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26 août 2024

Centre imprenable / Centro inexpugnable

 

Née en Argentine en 1934 et exilée en France depuis 1961, Silvia Baron Supervielle a toujours écrit des poèmes, d'abord en espagnol, puis, dans une écriture de plus en plus minimaliste, en français.

Ce poème a été écrit par elle en français, je me suis permise de le traduire en espagnol, bien qu’elle ait elle-même énormément traduit.


Que j’aille par le nord

que j’aille par le nord
où s’avancent mes pas
ou que je reste au sud
saisie par mes pensées
que je voyage ailleurs
sans mémoire imaginant
un souvenir dépouillé
de distance et de rivage
que j’habite les règnes
du rêve ou les empires
de la passion tout sera
équidistant du même
centre imprenable


       Nicolas de Staël, (lumière du nord, lumière du sud)

 

Que vaya por el norte


que vaya por el norte

por donde avanzan mis pasos

o que me quede en el sur

invadida por mis pensamientos

que viaje a otra parte

sin memoria imaginando

un recuerdo despojado

de distancia y de ribera

que viva en los reinos

del sueño o en los imperios

de la pasión todo será

equidistante del mismo

centro inexpugnable


Trad: Colo


20 août 2024

Chanson cubiste / Canción cubista

 

Oui, oui, il existe une poésie cubiste.


Ce poème ressemble un peu à mon mois d’août, composé d’éléments a priori disparates, le seul lien étant l’humain qui le vit, le voit.

Chaleurs extrêmes, un concours de tomates au village, un suicide, de magnifiques documentaires sur des peintres, pluies exagérées, l’aquagym rieur avec les dames du 3º âge, une tarte aux figues....

 


Chanson cubiste

José María Eguren (Lima, Pérou, 1874-1942)



Peupleraie de rectangles bleus.


La tour joyeuse

du dandy.


Volent

papillons photos.


Dans le gratte-ciel

un coq noir en papier

salue la nuit.


Au-delà de hollywood,

dans de distants ténèbres

la ville lumineuse,

des obélisques

de nacre.


Dans le brouillard

la garçonne

étrangle un fantôme.


(Trad:Colo)

Peupleraie, inondations, source:



Merci Marie, c'est superbe 

Canción cubista

de José María Eguren (Lima, Perú 1874-1942)

Alameda de rectángulos azules.

La torre alegre
del dandy.

Vuelan
mariposas fotos.

En el rascacielos
un gallo negro de papel
saluda la noche.

Más allá de hollywood,
en tiniebla distante
la ciudad luminosa,
de los obeliscos
de nácar.

En la niebla
la garzona
estrangula un fantasma.


11 août 2024

La poupée / La muñeca

 Je republie ce billet, relu ce week-end, pour la beauté, l'originalité du poème. 


Dans une interview, je ne sais plus laquelle, Marguerite Yourcenar disait qu’on met plus de soi dans la poésie que dans les romans.

Je veux penser qu’elle était d’humeur légère et ludique quand elle a écrit ce calligramme, s’inspirant d’ Apollinaire, vers 1932.
Petrouchka est l’équivalent russe de notre Polichinelle.
Si vous suivez ce blog depuis un temps, vous savez qui est Silvia Barón Supervielle, c’est elle qui a traduit, tâche extrêmement compliquée, (mais elle a également traduit Borgès!), ce poème en espagnol.
Deux bijoux.
En una entrevista, no me acuerdo cual, Marguerite Yourcenar decía que en la poesía uno pone más de si mismo que en las novelas.
Quiero creer que estaba de humor ligero y lúdico cuando escribió este caligrama, inspirado de Apollinaire, en los años ‘30
Petroushka es el equivalente ruso de nuestro Polichinelle (Polichinela).
La traducción al español, tan complicada (pero ella tradujo a Borges!) es de Silvia Barón Supervielle.
Dos joyas.

Poème pour une poupée achetée dans un bazar russe M. Yourcenar





Je suis
Bleu de roi
Et noir de suie.

Je suis le grand Maure
(Rival   de    Petrouchka).
La nuit me sert  de   troïka;
J’ai  le   soleil pour  ballon  d’or.

Presque aussi vaste que les ténèbres,
Mais    tout    aussi    fragile    qu’un    vivant,
Le moindre souffle émeut mon corps sans vertèbres.

Je    suis    très    résigné,    car   je   suis   très    savant :
Ne   raillez   pas    mon   teint   noir,  ni  mes  lèvres béantes,
Je  suis,  comme  vous,   un   pantin   entre  des   mains   géantes.



Petrouchka, source Wiki




Poema para una muñeca comprada en un bazar ruso.




Soy
El rey
Azul voy
Negra mi ley

Yo soy el gran Moro
(Rival de Petrouchka)
La   noche  fue  mi troica
Y  el  sol  mi  balón  de   oro.

De   las   tinieblas,   el   rellano;
Del    aire    respirante,   el    rocío;
Un  soplo  oscila  en  mi cuerpo vacío.

Soy muy resignado porque soy muy sabio.
No desdeñen mi tez negra o mi abierto labio:
Soy como ustedes un juguete en la enorme mano.
Versión de Silvia Barón-Supervielle

7 août 2024

Un conte / Un cuento

 Silvina O Campo était une grande poétesse et écrivaine Argentine, (1903-1993) qui 

raffolait des nouvelles fantastiques. 

Il y a une dizaine d'années, j'avais traduit ce conte fantastique, ici

En voici un autre. 

 

                                           

LA VOIX

 

Silvina O Campo


 

L’automne ressemble plus à l’été que l’été. C’était une chaude journée d’automne. Avec ma robe en soie bleue et le petit pékinois qu’on m’avait offert pour mon anniversaire, je suis arrivée chez mon fiancé. Je me souviens clairement de ce jour.


- Les jalousies gouvernent le monde -disait la dame Yapura, croyant que je ne me

 mariais pas avec Romirio par jalousie-. Mon fils ne dort qu’avec le chat.


Moi je ne me mariais pas ou ne me décidais pas à me marier avec Romirio pour d’autres raisons. Parfois les mots que les gens disent dépendent de l’intonation de la voix de celui qui les prononce. Je semble divaguer mais il y a une explication. La voix de Romirio, mon fiancé, me répugnait. Quel que fût le mot qu’il prononçait, et bien qu’il montrât du respect en le disant, et bien qu’il ne me touchât pas même un doigt de pied, il me semblait obscène. Je ne pouvais l’aimer. Cette circonstance me peinait, non pour lui mais pour sa mère, qui était bonne et généreuse. Son seul défaut connu était la jalousie, mais elle était déjà vieille et l’avait perdue. Et depuis quand faut-il croire les commérages ? Les gens racontaient qu’elle s’était mariée jeune avec un garçon qui très vite la trompa avec une autre. Ayant des soupçons, elle vécut un mois sans dormir en essayant de découvrir l’adultère. Le découvrir fut comme un coup de couteau au coeur. Elle ne dit rien, mais la nuit même, quand son mari dormait à ses côtés, elle se jeta à son cou pour l’étrangler. La mère de la victime vint le sauver, sans elle il serait mort.

 Mes fiançailles avec Romirio se prolongeaient trop. “Qu’est-ce qu’une voix ?”, pensais-je, “ce n’est pas une main qui caresse avec insolence, ce n’est pas une bouche répugnante qui essaye de m’embrasser, ce n’est pas le sexe obscène et protubérant que je crains, ce n’est pas matériel comme les fesses ni chaud comme le ventre”. Pourtant la voix de Romirio signifiait quelque chose de bien plus désagréable que tout ça pour moi. Comment pourrais-je supporter qu’un homme vive à mes côtés distillant cette voix à qui voudrait l’entendre ! Cette voix viscérale, impudique, scatologique. Mais qui ose dire à son fiancé “ta voix me déplaît, me répugne, me scandalise, est comme, dans le catéchisme de mon enfance, le mot luxure”?

Notre mariage se postposait indéfiniment, sans qu’il existât apparemment de vrais motifs pour cela.

Romirio me rendait visite tous les soirs. Je n’allais que rarement à sa maison sombre, car sa mère, qui était malade, se couchait tôt. Je l’aimais beaucoup pourtant, le petit jardin rempli d’ombres, et Lamberti, le chat tigré de Romirio. Il n’y avait dans tout le voisinage de fiancés aussi réservés que nous. Si nous nous sommes embrassés une fois durant l’été ce fut beaucoup. Nous prendre la main ? Même pas pour rire. Nous étreindre ? On ne dansait plus enlacés. Ce comportement inhabituel faisait soupçonner que nous ne nous marierions jamais.

 




Ce jour-là j’ai emmené le petit pékinois qu’on m’avait offert chez Romirio. Romirio l’a pris dans ses bras pour le caresser. Pauvre Romirio, il aimait tant les petits animaux. Nous étions assis dans le salon comme d’habitude quand le poil de Lamberti s’est hérissé et, avec un bruit de crachement il s’est enfui de notre côté, renversant un pot de fleurs. C’est en pleurant que la dame Yapura me téléphona le jour suivant : cette même nuit et comme toujours, Romirio dormit avec Lamberti dans son lit, mais au milieu de la nuit le chat en furie lui enfonça les griffes dans le cou. En entendant les cris, la mère arriva. Elle parvint à arracher le chat du cou de son fils et l’étrangla avec une ceinture. On dit qu’il n’y a rien de plus terrible qu’un chat furieux. Je n’ai aucun mal à le croire. Je les déteste. Depuis lors Romirio est sans voix et les médecins qui l’ont vu ont dit qu’il ne la retrouverait jamais,

-Tu ne te marieras pas avec Romirio -dit la mère en larmes-. Ce n’est pas pour rien que je disais à mon fils de ne pas dormir avec le chat !

-Je me marierai -ai-je répondu

Depuis ce jour j’ai aimé Romirio.

(Trad: Colo)

La voz


El otoño se parece más al verano que el verano. Era un día caluroso de otoño. Con mi vestido de seda azul y el perrito pequinés que me habían regalado para mi cumpleaños llegué a casa de mi novio. Recuerdo patente aquel día.

Los celos rigen el mundo –decía la señora de Yapura, creyendo que yo no me casaba con Romirio por celos–. Mi hijo duerme solo con el gato.

Yo no me casaba o no me decidía a casarme con Romirio por otros motivos. A veces las palabras que las personas dicen dependen de la entonación de la voz con que las dicen. Parece que divago, pero hay una explicación. La voz de Romirio, mi novio, me repugnaba. Cualquier palabra que pronunciara, aunque tuviera mucho respeto por mí al decirla, aunque no me tocara ni un dedo del pie, me parecía obscena. No podía quererlo. Esta circunstancia me apenaba, no por él sino por su madre, que era generosa y buena. El único defecto que se le conocía eran los celos, pero ya era vieja y los habría perdido. ¿Y acaso hay que creer en las habladurías? La gente contaba que se casó muy joven con un muchacho que pronto la engañó con otra. Al sospechar la cosa, ella vivió un mes sin dormir tratando de descubrir el adulterio. Descubrirlo fue como una cuchillada que recibió en el corazón. No dijo nada, pero aquella misma noche, cuando su marido dormía a su lado, se le echó al cuello para estrangularlo. La madre de la víctima acudió para salvarlo; si no hubiera sido por ella habría muerto.

Mi noviazgo con Romirio se prolongaba demasiado. «¿Qué es una voz?», pensaba yo, «no es una mano que acaricia con insolencia, no es una boca repulsiva que intenta besarme, no es el sexo obsceno y protuberante que temo, no es material como las nalgas ni caliente como un vientre». Sin embargo, la voz de Romirio significaba algo mucho más desagradable que todo eso para mí. ¡Cómo soportaría que un hombre viviera a mi lado repartiendo esa voz a quien quisiera oírla! Esa voz visceral, impúdica, escatológica. ¿Pero quién se atreve a decir a su novio: «tu voz me desagrada, me repugna, me escandaliza, es como en el catecismo de mi infancia la palabra lujuria»?

Nuestro casamiento se postergaba indefinidamente, sin que existieran, aparentemente, verdaderos motivos para ello.


 

Romirio me visitaba todas las tardes. Rara vez yo iba a su oscura casa, porque su madre, que era enferma, se acostaba temprano. Asimismo, me gustaba mucho el jardincito, lleno de sombras, y Lamberti, el gato barcino de Romirio. Novios tan recatados como nosotros no existían en todo el vecindario. Si nos besamos una vez durante el verano de aquel año fue mucho. ¿Tomarnos de la mano? Ni por broma. ¿Abrazarnos? Ya no se usaba bailar abrazados. Este desusado comportamiento hacía sospechar que no nos casaríamos nunca.

Aquel día llevé a casa de Romirio el perrito pequinés que me habían regalado. Romirio lo tomó en brazos para acariciarlo. ¡Pobre Romirio, le gustaban tanto los animalitos! Estábamos sentados en la sala como de costumbre cuando el pelo de Lamberti se erizó y con un ruido de escupida huyó de nuestro lado volteando una maceta con flores. Llorando me llamó al día siguiente la señora de Yapura: aquella misma noche, como siempre, Romirio durmió con Lamberti en su cama, pero en medio de la noche el gato enfurecido le clavó las uñas a Romirio en el cuello. La madre acudió al oír los gritos. Logró arrancar el gato del cuello de su hijo y lo estranguló con una correa. Dicen que nada es tan terrible como un gato enfurecido. No me cuesta creerlo. Los detesto. Romirio quedó sin voz desde entonces y los médicos que lo vieron dijeron que no la recobraría jamás.

No te casarás con Romirio –dijo llorando su madre–. ¡Por algo yo le decía a mi hijo que no durmiera con el gato!

Me casaré –le respondí.

Amé a Romirio desde aquel día.




2 août 2024

Oiseaux en musique....Pájaros en música.

 Pablo Casals, ou Pau Casals1876-1973, violoncelliste, chef d'orchestre et compositeur 

catalan.

 

  El cant dels ocells (en catalan)

Le chant des oiseaux.