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Je me souviens des noirs matins du soleil
Quand j'étais fillette
Recuerdo las negras mañanas de sol
Cuando era niña
La poésie d'Alejandra Pizarnik est faite de silences, de miroirs, d'ombres inquiétantes, de jardins, de murs fissurés, de blessures mortelles...
Comme le dit Angèle Paoli (Terres de femmes – poèmes en espagnol) dans un superbe texte, tout en délicatesse et nuances, on s'attache à ses mots et essaye de trouver où se raccrocher, une lueur.
Curieux qu'elle soit si peu connue par ici, elle qui est presque vénérée en Argentine. Alejandra a pourtant passé plusieurs années de sa vie à Paris et a traduit Bonnefoy, Artaud, Michaux et Aimé Césaire.
Peut-être effraye-t-elle trop?
Vous trouverez sa biographie, des poèmes en français et une excellente analyse de ses mots sur le blog Esprits Nomades.
Alors j'ai cherché une lueur, j'en ai trouvé une dans l'érotisme.
AMANTES
Una flor
no lejos de la noche
mi cuerpo mudo
se abre
De "Los trabajos y las noches" 1965
Amants
Une fleur
pas loin de la nuit
mon corps muet
s'ouvre
à la délicate urgence de la rosée.
(Traduction: Colo)
Plus sombres ces mots extraits d'un de ses recueils, “L'arbre de Diane”.
Más oscuras, estas palabras de uno de sus libros “El árbol de Diana”.
7Salta con la camisa en llamas
de estrella a estrella,
de sombra en sombra.
Muere de muerte lejana
la que ama al viento.
de estrella a estrella,
de sombra en sombra.
Muere de muerte lejana
la que ama al viento.
Saute la chemise en feu
d'étoile en étoile,
d'ombre en ombre.
Meurt de mort lointaine
celle qui aime le vent.
11
d'étoile en étoile,
d'ombre en ombre.
Meurt de mort lointaine
celle qui aime le vent.
11
ahora
en esta hora inocente
yo y la que fui nos sentamos
en el umbral de mi mirada.
maintenant
en cette heure innocente
moi et celle que je fus nous asseyons
sur le seuil de mon regard.
en esta hora inocente
yo y la que fui nos sentamos
en el umbral de mi mirada.
maintenant
en cette heure innocente
moi et celle que je fus nous asseyons
sur le seuil de mon regard.
37
más allá de cualquier zona prohibida
hay un espejo para nuestra triste transparencia
au-delà de toute zone interdite
il y a un miroir pour notre triste transparence.
hay un espejo para nuestra triste transparencia
au-delà de toute zone interdite
il y a un miroir pour notre triste transparence.
Et quelques vers d'un poème.
Exilio
Exil
A Raúl Gustavo Aguirre
(...)
¿Y quién no tiene un amor?
¿Y quién no goza entre amapolas?
¿Y quién no posee un fuego, una muerte,
un miedo, algo horrible,
aunque fuere con plumas,
aunque fuere con sonrisas?
A Raúl Gustavo Aguirre
(...)
¿Y quién no tiene un amor?
¿Y quién no goza entre amapolas?
¿Y quién no posee un fuego, una muerte,
un miedo, algo horrible,
aunque fuere con plumas,
aunque fuere con sonrisas?
Siniestro delirio amar a una sombra.
La sombra no muere.
Y mi amor
sólo abraza a lo que fluye
como lava del infierno:
La sombra no muere.
Y mi amor
sólo abraza a lo que fluye
como lava del infierno:
(...)
Et qui n'a un amour?
Et qui ne jouit parmi les coquelicots?
Et qui ne possède un feu, une mort,
une peur, quelque chose d'horrible,
même s'il y a des plumes,
même s'il y a des sourires?
Et qui ne jouit parmi les coquelicots?
Et qui ne possède un feu, une mort,
une peur, quelque chose d'horrible,
même s'il y a des plumes,
même s'il y a des sourires?
Sinistre délire que d' aimer une ombre.
L'ombre ne meurt.
Et mon amour
n'embrasse que ce qui coule
comme lave de l'enfer: (…)
(Trad: Colo)
L'ombre ne meurt.
Et mon amour
n'embrasse que ce qui coule
comme lave de l'enfer: (…)
(Trad: Colo)
Pour terminer, cet extrait d'une interview d'Alejandra qui donne un éclairage supplémentaire à cette personnalité si particulière et émouvante.
Para terminar, ese extracto de una entrevista a Alejandra que da un luz más a esta personalidad tan particular y conmovedora.
A.P. - Entre otras cosas, escribo para que no suceda lo que temo; para que lo que me hiere no sea; para alejar al Malo (cf. Kafka). Se ha dicho que el poeta es el gran terapeuta. En este sentido, el quehacer poético implicaría exorcizar, conjurar y, además, reparar. Escribir un poema es reparar la herida fundamental, la desgarradura. Porque todos estamos heridos.
AP- Entre autres choses j'écris pour que n'arrive pas ce que je crains; pour que ce qui me blesse ne soit pas; pour éloigner le Malin (cfr Kafka). On a dit que le poète est le grand thérapeute. En ce sens, l'affaire poétique impliquerait exorciser, conjurer et, de plus, réparer. Écrire un poème est réparer la blessure fondamentale, la déchirure. Car nous tous sommes blessés.
M.I.M. - (…) creo, casi con certeza, que el viento es uno de los principales autores de la herida, ya que a veces se aparece en tus escritos como el gran lastimador.*
M.I.M.- (…) je crois, je suis presque certaine, que le vent est l'un des principaux auteurs de la blessure, car il apparait parfois dans tes écrits comme le grand “blesseur”.
A.P. - Tengo amor por el viento aun si, precisamente, mi imaginación suele darle formas y colores feroces. Embestida por el viento, voy por el bosque, me alejo en busca del jardín.
A.P: – J'ai de l'amour pour le vent même si, précisément, mon imagination lui donne souvent des formes et couleurs féroces. Agressée par le vent, je vais dans les bois, je m'éloigne à la recherche du jardin.
M.I.M.- ¿En la noche?
A.P. - Poco sé de la noche pero a ella me uno. Lo dije en un poema: Toda la noche hago la noche. Toda la noche escribo. Palabra por palabra yo escribo la noche.*
M.I.M. - La nuit?
A.P. - Poco sé de la noche pero a ella me uno. Lo dije en un poema: Toda la noche hago la noche. Toda la noche escribo. Palabra por palabra yo escribo la noche.*
M.I.M. - La nuit?
A.P. Je sais peu de la nuit mais je m'unis à elle. Je l'ai dit dans un poème: Toute la nuit je fais la nuit. Toute la nuit j'écris. Mot à mot j'écris la nuit.
M.I.M.- En un poema de adolescencia también te unís al silencio.
A.P. - El silencio: única tentación y la más alta promesa. Pero siento que el inagotable murmullo nunca cesa de manar (...). Por eso me atrevo a decir que no sé si el silencio existe.
A.P. - El silencio: única tentación y la más alta promesa. Pero siento que el inagotable murmullo nunca cesa de manar (...). Por eso me atrevo a decir que no sé si el silencio existe.
M.I.M.- Dans un poème d'adolescence tu t'unis aussi au silence.
A.P.- Le silence: unique tentation et la plus haute promesse. Mais je sens que l'inépuisable murmure jamais ne cesse de surgir. (…) . C'est pour cela que j'ose dire que je ne sais si le silence existe.
Entrevista a Alejandra Pizarnik (extracto)
Por Marta Isabel Moia [*]
Entrevista de Martha Isabel Moia, publicada en El deseo de la palabra, Ocnos, Barcelona, 1972.
Entrevista de Martha Isabel Moia, publicada en El deseo de la palabra, Ocnos, Barcelona, 1972.
Poète maudite dont le nom m'était inconnu. Merci de nous faire découvrir cette Argentine si noire et si intense - poète de l'ombre.
RépondreSupprimerBonne nuit, amie.
Bonjour Tania, comme tu le disais sur ton blog il y a peu te référant aux peintres belges, la "mondialisation" n'atteint que trop peu souvent le monde des arts, les écrivains et poètes compris. Barrières assez incompréhensibles, non?
SupprimerPoursuivons donc poco a poco notre travail de fourmis.
Un petit bonsoir en passant. Et merci pour votre passage sur mes terres. Et de contribuer à faire connaître Alejandra.
RépondreSupprimerCù l'amicizia da u Capicorsu
Quel honneur de vous recevoir ici Angèle, merci à vous.
SupprimerD'île en île alors... vos terres sont magnifiques et j'y passe souvent, sans y laisser de gentille trace hélas, je m'en veux.
Alejandra m'a comme envoûtée; entrer dans son monde et la traduire,en sortir à regret.
¡Qué tenga un bonito día!
Vous savez sans doute les liens très forts qui ont uni la Corse et l'Aragon. Au plaisir donc de vous accueillir sur mes terres insulaires. Et n'hésitez pas à faire un petit signe.
SupprimerAmicizia
Je le ferai sans faute...hasta pronto.
Supprimer«(...) durante mucho tiempo se negó la
RépondreSupprimerrealidad física del árbol de Diana. En efecto, debido a su
extraordinaria transparencia, pocos pueden verlo.
Soledad, concentración y un afinamiento general de la
sensibilidad son requisitos indispensables para la visión.
Algunas personas, con reputación de inteligencia, se
quejan de que, a pesar de su preparación, no ven nada.
Para disipar su error, basta recordar que el árbol de
Diana no es un cuerpo que se pueda ver: es un objeto
(animado) que nos deja ver más allá, un instrumento
natural de visión. Por lo demás, una pequeña prueba de
crítica experimental desvanecerá, efectiva y
definitivamente, los prejuicios de la ilustración
contemporánea: colocado frente al sol, el árbol de Diana
refleja sus rayos y los reúne en un foco central llamado
poema, que produce un calor luminoso capaz de quemar,
fundir y hasta volatilizar a los incrédulos. Se recomienda
esta prueba a los críticos literarios de nuestra lengua.»
(Octavio Paz, prólogo del libro ÁRBOL DE DIANA, 1962).
***********************************************************************************
A pesar de
su universo lúgubre
y
a despecho de
su vida desafortunada,
el nombre de pila de
Alejandra Pizarnik
fue Flora
(ninfa de las islas Afortunadas,
diosa de las flores, los jardines y la primavera).
***********************************************************************************
Buenas noches, Colo, días floridos.
Querido Hélder,
SupprimerNo tenía conocimiento de este prólogo de O.Paz, muchas gracias, es muy interesante y fino...una sonrisa al leer "y hasta volatilizar a los incrédulos"!
Islas Afortunadas...
¿Pueden las flores combatir las violencias? Me recuerda tantos claveles...
Tan cercano su país, mismos dirigentes, mismo destino, o casi.
¿Un domingo tranquilo en Portugal? Se lo deseo de todo corazón.
Un olvido....gracias también por los links; la voz trágica de Alejandra y la preciosa ninfa.
SupprimerMilosz :
RépondreSupprimer- "Poète : comment ne pas aimer l'espace
L'inlassable fuyard qu'on ne voit que de dos..."
Oui, JEA, cette fuite...
Supprimer"Même si je dis soleil et lune et étoile je me réfère à des choses qui m'arrivent. Et qu'est-ce que je voulais?
Je voulais un silence parfait.
C'est pourquoi je parle."A. Pizarnik
Bonne fin de journée, soleil pour quelques jours.
Belle découverte Colo! je ne la connaissais pas, mais suis charmée par la simplicité de son rythme, comme s'il venait tout seul, tout naturellement.
RépondreSupprimerBonjour Inma, contente de te faire faire une découverte donc! Tu as raison , les mots s’enchaînent sans s'entrechoquer...pas aisé à traduire malgré l'apparente simplicité, hum, hum!
SupprimerBelle semaine à toi.
Un peu sombre comme poésie pour moi en ce moment, mais je pardonne parce qu'à bien lire il y a aussi des fleurs et puis sauter d'étoiles en étoiles ça me tente
RépondreSupprimerBon dimanche à toi
Désolée Dominique...tu aimeras peut-être mieux ceci tout en sautant d'étoile en fleur:
Supprimer" Et surtout regarder avec innocence. Comme si rien ne se passait. Ce qui est vrai".
A très bientôt dans ton jardin anglais fleuri!
Bonsoir, chère Colo,
RépondreSupprimer...Alejandra Pizarnik... Merci pour votre billet. Je ne la connaissais pas, pas du tout, c'est la découverte pour moi.
Buenas noches, dobrej nocy, Colo
- Karol
Dobrej nocy Karol, finirez-vous par parler espagnol et moi polonais????
SupprimerC'est bien joli "nocy", prononce-t-on le C comme un "ch" ou comme un "S" ou...?
Alexandra n'écrit pas de haïkus mais son langage poétique est très épuré...peut-être y trouverez-vous de l'inspiration...
Merci de votre passage, belle semaine.
...comme "tz" ou "ts" je pense...:)
SupprimerMerci, vous etez fantastique, Colo!
Dobrey notzy!
K.:)
¡Gracias, gracias! Passez une belle semaine.
SupprimerBonjour, Colo. Un peu de musique:
Supprimerhttp://karolaha.blogspot.com/2012/03/blog-post.html
Passez une belle journée, K.
C'est tout simplement de superbes larmes vocales, grand merci.
SupprimerJe ne la trouve pas sombre mais plutôt infiniment seule avec elle-même. Un grand merci, Colo, pour cette poétesse !
RépondreSupprimer"maintenant
en cette heure innocente
moi et celle que je fus nous asseyons
sur le seuil de mon regard."
C'est mon préféré.
Et félicitations pour les très belles et sensibles traductions.
Infiniment seule, tu as raison.
SupprimerMe trotte en tête également cette dernière phrase de l'interview:"Le silence: unique tentation et la plus haute promesse."
Merci Euterpe, bonne soirée.
Merci Colo de nous avoir fait découvrir cette sombre poétesse .
RépondreSupprimerSes mots semblent s'entrechoquer en douceur . Indéfinissable mais envoûtant !
Et comme la peinture de Van Gogh décrit bien son esprit "torturé" .
Bonsoir Gérard, j'aime beaucoup votre formule "s'entrechoquer en douceur".
SupprimerSes recueil sont courts, les thèmes sont très récurrents mais à chaque poème j'ai eu l'impression de nouveauté.
Amicalement,
Hum...recueils, c'est mieux.
SupprimerMerci Colo pour cette découverte. Je note. Je m'en vais suivre les liens.
RépondreSupprimerLa proximité avec Van Gogh lui va bien.
Bonjour Maïté, ce fut pour moi une belle découverte il y a un temps.
SupprimerArriver à exprimer un tel malaise sans tomber dans le pathos est si difficile et rare.
À très bientôt, bonne journée.
s'ouvrir à la délicate urgence de la rosée et se laisser emporter par le le vent, pour oublier les noirs matins ... La poésie, remède universel pour soigner les maux de l'âme.
RépondreSupprimerJ'aime beaucoup " exil "
Bonjour Sable, oui, écrire pour que n'arrive pas ce que l'on craint...
SupprimerPas encore de vent ici ce matin, mais une belle rosée!
Un beso.
Alejandra Pizarnik est peu connue en France.
RépondreSupprimerJe l'ai découverte il y a peu.
Le frère d'un de mes mais a repris il y a quelques années les Editions José Corti ,ces éditions ont publié Journaux c'est ainsi que je l'ai découvert cette auteure
Lors d'un séjour parisien je te conseille vraiment d'aller faire un saut dans cette "librairie-éditeur" je suis certaine que tu y seras comme un poisson dans l'eau
Belle et douce journée
Il faut lire "frère d'un de mes amis"!!!!!!
RépondreSupprimeroups!
houlala Françoise il serait bien que tu te relises!
RépondreSupprimerBon je pense que tu remettras tout dans l'ordre
Quel charabia
Je suis désolée vite et bien c'est certain ne vont pas ensemble!
Pas de problème Françoise, j'ai tout compris!!
SupprimerEn fait, ce qui est écrit en espagnol, je ne le lis pas en traduction; si je ne trouve pas la traduction sur la toile, ou si elle ne me plaît pas, je traduis moi-même.
Mais je note les éditions Corti, grand merci.
Excellente journée à toi aussi.
C'est beau, envoutant, elle exprime si bien la dualité, les doutes, les blessures, mais la poésie transcende tout cela...
RépondreSupprimerBonjour Marcelle, bien contente que tu aies apprécié sa poésie, ses mots.
SupprimerBon début de printemps!
“Dile que los suspiros del mar
RépondreSupprimerHumedecen las únicas palabras
Por las que vale la pena vivir”
¡Magnífico! Muchas gracias Oli.
SupprimerLos suspiros del mar....
Quelle écriture magnifique !
RépondreSupprimerOh oui Danièle! J'ai pensé à toi en traduisant la délicate urgence de la rosée", j'ignore pourquoi il m'a semblé que cette image devrait te plaire.
Supprimermerci pour cette belle découverte. J'ai encore plus aimé son propos que ses poèmes.
RépondreSupprimerje m'en vais retrouver le vent maintenant...
...bonjour femme du vent. Oui, cette partie de l'interview est d'une belle, un peu amère, profondeur.
SupprimerÀ bientôt.
Et me voilà à apprendre, engranger, en suis absolument ravie j'ai bien fait de passer. Je te souhaite une agréable soirée et te fais amie lointaine une biz bien cordialel
RépondreSupprimer