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29 mai 2014

Gardiens des signes / Guardianes de los signos



Les figuiers de barbarie qui bordent l'entrée des villages ont toujours été les gardiens des signes. Quand nous étions enfants, il y a quelques minutes, les figuiers nous indiquaient le chemin. C'est pour cela que nous restions dehors fort tard, en compagnie des chacals et des étoiles. C'est pour cela que nous cachions les broutilles que nous volions – une datte, une figue sèche, un cahier – dans leurs lits d'épines. Quand nous grandîmes, sans savoir ni comment ni quand, leurs fleurs jaunes nous incitaient à aborder les filles qui allaient à la fontaine, souriantes, et nous nous vantions des épines qui s'enfonçaient dans nos mains. Quand la fleur se fana et surgit le fruit, les figuiers se montrèrent incapables de repousser les armes de l'armée assassine. Mais ils poursuivirent le rôle de gardiens des signes: là-bas, derrière les figuiers, il y a des maisons enterrées vivantes, et des royaumes, des royaumes de souvenirs, et une vie qui attend un poète qui ne se délecte pas dans les ruines, à moins que le poème ne l'exige.”

Mahmud Darwix, La Trace du papillon
(trad: Colo)


Il fleurit en ce moment ici / Florece en este momento aquí ....foto Colo



Las chumberas que flanquean la entrada de los pueblos han sido siempre las guardianas de los signos. Cuando éramos niños, hace unos minutos, las chumberas nos indicaban el camino. Por eso nos quedábamos hasta tarde fuera, en compañía de los chacales y de las estrellas. Por eso escondíamos las pequeñeces que sisábamos —un dátil, un higo seco, un cuaderno— en sus alcobas de espinas. Cuando crecimos, sin saber cómo ni cuándo, sus flores amarillas nos incitaron a abordar a las chicas que iban a la fuente risueña, y nos jactábamos de las espinas que se nos clavaban en las manos. Cuando la flor se ajó y el fruto brotó, las chumberas se mostraron incapaces de repeler las armas del ejército asesino. Pero siguieron siendo las guardianas de los signos: allí, detrás de las chumberas, hay casas enterradas vivas, y reinos, reinos de recuerdos, y una vida que aguarda a un poeta que no se recree en las ruinas, a menos que el poema lo exija.”

La huella de la mariposa , Mahmud Darwix

Traducción de Luz Gómez García

24 mai 2014

Trouvailles et retrouvailles


Por esta vez me vaís a perdonar lectores hispanófonos, este poema sobre la ciudad de Lyon (Francia) tiene tantas conotaciones tipicamente locales que me resulta imposible traducirlo.

 (Clic pour agrandir les photos, comme toujours!)
Place Bellecour

Marseille-Lyon, en train, c'est pas long.

Lyon choisie pour le Rhône et la Saône, señor MAH adore les villes-sur-eau, et surtout pour de belles rencontres d'ami(e)s de blog dont je connaissais depuis longtemps les mots, certaines idées et goûts.

Grâce à Dame Ivre de livres et Dame Sable du temps, mais aussi à Dame Mauvaise Herbe et Sieur Tunkasina, nous avons passé trois jours à découvrir la ville, les fleuves, monté (et descendu!), navigué, mangé lyonnais, beaucoup ri et bavardé. 
 
Berge du Rhône, aménagée
 
Peut-on rêver meilleurs guides, souhaiter des échanges plus chaleureux?

Théấtre antique de Lyon,

Je ne vais pas vous raconter tout ce que nous avons fait/vu...un poète a eu le bonne idée de l'écrire, mais oui!.

Petite visite de Lyon
 
Sans tarder, viens, partons, ma main sur ton épaule
Et allons visiter la capitale des Gaules
Voyons les bons côtés du plus poli des gônes :
Guignol et son bâton guident entre Rhône et Saône
Gnafron le vieil ivrogne, buveur de Beaujolais
Pour manger une rosette dans un bouchon lyonnais
Goûter une andouillette, une quenelle, un Jésus
Et finir sans vergogne une cervelle de Canut. 

Du haut de la Croix-Rousse, Jacquard a sa statue
Ses métiers à tisser aujourd'hui se sont tus
Leurs soieries ont cessé toutes leurs activités
Souvenir sous la mousse des canuts révoltés
Empruntons la pratique crémaillère du métro
Jusqu'à l'Hôtel de Ville et la place des Terreaux.
Des boutiques de tout style, l'opéra, les séjours
Jalonnent la République jusqu'à la place Bellecour
Où sur un socle en pierre se tient un cavalier
Louis XIV en romain, dépourvu d'étriers.

Reprenons le chemin du Vieux-Lyon à présent
Et montons à Fourvière en passant par Saint-Jean
Par le funiculaire joignons la Basilique
Là, allumons un cierge devant une mosaïque
Consacrée à la Vierge puis regardons la ville
La soirée des lumières par delà la presqu'île
Descendons la colline en simple pénitents
Mais évitons la foule comme les vieux résistants.

En prenant les traboules qui passent au Vieux-Lyon
Une brioche aux pralines et voyons le crayon
Du Crédit Lyonnais qui pointe vers Part-Dieu
Sa gare et ses commerces, sa mine sur les cieux
Ce son, qui bouge et berce, sort de l'auditorium
Mais est-ce qu'on connaît vraiment tout Lugdunum
Si l'on n'a pas tourné au Parc de la Tête d'Or ?
Vu les trams, les musées, le P4 et encore
Bien sûr encourager, emporté par l'élan
L'Olympique Lyonnais au stade de Gerland. 

Et puisqu'il faut partir prend donc un peu de soie,
Un saucisson et sache en retournant chez toi
De la gare de Perrache, passer par la fenêtre
Une main en souvenir d'une drôle de marionnette.

 
Poème de
Sylvain BLAVET trouvé sur Poésie française 

 
Fresque - Mur des Canuts  Merci Tunkasina

Si la vieille ville de Lyon est vraiment agréable, le nouvel aménagement à Confluences, entre Saône et Rhône, est surprenant de modernité....


..et, semble-t-il, réalisé dans le respect de l'environnement.
Si vous ne voyez pas bien les petits cygnes sur le dos de leur mère, clic.

21 mai 2014

Le doigt et la mer / El dedo y el mar



Gabriela Mistral
(poète, diplomate chilenne, Prix Nobel de littérature 1945)

Ici, une sorte de comptine, ou chanson où Marseille et un petit doigt ...
Aquí una canción infantil donde Marsella y un dedito...



La manchote

Mon petit doigt une palourde le prit,
et la palourde dans le sable tomba,
et le sable fut avalé par la mer.
Et de la mer un baleinier la pêcha
et le baleinier arriva à Gibraltar;
et à Gibraltar chantent les pêcheurs:
Nouvelle de terre sortie de la mer,
nouvelle ce petit doigt de fillette:
que celle qui est manchote vienne le chercher!”.

Qu'on me donne un bateau pour aller le chercher,
et pour le bateau un capitaine,
pour le capitaine un solde,
et pour solde demande la ville:
Marseille avec tours et places et bateaux,
du monde entier la meilleure ville,
qui ne sera pas belle avec une fillette
à qui la mer a volé le petit doigt,
et les baleiniers chantent à tue-tête
et attendent à Gibraltar...
(Trad: Colo)

Entrée du vieux port de Marseille. (Photo Colo) (Clic pour agrandir)


La manca


Que mi dedito lo cogió una almeja,
y que la almeja se cayó en la arena,
y que la arena se la tragó el mar.
Y que del mar la pescó un ballenero
y el ballenero llegó a Gibraltar;
y que en Gibraltar cantan pescadores:
«Novedad de tierra sacamos del mar,
novedad de un dedito de niña:
¡la que esté manca lo venga a buscar!»

Que me den un barco para ir a traerlo,
y para el barco me den capitán,
para el capitán que me den soldada,
y que por soldada pide la ciudad:
Marsella con torres y plazas y barcos,
de todo el mundo la mejor ciudad,
que no será hermosa con una niñita
a la que le robó su dedito el mar,
y los balleneros en pregones cantan
y están esperando sobre Gibraltar...

18 mai 2014

Au vent de Marseille / Al viento de Marsella

Une semaine de découvertes, tant humaines - si chaleureuses! -, qu'architecturales; accompagnés de dame nature, si belle entre Marseille et Lyon. Le mistral ne nous a pas quittés, le soleil non plus.


Una semana de descubrimientos... tanto humanos y cálidos, como arquitectónicos; acompañados por una naturaleza tan bella entre Marsella y Lyon. El mistral no se separó de nosotros, tampoco el sol.

C'est en suivant des lignes, passerelles, ponts, rues, fils de pêcheurs,  allées de fleurs que nous nous sommes baladés, souvent au hasard, plusieurs fois accompagnés d'excellents amis-guides. Un vrai plaisir.

Fue siguiendo lineas, pasarelas, puentes, calles, hilos de pesacadores, sendas de flores como paseamos, a menudo al azar, varias veces acompañados de excelentes guías-amigos. ¡Un placer!

Aujourd'hui Marseille et, bien sûr l'unique, l'innovateur Mucem; et  derrière La Major, la cathédrale.
Hoy Marsella y, claro el único e innovador Mucem; detrás, La Major, la catedral.

Superbe et impressionnante la passerelle qui mène du vieux quartier de la ville au musée.
Magnífica e impresionante la pasarela que lleva desde el barrio antiguo al museo.






La cour intérieure est ouverte à tous, on peut s'y installer confortablement, y contempler la mer et la rive opposée à travers ces dentelles qui recouvrent tout l'édifice. Magique.
El patio interior está abierto a todos, uno se puede instalar confortablemente, contemplar el mar y el lado opuesto del puerto a través de este encaje que cubre todo el edificio. Mágico.

Sur le blog d'Obni, de nombreux billets sur Marseille, le vieux port, l'ombrière-miroir géant...


Odeurs...Olores...

Chemin de fleurs, samedi matin / Camino de flores, sábado por la mañana


Retour de pêche...la taille des sardines ne m'a pas impressionnée! :-))
Vuelta de la pesca...el tamaño de las sardinas no me impresionó :-))


Dans le vieux quartier, le Panier, des ruelles en pente, des escaliers partout. Un peu essoufflée, en m'arrêtant j'ai vu ce tag.

En el barrio antiguo, le Panier, las callecitas suben, escaleras por todas partes.
Es bastante fuera de aliento me paré y vi ese tag.




8 mai 2014

Lao Tse aurait dit... / Lao Tse habría dicho...




...ceci: "Un bon voyageur n'a ni plans fixes ni l’intention d'arriver".

Ah bon!

...esto: “Un buen viajero no tiene planes fijos ni la intención de llegar”. 

Ah! Bueno. 



Fernando Maldonado (Colombia)




J'espère quand même toucher terre, du côté de Marseille, et passer quelques jours délicieux et surprenants...
À bientôt, portez-vous bien.



Espero sin embargo poner el pie, allí, por Marsella, y pasar unos días sorprendentes...
Hasta pronto, portaos bien.

3 mai 2014

Vivre entre deux .../ Vivir entre dos....


Ce billet est long, prenez votre temps...nous poursuivons avec Silvia Baron Supervielle

Esta nota es larga, tomad vuestro tiempo...seguimos con Silvia Baron Supervielle





sans aller vers la mer
ni venir vers le fleuve
ni traduire le murmure
momentané de l'ombre
sans reprendre l'aventure
à la dérive et l'amour
enfoui dans la tranchée
ni retrouver la plaine
suspendue aux étoiles
ni parler du territoire
de l'espace dépris
de son pays


Sin ir hacia el mar
ni venir hacia el río
ni traducir el murmullo
momentáneo de la sombra
sin retomar la aventura
a la deriva y el amor
sepultado en la trinchera
ni encontrar la llanura
suspendida en las estrellas
ni hablar del territorio
del espacio abandonado
de su país.
(trad: MAH-Colo)

Silvia Baron Supervielle - Autour du vide

(les poèmes sont probablement traduits par elle-même, je n'en ai pas la traduction en espagnol et l'ai réalisée avec MAH)



Silvia Baron Supervielle vit à Paris depuis 1961 et commença à écrire en français quelques année plus tard. Je vous l'ai dit dans le billet précédent, avec le temps elle est devenue une traductrice hors pair.

Née à Buenos Aires en 1934, dans le Río de la Plata, sa mère, qui mourut quand elle avait 2 ans, était Uruguayenne d'origine espagnole, et son père Argentin d'origine française. C'est donc sa grand-mère paternelle, cousine de Jules Supervielle qui l'éleva en français. Mais c'est en espagnol qu'elle vécut son enfance et sa jeunesse.

“–Una argentina que vive en París, escribe en francés pero se siente del Río de La Plata. ¿Por qué?
- Une Argentine qui vit à Paris, écrit en français mais se sent du Río de la Plata. Pourquoi?
  • Al escribir en francés no varían los recuerdos de la infancia y de la adolescencia, que son esenciales. Además me siento cerca de los escritores del Río de la Plata. Por eso los he traducido. No soy una escritora francesa. Escribo en francés pero pertenezco al Río de la Plata.
    - En écrivant en français, les souvenirs de l'enfance et de l'adolescence, qui sont essentiels, ne varient pas. De plus je me sens proche des écrivains du Río de la Plata. C'est pour cela que je les ai traduits. Je ne suis pas une écrivaine française. J'écris en français mais je suis du Río de la Plata.”



Adulte elle voyage et décide de s'installer à Paris. Elle raconte:


"–Yo escribía poemas y cuentos en español, pero no pensaba seriamente en escribir. Tardé bastante en cambiar de lenguaje. Por complacer amigos, que querían leer algo mío, traté de traducirme, pero eran poemas largos, a veces sonetos. Entonces me puse a escribir en francés. Me gustó mucho, veía las cosas de otra manera. Le temía a la nueva lengua y sospecho que por ello escribí poemas breves. Fue la revelación de un estilo y con él, de un universo. Esos poemas me devolvían mi imagen, la soledad en la que estaba. Me vino la idea que podía ser una escritora. No porque mis poemas estuvieran en francés sino porque estaban en otra lengua. Las palabras estaban lejos. La desorientación me convenía.
- J'écrivais des poèmes et des contes en espagnol, mais je ne pensais pas sérieusement à écrire. J'ai pas mal tardé à changer de langue. Pour faire plaisir à mes amis, qui voulaient lire quelque chose de moi, j'ai essayé de me traduire, mais c'était de longs poèmes, parfois des sonnets. Alors je me suis mise à écrire en français. Ça m'a beaucoup plu, je voyais les choses d'une autre façon. J'avais peur de cette nouvelle langue et je soupçonne que c'est pour cela que j'ai écrit des poèmes courts. Ce fut la révélation d'un style et avec lui, d'un univers. Ces poèmes me rendaient mon image, la solitude dans laquelle je me trouvais. L'idée me vint que je pouvais être écrivaine. Pas parce que mes poèmes étaient en français mais parce qu'ils étaient dans une autre langue. Les mots étaient lointains. La désorientation me convenait."


alrededor del vacío
me desnudo
para unirme
al perfil
en suspenso
aéreo

 autour du vide
je me dénude
pour m’unir
au profil
en suspens
aérien 


On lui doit des traductions en français de Jorge Luís Borges, Alexandra Pizarnik, Silvina Ocampo, de Robeto Juarroz (tous originaires de Buenos Aires), puis la traduction en espagnol de Marguerite Yourcenar*

–“Yo pertenezco a los ausentes”, usted ha dicho.
-”J'appartiens aux absents” avez-vous dit.
Tengo la casa llena de fotos de ausentes. Los que están lejos y los que se han ido mas lejos aún. Todos mis amigos están entre mis libros junto a escritores que admiro como Borges, Silvina Ocampo, Marguerite Yourcenar, etc. Sus rostros se acompañan. Estoy rodeada de ausentes maravillosos. No los cambiaría por muchos presentes.
-J'ai la maison pleine de photos d'absents. Ceux qui sont loin et ceux qui sont partis plus loin encore. Tous mes amis sont entre mes livres à côté d'écrivains que j'admire comme Borges, Silvana Ocampo, Marguerite Yourcenar, etc. leurs visages m'accompagnent. Je suis entourée de merveilleux absents. Je ne les échangerais pas pour beaucoup`de présents.”


Leon Spilliaert Marine avec sillon



au cours de la traversée
la mer articula une langue
hors des registres du son 
et ce fut voir le sillage
se détacher de la cabine
et les périodes de la houle
ouvrir un étrange miroir
sur la surface circonscrite
ce fut commencer à suivre
des inflexions étonnantes
sur le hublot hermétique 
et ni taire ni chanter
mais fendre le rythme 
naturel du courant



(Extrait de Pages de voyage)



durante la travesía

el mar articuló un lenguaje

fuera del registro del sonido

y ver la estela

separarse de la cabina

y los periodos de oleaje

abrir un extraño espejo

sobre la superficie circunscrita

fue comenzar el rastreo

de inflexiones sorprendentes

sobre la hermética ventanilla

y ni cantar ni callarse

sino atravesar el ritmo

natural de la corriente


(Trad. MAH; Colo)



Pour terminer, et c'est la partie de son interview qui me touche le plus, elle explique comment elle se sent toujours “entre deux” et contente de l'être:



"-¿Podría volver a Buenos Aires a vivir?
-Pourriez-vous revenir à Buenos Aires?
Siempre me he dejado llevar por lo que se imponía. No creo que pueda hacer una elección. Si llega el momento, en que el regreso se impone, volveré. Si no, me quedaré en París. Ser extranjero –y ahora lo soy en todas partes– es también una manera de ser libre. La no integración es una libertad. No estoy integrada en ningún lado. Y no busco estarlo. No sé formar parte de un grupo humano. Pertenezco sólo a los que quiero que estén allí o aquí. Y Al Margen es quizá mi patria.
- Je me suis toujours laissé porter par ce qui s'imposait. Je ne pense pas pouvoir choisir. Si arrive le moment où le retour s'impose, je reviendrai. Sinon je resterai à Paris. Être étranger – et maintenant je le suis partout- est aussi une façon d'être libre. La non intégration est une liberté. Je ne suis intégrée nulle part. Et je ne cherche pas à l'être. Je ne sais pas faire partie d'un groupe humain. Je n'appartiens qu'à ceux que je veux qu'ils soient ici ou ailleurs. Et EN MARGE est peut-être ma patrie."


Source de l'interview, (2-09-2013)
traduction Colo

* Si l'amitié qui a surgi entre elle et Marguerite Yourcenar vous intéresse, lisez ceci: