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7 oct. 2016

Noyé dans la brume du Grand Tout / Anegado en la bruma del Gran Todo




Poursuivons avec François Cheng et ses interrogations sur la beauté.
Sigamos con François Cheng y sus preguntas sobre la belleza.


"Envisager, dévisager, est-ce à dire que nous sommes condamnés à rester éternellement à l'extérieur, face à l'univers vivant et sa beauté?
Une ultime interrogation, inévitablement, nous assaille: nous sommes sensibles à la beauté, mais l'univers, lui, reste apparemment indifférent, comme expliquer ce paradoxe?
"Contemplar, escrutar, ¿significa eso que estamos condenados a quedarnos eternamente al exterior, frente al universo vivo y su belleza?
Una última interrogación nos invade inevitablemente: somos sensibles a la belleza, pero el universo queda aparentemente indiferente, ¿cómo explicar esa paradoja? 
 
Nous tombons en extase devant tel paysage, tel arbre, telle fleur, alors qu'eux-mêmes s'ignorent et nous ignorent. Sommes-nous enfermés dans notre subjectivisme bien vain, pour ne pas dire ridicule?
Nos extasiamos delante de tal paisaje, tal árbol, tal flor, mientras ellos mismos se ignoran y nos ignoran. ¿Estamos nosotros encerrados en nuestro subjetivismo vano, por no decir ridículo? 
 
Il y a peut-être une autre compréhension possible. Pour la cerner, il me faudrait faire un détour par la peinture chinoise. On connaît plus ou moins cette peinture pour l'avoir vue par-ci par-là, dans des expositions ou à travers des reproductions. On y admire de grands rouleaux représentant d'immenses paysages, dans lesquels figurent toujours un ou plusieurs petits personnages.
Pour un œil occidental habitué à la peinture classique où les personnages sont campés au premier plan et le paysage relégué à l’arrière fond, le petit personnage dans le tableau chinois paraît complètement perdu, noyé dans la brume du Grand Tout. 
 
Tal vez haya otra comprensión posible. Para delinearla, tendría que desviarme por la pintura china. Conocemos más o menos esa pintura por haberla visto aquí y allá en exposiciones o en reproducciones. Admiramos grandes rollos con inmensos paisajes, en los cuales siempre figuran uno o varios pequeños personajes.
Para un ojo occidental acostumbrado a la pintura clásica donde los personajes están esbozados en primer plano y el paisaje relegado al trasfondo, el pequeño personaje del cuadro chino parece completamente perdido, anegado en la bruma del Gran Todo. 
 
Mais si, avec un peu de patience et d'abandon, l'on consent à contempler ce paysage mû par le souffle de l'infini, jusqu'à y pénétrer en profondeur, on finit par prêter attention à ce petit personnage, à s'identifier à cet être sensible qui, placé à un point privilégié, est en train de jouir du paysage. On s'aperçoit qu'il en est le point névralgique, qu'il est l’œil éveillé et le cœur battant d'un grand corps. Il est pour ainsi dire le pivot autour duquel se déploie le paysage, de sorte que celui-ci peu à peu devient son paysage intérieur. (...)” 
En Europe parfois aussi...A. Sisley 1899, Courbe de la Seine à Saint-Cloud
 
Pero si, con un poco de paciencia y de abandono, consentimos en contemplar ese paisaje movido por el soplo del infinito, hasta penetrarle, acabamos por prestar atención a ese pequeño personaje, a identificarnos con ese ser sensible que, situado en un punto privilegiado, está disfrutando del paisaje. Notamos que es él el punto neurálgico, que es el ojo despierto y el corazón batiente de un gran cuerpo. Es, por así decir, el eje alrededor del cual se despliega el paisaje, de tal forma que este se convierte en su paisaje interior.(...)”

30 commentaires:

  1. si tu viens en Belgique cet hiver, tu pourras aller voir l'expo d'estampes japonaises!
    http://www.kmkg-mrah.be/fr/expositions/ukiyo-e

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    1. Cela va être superbe dis donc!
      Si l'automne me redonne santé, j'irai sans aucun doute en Belgqiue cet hiver, merci!

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  2. Superbe texte, qui me donne fort envie de lire cet essai de François Cheng.
    Je mettrai ton billet en lien dans celui que je prépare pour l'instant, cela s'impose. Bonne soirée, dame Colo.

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    1. Surtout ne l'achète pas, je te l'envoie la semaine prochaine.
      Si cela s'impose..merci!
      Bonne soirée dame Tania, un beso.

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  3. La réflexion est intéressante... Et amène à réaliser une fois de plus combien le fait d'être né et dépendant d'une culture et pas d'une autre nous ouvre des univers en nous en fermant d'autres, lesquels sont fermés ou ouverts dans d'autres cultures...

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    1. C'est si vrai! Cet extrait m'a semblé lumineux, et je me suis demandé comment les personnes d'autres cultures percevaient nos peintures. Certaines, c'est sûr, doivent les choquer.
      Bon week-end Edmée.

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  4. Cette différence dans la manière de regarder le monde autour de nous est fascinante ; dommage que nous ne cherchions pas davantage à nous enrichir les uns les autres. Des hommes comme François Cheng sont précieux pour mettre le doigt sur l'essentiel.

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    1. En effet. Peut-être sommes-nous tellement et si faussement convaincus que notre façon de voir est la bonne, que nous ne cherchons pas plus loin aussi...
      Bonne journée Aifelle

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  5. J'avais quelques billets de retard, Colo. je viens de les lire. Je repars en me disant que oui, habiter chaque espace chaque instant poétiquement, là est le véritable défi. Passe un bon week-end.

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  6. Il en est de la lecture comme de la peinture : savoir indiquer aux yeux le chemin qui mène aux sentiments, et à l'émotion en particulier. Tout est dit dans ce tableau de Sisley

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    1. Il est bien dommage qu'on ne nous apprenne pas à "voir" ni comprendre les cultures si différentes de la nôtre...Pour moi ce texte a été un vrai éveil.

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  7. La beauté est autour de nous, paysages, fleurs, ciels et chaque personne, je pense, s'émerveille à sa façon et pour d'autres sujets.
    La toile de Sisley me plaît infiniment. J'aime la profondeur du paysage, l'harmonie des verts et le ciel d'une grande douceur. Tout est beau.
    Merci chère Colo pour ton billet et les mots de François Cheng.
    Doux week-end et mes bisous ♥

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  8. Merci Denise, bon week-end à toi aussi, un beso.

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  9. Quelle magnifique analyse de François Cheng. Je regarderai autrement les petits personnages du fond de la toile. Merci et bon dimanche.

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    1. Partager ce genre de texte est un vrai plaisir, bon dimanche à vous aussi!

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  10. Un auteur cher à mon coeur, tout comme la beauté comme interrogation. Qu'est ce qui nous touche dans ce que nous considérons comme beau ?
    Merci pour ton billet que j'ai parcouru plusieurs fois :-)

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  11. Je suis moins sensible à ce passage ( nous sommes sensibles à la beauté, mais l'univers, lui, reste apparemment indifférent, comme expliquer ce paradoxe?) que je ressens plus "capillotracté"...mais les petits personnages emportent l'adhésion !

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    1. Je suis d'accord, certaines phrases sont...enfin, comme celle qui suit l'extrait:" Si nous pouvons penser l'univers, c'est que l'univers pense en nous".
      Les personnages, nous, une sorte de leçon d'humilité que leur taille.

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  12. On aurait bien envie d'être à sa place au milieu de cette oeuvre! Bisous

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  13. petit problème informatique qui viens de se résoudre ouf
    je poursuis avec toi le chemin de la beauté, des chinois aux impressionnistes voilà un beau parcours

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    1. Oh, c'est la peste quand ça arrive et tu es douée si tu arrives à arranger ces trucs!

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  14. Un itinéraire avec Cheng : le paysage intérieur y gagne en beauté.

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  15. J'aime beaucoup écouter François Cheng et le lire. C'est profond et pousse à la réflexion sur le changement de points de vue et les codes.
    Si tu t'intéresse à l'analyse des tableaux, à l'évolution des codes de la peinture occidentale, au rôle de la construction de la connaissance par le spectateur, lis Daniel Arasse. On y apprend beaucoup de choses.
    Mais l'itinéraire philosophique et poétique de François cheng est un vrai bonheur.

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    1. Daniel Arasse, je note.
      Grand merci Maïté, tu es une source d'infos magnifique!

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  16. De quoi se poser des questions sur notre place dans le paysage. Merci beaucoup.

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