Dans
“7 femmes” Lydie Salvayre consacre 43 pages à Marina Tsvetaeva
(1892 - 1941). J'ai délibérément omis beaucoup d'éléments dont
la Révolution russe (voir le billet de Dominique
aujourd'hui) ainsi que la biographie commentée de Marina.
Voici
des extraits qui, j'espère, vous feront comprendre sa personnalité.
En
“ 7 mujeres” Lydie Salvayre le dedica 43 páginas a Marina
Tsvetaeva (1892 - 1941). Omití deliberadamente muchos elementos
entre los cuales la Revolución rusa, así como la biografía comentada
de Marina.
Aquí
unos extractos que, espero, os harán comprender su personalidad.
Pour accompagner la lecture, la voix d' Elena Frolova chante un poème de Marina
Para acompañar la lectura, la voz de Elena Frolova canta un poema de Marina
“ Ce
cri qui donne le frisson fut celui d'une écorchée vive qui affirma,
avec une intransigeance folle, que là où il y avait la poésie, il
y avait le monde.
Une
femme qui (…) ne céda jamais à l'accouplement effroyable du
conformisme et de la terreur qui sévissaient alors dans sa Russie
natale.
Et
qui décida d'en finir lorsque la misère ajoutée à la déréliction
et à une politique meurtrière étranglèrent définitivement sa
parole poétique, indéfectiblement liée à sa capacité d'aimer”
“Ese
grito estremecedor fue el de una despellejada viva capaz de afirmar,
con una total intransigencia, que allí donde existe la poesía,
existe el mundo.
Una
mujer que (…) no cedió nunca al espantoso apareamiento entre el
conformismo y el terror que reinaba entonces en su Rusia natal. Eso
la decidió a poner fin a su vida cuando la miseria, añadida al desamparo y a
una política asesina, estrangularon definitivamente su palabra
poética, unida indefectiblemente a su capacidad de amar.”
“ Elle
s'appelait Marina Tsvetaeva, et la poésie, disaient ses proches,
sourdait d'elle et jaillissait comme l'eau vive des fontaines.
Une
poésie (…) qui procédait d'un sentiment d'exil fondamental (…)
doublé d'un goût de la vérité dont elle ne pouvait ou ne voulait
diluer la violence. “Et maintenant je vous avoue une de mes
vilaines passions, écrivit-elle à Pasternak: tenter les gens
(les éprouver) par une sincérité excessive, sans précédent...La
tentation par la vérité. Qui la supportera?
Ils
furent rares ceux qui la supportèrent, et là fut en partie son
malheur.”
“Se
llamaba Marina Tsvetaeva, y la poesía, decían sus allegados, manaba
de ella y brotaba como el agua viva de las fuentes.
Una
poesía (…) que procedía de un sentimiento de exilio fundamental
(…) añadido a una inclinación por la verdad de la cual no podía
o no quería diluir la violencia. “Ahora os confieso una de mis
feas pasiones, le escribía a
Pasternak: tentar a la
gente (ponerlos a prueba) por una sinceridad excesiva, sin
precedentes... La tentación por la verdad. ¿Quien lo soportará?
Pocos
fueron los que lo soportaron, y de allí vino, en parte, su
desgracia.”
“ Elle
disait qu'elle était condamnée aux mots (…) condamnée à vouloir
l'impossible qui émane du domaine des mots.
Elle
disait qu'elle ne tenait pas la plume, que c'était la plume qui la
tenait”
“Decía
que estaba condenada a las palabras(...) condenada a querer el
imposible que emana del mundo de las palabras.
Decía
que no era ella quien sostenía la pluma, que era la pluma la que la
sostenía a ella.”
“ Cette
écriture, de son vivant, se heurta à une surdité quasi totale et
qui, d'une certaine façon, la tua.
Toutes
les lettres qu'elle envoya aux écrivains lors de son exil français
demeurèrent sans réponse, et presque tous ses manuscrits refusés.
Elle
en éprouva un désespérant sentiment d'exclusion. C'est, à n'en
pas douter, ce sentiment, joint à des conditions d'existence
effroyables, qui la poussa à regagner, avec au cœur un terrible
pressentiment, la Russie soviétique qu'elle avait fuie en 1920 et où
elle finit par se pendre en 1941, deux ans après son retour.”
“Esta
escritura, durante su vida, tropezó con una sordera casi total que,
de alguna manera, la mató.
Todas
las cartas que envió a los escritores, durante su exilio francés,
permanecieron sin respuesta, y casi todos sus manuscritos fueron
rechazados.
Todo
eso hizo que sufriera un desesperante sentimiento de exclusión. Es
ese sentimiento el que, sin duda, unido a unas condiciones de
existencia espantosas, la empujó a regresar, con un intimo y
terrible presentimiento, a la Rusia soviética de la cual había
huido en 1920 y en la que acabaría por ahorcarse en 1941, dos años
después de su vuelta.”
Marina et Sergueï Efron - leur mariage |
Femme
d'aucun compromis “..son refus, par exemple, de répondre aux
attentes des cercles parisiens de l'émigration russe, malades d'une
nostalgie qui n'était pas la sienne. (…)
“ Et
son même refus d'adresser un compliment à Staline comme la plupart
s'y pliaient.”
“ Tsvetaeva
était de cette poignée d'insensés pour qui vivre se confondait
avec le refus farouche de prendre un quelconque parti, et ce aux fins
de protéger une liberté intérieure qui leur était précieux, leur
unique, leur inestimable bien.”
Mujer
de ningún compromiso “..su negativa, por ejemplo, a responder
a las expectativas de los círculos parisinos de la emigración rusa,
enfermos de una nostalgia que no era la suya. (…)
“Como
el rechazo a enviar algún cumplido a Stalin, a lo que la mayoría se
había sometido.”
“Tsvetaeva
pertenecía a ese puñado de insensatos para los que vivir se
confundía con el rechazo feroz a tomar cualquier partido, y eso a
fin de proteger una libertad interior que les era preciosa, su única,
su inestimable fortuna.”
Lydie
voue une admiration sans borne à la correspondance entre Marina et
Pasternak: “(...) une des plus belles correspondances qu'il
m'ait été donné de lire (…).
Correspondance
d'âme à âme, de rêve à rêve,
" De
mon rêve j'ai
Sauté
dans le tien.”
Une
correspondance“ Où
chacun devient meilleur, le plus juste, le plus sensible lecteur de
l'autre, dans une complicité telle qu'elle les fait égaux.
Où
les deux, descendant jusqu'aux grands fonds
d'eux-mêmes, finissent par se joindre et, amoureusement,
s'entre-influencer.”
Lydie
profesa una admiración sin limites a la correspondencia entre Marina
y Pasternak: “(...) una de las más bellas correspondencias que
he podido leer (…)
Correspondencia
de alma a alma, de sueño a sueño,
“De
mi sueño
al
tuyo he saltado.”
Una
correspondencia “En la que cada uno se vuelve mejor, el más
certero, el más sensible lector del otro, en tal complicidad que les
hace iguales.
Donde
los dos, bajando hasta tocar el fondo de ellos mismos, acaban por
encajarse y, amorosamente influenciarse.”
Marina, Rilke , Pasternak |
“ Ce
qui n'empêche nullement Tsvetaeva d'aimer d'un amour inentamable son
mari Sergueï Efron et de s'enticher à intervalles très réguliers
d'un homme ou d'une femme sur qui elle a jeté son dévolu.
(…)
Amours qui sont courtes folies.
(…)
Aventures où elle se jette, se rue, à bride abattue, Cheval
ruant rompt l'attache.
Grâce
auxquelles, perdant toute mesure, elle s'exalte jusqu'au délire.
Mais c'est un bien. Car l'homme, écrit-elle, ne voit
correctement le monde que dans la suprême exaltation”
“Eso
no impide a Tsvetaeva amar de un amor sin merma a su marido Sergueï
Efron ni encapricharse a intervalos muy regulares de un hombre o una
mujer en los que ella se hubiera fijado.
(…)
Amores que son cortas locuras.
(…)
Aventuras en las que se echa, se abalanza, desenfrenada, Caballo
encabritado rompe las bridas.
Gracias
a esos amores, desmesurada,
se exalta hasta el delirio. Pero no se daña. La persona,
escribe, tan
solo en la suprema exaltación ve correctamente el mundo.”
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Des liens en français:
- Un dossier sur le
site esprits
nomades
- Deux blogs-amis qui y font mention:
http://textespretextes.blogs.lalibre.be/archive/2012/03/16/pouchkine-intime.html
http://textespretextes.blogs.lalibre.be/archive/2008/02/29/vivre-dans-le-feu.html
http://textespretextes.blogs.lalibre.be/archive/2008/02/29/vivre-dans-le-feu.html
En español: una dirección con muchos poemas de ella, una corta biografía
un lien vers ce magnifique billet a été ajouté à un article sur la fin de l'URSS
RépondreSupprimerUne femme d'exception pour un pays d'exception !!!
D'un blog à l'autre, merveille!
SupprimerUn billet vibrant, merci ! Lydie Salvayre rend bien l'intensité qui était le maître mot de cette poétesse.
RépondreSupprimerJe n'ai pas encore lu sa correspondance avec Pasternak, cela ne saurait tarder.
(Merci pour le lien, je me permets d'ajouter celui vers la toute première page de mon blog : http://textespretextes.blogs.lalibre.be/archive/2008/02/29/vivre-dans-le-feu.html )
A bientôt.
Un livre que tu liras sûrement.
SupprimerOh, ce lien m'avait échappé...je l'ajoute dans le billet!
Très grand merci pour ce billet très complet, diversifié sur une grande russe que je ne connaissais que très peu.
RépondreSupprimerJ'ajouterai que le magazine LIRE de septembre, lui consacre quatre pages bien documentées, que j'aurais sans doute survolées si je n'avais eu connaissance de vos billets.
Merci, Colo, d'avoir effectué ce travail enrichissant.
Quelle bonne nouvelle ces pages de Lire!
SupprimerUn gros travail, vous vous en doutez, passionnant aussi....je crois que je vais faire une courte pause (de ce livre) avant d'aborder les autres femmes, toutes si intéressantes.
Bonne journée et merci à vous.
ah je n'ai pas encore vu le magazine Lire de ce mois donc merci à Christian
RépondreSupprimerj'ai évidemment réservé ce livre de L Salvayre à la bibliothèque mais là il faut de la patience
En attendant je me délecte de ton billet
Merci Dominique, je serai curieuse de lire ce que tu en penseras...
SupprimerBonne journée!
Quatre pages !!!! Ah bon ben LIRE est quand même moins phallocentré que "Le magazine littéraire" qui consacre rarement quatre pages à une femme...
RépondreSupprimerElle me plaît beaucoup cette poétesse et ce qu'en a écrit Tania complète merveilleusement tes deux passionnants billets, Colo.
Poèmes, proses et citations de cette grande dame à retenir !
(Et plus besoin de lire LIRE ;)).
Bonjour Euterpe, je n'ai lu d'elle que de nombreux poèmes, mais je ne vais pas tarder à lire de la prose.
SupprimerCe livre, "7 femmes", devrait te plaire énormément!
Bonne fin de journée!
Bonjour Colo
RépondreSupprimerJ'ai tellement de choses à lire... ( comme en ce moment, ce livre magnifique "La paix dans l'enfer" de cette femme exceptionnelle Etty Hillesum, chez Points Sagesse ) mais je note dans mon précieux carnet, cette poétesse russe qui apparemment a su ne pas se compromettre.
belle fin de journée
Bonjour Yanis, vous pourriez commencer par quelques poèmes alors, il y en a de vraiment magnifiques.
SupprimerNe pas se compromettre a eu un prix tellement élevé pour elle, qu'en lisant je me disais parfois, allez, ne sois pas aussi sotte, ta vie est en danger Marina!
Bonne fin de journée, pluies ici.
je vais commander un de ses livres à notre petite librairie (lieu de résistance).
Supprimermon autre blog : "A l'ombre de la lumière" jpaudren.blogspot.fr
Etty Hillesum, une femme absolument à connaître.
:-))
Un grand merci Colo d'avoir donner envie d'aimer Marina à celles-eux qui ne la connaissaient pas.
RépondreSupprimerUne femme entière, exceptionnelle ... Magnifique et tragique destin.
désolée il faut lire " donné "
SupprimerBonsoir Sable, oh, oui, je meurs d'envie d'en lire beaucoup plus. Demain je sors de ma campagne et m'en vais dévaliser la librairie!
SupprimerJe sais combien tu la portes dans ton coeur, alors, on en reparlera?
Bonne soirée, besos.
ce sera avec un immense plaisir !
SupprimerTu me donnes une furieuse envie de me jeter sur le livre de Lydie Salvayre, et je vais ressortir vite fait la correspondance Pasternak-Marina-Rilke de mes étagères. France-Culture a fait des émissions passionnantes sur elle, j'en ai entendue une récemment (rediffusions de la nuit, les pépites des 50 dernières années .. vive les insomnies). Je ne comprends pas le russe, mais l'interprétation de la chanteuse est magnifique.
RépondreSupprimerFrance culture tu dis? je vais essayer de les retrouver, grand merci!
SupprimerJe ne comprends pas plus le russe que toi ey n'ai aucune idée du poème chanté, mais la voix est superbe, oui, oui!
Bonne soirée Aifelle, et excellente lecture alors.
Colo, les émissions de la nuit ne sont pas réécoutables, ni podcastables et je le regrette souvent. J'adorais cette radio dans les années 80, un peu moins maintenant que les dirigeants successifs veulent la moderniser !!
RépondreSupprimerUne modernisation relative si on ne peut même pas réécouter...dommage!
Supprimermerci de me signaler, je cherchais...vainement donc!
Quelle force semblait-elle avoir ! Force et détermination... pas toujours aisées à affirmer dans mon quotidien. J'admire d'autant plus.
RépondreSupprimerBonjour Lou, une obstination farouche à ne pas dévier de sa ligne, un courage aussi, tu as raison!
SupprimerBonne journée, un beso.
Là où il y avait la poésie se trouvait le monde... Dire l'incontournable en si peu de mots.
RépondreSupprimerUne vie d’exaltations, une mort quand elles disparurent...
SupprimerTu me donnes vraiment envie de lire cet opus et je crois aussi la correspondance dont parle Aifelle.
RépondreSupprimerBelle soirée à toi !
Bises
Je crois qu'on ne peut qu'être passionné par cette lecture Enitram.
SupprimerBonne journée à toi aussi, besos!
Pardon, je suis très distrait, merci pour ta visite sur mon nouveau blog.
RépondreSupprimerJ'aime beaucoup les trois poèmes de la publication précédente.
Douce journée
Yanis, le nom de Etty Hillesum me dit quelque chose...une hollandaise je crois, je vais chercher. Merci et très bonne journée!
RépondreSupprimerUne très belle découverte que Marina Tsvetaïeva.
RépondreSupprimerJ'ai lu les poèmes que tu as choisis et j'ai suivi le lien vers ses poèmes traduits en français.
Mon choix s'est porté sur:
"Chaque poème-un enfant de l’amour,
Un enfant éternel, démuni de tout,
Un premier-né-posé près
De l’ornière, en plein vent".
Mais aussi sur cet extrait qui montre bien son style, style et jeux de langue que j'apprécie:
"Neuve ? Neige,
Plus blanche que page
Neuve neige
Plus blanche que rage
Slave…
Rafale, rafale,
Aux mille pétales,
Aux mille coupoles
Rafale-la-Folle"...
La voir sur les photos est saisissant: elle a un air grave.
merci Maïté pour ces extraits que tu aimes, que j'aime aussi.
RépondreSupprimerPourquoi ne pas suivre "Rafale-la-Folle", ne fut-ce qu'un moment? un momentito...
Bonne soirée, un beso.
Un très beau portrait de femme poète, tellement déterminée !
RépondreSupprimerInébranlable, tout à fait Danièle.
Supprimer"Boulversifiant" - quelle vie ! J'adore également "Rafale-la-Folle" Belles lectures en perspective... merci Colo
RépondreSupprimerTe connaissant, tu as écouté Frolova....l'âme russe dit-on! Superbe voix, non?
SupprimerJe t'embrasse hermano, hasta pronto!
Merci pour ce billet, qui me permettra de mieux faire connaitre cette poétesse à un ami argentin! C'est en voulant me replonger dans l'univers de cette poétesse russe, cette "brûlante" que je suis tombée par hasard sur la vidéo ajoutée à ce très beau billet. j'ai d'ailleurs découvert cette poétesse par le biais du livre de Lydie Salvayre…
RépondreSupprimerEn plus la version bilingue me facilitera l'apprentissage de cette langue.
Marina - la poésie- la langue espagnole… vous me réjouissez!
Je vais rester un moment à me promener dans votre univers.
Muchas Gracias
Catalina.
Gracias Catalina, j'espère que votre ami sera content et bonne chance en espagol.
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