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6 oct. 2021

Il est évident que... / Queda de manifiesto que...

 

Nicanor Parra, vous souvenez-vous de lui ?  Né en 1914 et mort en 2018 c'était un poète, mathématicien et physicien chilien qui se présente lui-même comme un antipoète.

Son œuvre a eu une influence profonde dans la littérature sud-américaine. Il est l'un des poètes chiliens les plus connus, avec les quatre grands de la poésie chilienne.

                            "Pleurez si vous voulez, moi pour ma part, je meurs de rire"



Le poème que j’ai choisi aujourd’hui est très long, je n’en ai retenu que quelques strophes,mais il illustre bien je pense cette antipoésie. Des images, des réflexions, sans lien apparent et qui déroutent, font rire parfois aussi. 

 




Lettres du poète qui dort sur une chaise


I

Je dis les choses comme elle sont

Ou nous savons tout d’avance

Ou nous ne saurons jamais absolument rien.


La seule chose qui nous est permise

C’est apprendre à parler correctement.


V

Jeunes

Écrivez ce que vous voulez

Dans le style qui vous semblera le meilleur

Trop de sang est passé sous les ponts

Pour continuer à croire – je crois

qu’on ne peut suivre qu’un seul chemin:

En poésie tout est permis.



VII

  Il est évident

Qu’il n’y a pas d’habitants sur la lune

 

Que les chaises sont des tables

Que les papillons sont des fleurs en perpétuel mouvement

Que la vérité est une erreur collective

Que l’esprit meurt avec le corps.


Il est évident

Que les rides ne sont pas des cicatrices.



XVI

Aphorismes chiliens:

Tous les chardonnerets ont des taches de rousseur

Le téléphone sait ce qu’il dit

Jamais la tortue ne perdit autant de temps

Que quand elle reçut des leçons de l’aigle.


L’automobile est une chaise roulante.


Et le voyageur qui regarde en arrière

Court le sérieux danger

Que son ombre ne veuille le suivre.



XVII

Analyser est renoncer à soi-même

On ne peut que raisonner en rond

On ne voit que ce qu’on veut voir

Une naissance ne résout rien

Je reconnais que les larmes m’en tombent.


Une naissance ne résout rien

Seule la mort dit la vérité

La poésie même ne convainc pas.

Si on nous enseigne que l’espace n’existe pas.


Mais de toute façon

La vieillesse est un fait accompli.

 

Ce sera ce que science détermine.

 

Lire mes poèmes me donne sommeil

Et pourtant ils ont été écrits avec du sang.

(Trad: Colo)

                           "C'était écrit: apparaissent les armes d'extermination massive"



CARTAS DEL POETA QUE DUERME EN UNA SILLA


I
Digo las cosas tales como son
O lo sabemos todo de antemano
O no sabremos nunca absolutamente nada.

Lo único que nos está permitido
Es aprender a hablar correctamente.

V

Jóvenes
Escriban lo que quieran
En el estilo que les parezca mejor
Ha pasado demasiada sangre bajo los puentes
Para seguir creyendo -creo yo
Que sólo se puede seguir un camino:
En poesía se permite todo.



VII

Queda de manifiesto
Que no hay habitantes en la luna

Que las sillas son mesas
Que las mariposas son flores en movimiento perpetuo
Que la verdad es un error colectivo
Que el espíritu muere con el cuerpo

Queda de manifiesto
Que las arrugas no son cicatrices.

XVI

Aforismos chilenos:
Todas las colorinas tienen pecas
El teléfono sabe lo que dice
Nunca perdió más tiempo la tortuga
Que cuando tomó lecciones del águila.

El automóvil es una silla de ruedas.

Y el viajero que mira para atrás
Corre el serio peligro
De que su sombra no quiera seguirlo.

XVII

Analizar es renunciar a sí mismo
Sólo se puede razonar en círculo
Sólo se ve lo que se quiere ver
Un nacimiento no resuelve nada
Reconozco que se me caen las lágrimas.

Un nacimiento no resuelve nada
Sólo la muerte dice la verdad
La poesía misma no convence.
Se nos enseña que el espacio no existe

Se nos enseña que el tiempo no existe
Pero de todos modos
La vejez es un hecho consumado.

Sea lo que la ciencia determine.

Me da sueño leer mis poesías
Y sin embargo fueron escritas con sangre.

22 commentaires:

  1. oui, il y a du "clin d'oeil" dedans ;-)

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  2. il a un coté savant fou qui me plait infiniment et j'aime son poème lui aussi un rien déjanté

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    1. Un savant fou, en apparence et en mots, tout à fait !

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  3. "Que les papillons sont des fleurs en perpétuel mouvement" : des gauras, je parie !
    Je ris au téléphone qui sait ce qu'il dit et je m'inquiète pour le poète qui dort sur sa chaise roulante ;-).
    Une poésie roborative, pour reprendre un mot lu ce matin au Bonheur du jour.

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  4. Ah oui, c'est original et fantaisiste, j'aime beaucoup. Cette poésie suscite des images assez drôles et fortes aussi. Belle trouvaille chez toi aujourd'hui.

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    1. Le poète des images, souvent biscornues et amusantes, oui, oui!

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  5. Ah! J'adore! Merci pour cette découverte. Lire ce poème ne m'a pas de loin pas donné sommeil. :-) Bises alpines.

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    1. Je sais qu'il est peu traduit en français, vraiment dommage.
      Un beso méditerranéen Dédé

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  6. Energie, fantaisie, alchimie . L'excellent Nicanor Parra. Une mine.
    Bizarre comme je sens chez moi quand je le lis !!!
    Merci.

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    1. Ah je cours voir ça !
      Jeune ne n'aimais pas trop Nicanor, mais maintenant je le trouve génial de fantaisie, de non-limites...

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  7. C'est vraiment très bien, j'aime beaucoup. Chaque strophe bien choisie a une petite note en joli bémol : "Il est évident que les rides ne sont pas des cicatrices"... Mais on voit toujours les fleurs papillonner dans les prés !

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    1. Contente que cela vous ait plu, amusé aussi.
      Bon week-end Christian.

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  8. Sous un premier aspect un peu fou, se cache une belle lucidité il me semble, il explore les mots et leur profondeur sous un autre angle, il "monte sur la table" comme dans ce film "Le cercle des poètes disparus", j'aime beaucoup, merci Colo. Douce soirée d'automne. brigitte

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    1. Tu as raison bien sûr, la folie n'est que formelle, explorer le monde ainsi avec lui ouvre beaucoup d'horizons...Belle lumière, bonne semaine, un beso.

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  9. Merci chère Colo pour cette belle découverte pour moi, je ne connaissais pas et j'ai lu ce poème avec beaucoup de plaisir tout en souriant.
    Gros bisous ♥

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    1. Oui, il fait sourire et c'est bienvenu Denise.
      Bon week-end, un beso

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  10. Ces images en cascades, talentueuses et bourrées d'humour ne peuvent qu'entrainer des sourires à la chaine en lisant ce poème.
    "Jamais la tortue ne perdit autant de temps que quand elle reçut des leçons de l'aigle "...il y a tant et tant dans cette phrase, je la garde sous le coude !
    Merci infiniment Colo, Bises.

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    1. Une des phrases qui m'a fait réfléchir moi aussi, Claudie.
      Merci pour tes mots, un beso.

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  11. "Je dis les choses comme elle sont

    Ou nous savons tout d’avance

    Ou nous ne saurons jamais absolument rien."

    J'adore ces mots...

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    1. Moi aussi je les fais miens ces vers, nous voilà déjà 2 !

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