant sur les toits il avait trouvé de petits animaux qui se desséchaient à mesure que l'eau s'évaporait, mais qui après être introduits à nouveau dans l'eau retrouvaient la vie: “J'ai découvert que, une fois le liquide épuisé, le petit animal se contractait en forme d’œuf minuscule et demeurait ainsi immobile et sans vie jusqu'à ce que l'eau le recouvre comme avant. Une demi-heure après les petites bêtes avaient retrouvé leur aspect primitif et on les voyait nager sous le verre comme si rien ne s'était passé”.

Este fenómeno de vida latente, obvio en las semillas y en las esporas, pero más visible en los rotíferos, nematodos y tardígrados, fascinó a los pensadores ochocentistas que vieron en él una confirmación de la extrema vaguedad, de la extremadamente deseable vaguedad, de la frontera entre la vida y la muerte. Lenard H. Chisholm sostuvo, en Are these Animals Alive? (¿Estos animales están vivos?,1853), que en cierto modo todos nosotros hemos nacido de una espora y que incumbe a la ciencia encontrar el sistema para reducirnos de nuevo a la espora original, en cuyo estado se nos podría conservar cómodamente durante uno o dos milenios y finalmente devolver a la vida dentro de una bañera.


Ce phénomème de vie latente, évident pour les semences et les spores, mais plus visible chez les rotifères, nématodes et tardigrades, fascina les penseurs du dix-huitième qui virent là la confirmation du flou extrème, du flou extrêmement désirable, de la frontière entre la vie et la mort. Lenard H. Chisholm soutint, dans Are these Animals Alive? ( Ces animaux sont-ils vivants?, 1853) que d'une certaine façon nous sommes tous nés d'une spore et qu'il incombe à la science de trouver le système pour nous réduire à nouveau à la spore originelle, et dans cet état on pourrait aisément nous conserver pendant un ou deux millénaires et finalement nous rendre à la vie dans une baignoire.

En 1862, Edmond About publicó su novela El hombre de la oreja rota, cuyo protagonista es un soldado de Napoleón desecado, embalado y finalmente hecho revivir, gracias a una inmersión acuática, cincuenta años después, exactamente como era en el momento de la desecación, a excepción de una oreja que se había roto durante el letargo. Esta novela precientífica tuvo mucho éxito en Europa y ocasionó, además de sensación, interesantes y prolongadas reflexiones. Pocos años después, en 1871, el profesor de ciencias naturales Abélard Cousin tuvo una momia egipcia, desenterrada poco antes en Menfis, atada y lastrada durante cerca de dos meses en el fondo del estanque central del claustro de Saint-Auban en Nantes, con la esperanza de descubrir en ella algún leve indicio de vida residual; en realidad, al cabo de dos meses de sumersión la momia apareció visiblemente llena de gusanos, de una especie desconocida hasta aquel día; lo que a falta de otra cosa demostraba, observó Cousin, que los egipcios sabían cómo conservar los propios gusanos. (…)

En 1862, Edmund About publia son roman L'homme à l'oreille cassée, dont le protagoniste est un soldat de Napoléon désséché, emballé et finalement rendu à la vie, grâce à une immersion aquatique, cinquante ans plus tard, exactement dans le même état qu'il avait au moment du dessèchement, à l'exception d'une oreille qui s'était cassée durant sa longue léthargie. Ce roman préscientifique eut beaucoup de succès en Europe et donna lieu, en plus de la sensation, à des réflexions intéressantes et prolongées.
Quelques années plus tard, en 1871, le professeur de sciences naturelles Abéjard Cousin tint une momie égyptienne, déterrée peu auparavant à Memphis, attachée et lestée, pendant près de deux mois dans le fond du bassin central du cloître de Saint-Auban à Nantes, avec l'espoir de découvrir en elle un quelconque léger indice de vie résiduelle; en réalité, au bout de deux mois de submersion, la momie apparut visiblement pleine de vers, d'une espèce inconnue jusqu'à ce jour; ce qui, faute d'autre chose, démontrait, fit observer Cousin, que les égyptiens savaient comment conserver leurs vers.(...)



12 commentaires:

  1. Excellent ! Je lirais volontiers l'histoire de Felicien Raegge "qui pressentit la nature réversible du temps" ! Je tâcherai de la lire en ligne quand j'aurai du temps devant moi, si je puis dire. Merci de nous avoir traduits ces extraits pleins d'eau... et de sel. Très bon dimanche, amie, le premier de cet été.

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    1. Bonjour Tania, ce livre est traduit en français chez Gallimard, peut-être dans une collection de poche aussi...tu le trouveras peut-être en bibliothèque, il n'est pas récent.
      Un dimanche très nuageux ce matin, ça change et c'est gai! Excellente journée!

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  2. Il semble donc que les personnages de la synagogue proposent un contre-univers auquel il est difficile d'opposer des certitudes, les nôtres n'étant pas plus plausibles que les leurs. On n'est pas loin de l'univers quantique qui contrarie toutes nos logiques : une particule n'a pas de localisation (elle est partout) dans l'espace tant qu'on ne l'a pas observée, etc...
    J'aime vraiment beaucoup ce genre d'écrit qui sape les bases souvent trop facilement admises. Comme vous n'allez pas tout nous traduire (merci déjà), j'espère trouve la version traduite. Je préfère la synagogue que le stéréoscope qui, a priori, me semble moins "fantastique".

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    1. Des utopies, des théories abracadabrantesques mais pas si folles parfois, enfin des fictions installées dans une réalité connue, voyageant dans le temps et l'espace, la mythologie et le présent..."fantastique" comme vous dites, j'ai vraiment beaucoup aimé...l'absurde et/ou la cruauté peuvent déranger certains, c'est sûr...
      Merci à vous d'avoir pris la peine de lire ce long billet!
      Bonne semaine à vous deux.

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  3. C'est savoureux et d'une belle inventivité .. on pourrait presque y croire tellement le jargon utilisé est parfait. Je vais aller voir la traduction française et on ne sait jamais, ma bibliothèque l'a peut-être, mais j'ai des doutes.

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    1. Tu as raison, on y croit...presque!
      J'espère que tu le trouveras, sinon peut-être Le Chaos, dans un autre genre je sais, mais je ne l'ai pas lu.
      Bonne soirée Aifelle.

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  4. Très intéressant, une belle découverte, j'apprécie les remises en question et cette part d'ouverture !

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    1. Bien contente que les bouleversements te plaisent Marcelle, il est bon de garder les idées et les mots en mouvement je crois!
      Bonne semaine.

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  5. Voilà qui est passionnant, Colo !

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    1. Ce l'est Daniêle, et drôle aussi.
      A bientôt!

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  6. En cherchant à en savoir un peu plus sur cet auteur j'ai découvert qu'il avait écrit sous le nom de Roberto Bolano qu'il etait le cousin germain d'Hugo Pratt et que l'arrivée de Berlusconi en 1994 fit qu'il abandonna ce nom et l'italien
    Je note ce livre pour un peu plus tard je n'ai pas l'esprit assez libre actuellement pour ce genre de lecture
    Merci en tout cas pour toutes ces dercouvertes
    Belle journée

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    1. Bonjour Aloïs, j'ai lu cela quelque part également mais je ne suis pas sûre que ce soit exact vu qu’aucun autre site ne mentionne cette "usurpation" de nom...mais grand merci pour cette recherche.

      Les livres il faut attendre qu'ils nous choisissent je pense, rien ne presse.
      Des pensées très amicales, bon weekend.

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